Cancer du sein : des facteurs de risque insoupçonnés

La croissance de certains cancers est stimulée par les hormones œstrogènes, essentiellement produites par les ovaires et, chez les femmes ménopausées, par le tissu adipeux. Cherchant à quantifier l'impact de la production d'œstrogènes sur les chances de survie à moyen et long terme des malades, deux équipes de chercheurs ont mis en lumière l'existence de facteurs de risque jusqu'alors insoupçonnés. Leurs travaux ont été présentés samedi 31 mai au congrès de l'ASCO de Chicago.

Florian Gouthière
Rédigé le , mis à jour le
Le centre des congrès McCormick, au deuxième jour du congrès de l'ASCO. (photographie : F. Gouthière)
Le centre des congrès McCormick, au deuxième jour du congrès de l'ASCO. (photographie : F. Gouthière)

Présentées à quelques minutes d'intervalles dans deux salles opposées du centre McCormick de Chicago, deux études ont particulièrement fait parler d'elles ce 31 mai au 50ème congrès de la Société américaine de cancérologie clinique (ASCO). Portant toutes deux sur l'impact de facteurs de production de l'hormone œstrogène sur les chances de survie des patientes ayant souffert d'un cancer du sein, leurs conclusions ont vivement surpris les cancérologues présents.

Ablation des ovaires : des bénéfices… pour des cancers non liés aux œstrogènes

Une ablation d'ovaires est parfois préconisée chez les femmes développant des tumeurs dont la croissance est stimulée par les hormones œstrogènes (cancers ER+). Paradoxalement, selon une étude de suivi réalisée sur 20 ans auprès de 760 femmes ayant souffert de cancers du sein, l'ablation des ovaires(1) ne présente de bénéfices nets en terme de survie à long terme que chez les femmes souffrant de certains cancers non ER+(2).

Constatant un taux de survie majoré d'au moins 30% pour ces formes de cancers, les chercheurs préconisent vivement l'intervention chirurgicale pour les malades concernées. L'incertitude attachée aux données relatives aux cancers ER+ les incite à plus de circonspection dans ce second cas.

Mais les données présentées posent, bien entendu, une autre question : par quels mécanismes la suppression de la principale source d'œstrogène peut-elle influer la survie de personnes dont le cancer s'est développé sans lien avec cette hormone ?

Obésité et ménopause : le paradoxe de la survie

Une autre étude épidémiologique présentée au congrès de l'ASCO soulève des questions analogues. Des chercheurs ont cherché à déterminer si les chances de survie des malades étaient ou non associées à l'obésité (cette dernière entraînant un sur-risque avéré de développer un cancer, voir encadré).

Pour ce faire, les épidémiologistes ont analysé les dossiers médicaux de 80.000 femmes ayant déclaré un cancer du sein. Selon ces travaux, aucune corrélation franche n'a pu être démontrée pour les femmes ménopausées. En revanche, et contre toute attente, un lien clair a pu être démontré... chez les femmes non-ménopausées.

Selon les chercheurs, avant la ménopause, les femmes souffrant d'un cancer ER+ qui ont un IMC supérieur à 30 kg/m2 ont un risque de décès à cinq ans augmenté de 22 à 47% comparées à celles ayant un IMC compris entre 20 et 25 kg/m2.

Les liens entre cancer et obésité se révèlent ainsi beaucoup plus complexes qu'envisagés jusqu'alors. Aucune hypothèse explicative n'a été proposée par les chercheurs à l'issue de la présentation des données.

 

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(1) Que celle-ci soit antérieure ou postérieure au diagnostic.
(2) En l'occurrence, il s'agit des cancers du sein non ER+ associés à une mutation du gène BRCA1. 

Présentations scientifiques de référence :


VOIR AUSSI :

Chez les femmes ménopausées, le tissu adipeux sécrète de grandes quantités d'oestrogènes. Ce phénomène explique pourquoi le taux de cancers du sein dont la croissance est stimulée par à cette hormone (cancers ER+) est directement lié à l'indice de masse corporelle (IMC), après 50 ans.