Épilepsie : quelles origines, quels traitements ?

Le point sur cette affection neurologique dont les principaux symptômes sont des convulsions. Quelles sont les différentes formes de crises ? Médicaments, gamma knife, chirurgie du cerveau : comment traite-t-on l'épilepsie ?

La rédaction d'Allo Docteurs
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Le docteur Jimmy Mohamed explique ce qu'il se passe dans le cerveau lors d'une crise d'épilepsie
Le docteur Jimmy Mohamed explique ce qu'il se passe dans le cerveau lors d'une crise d'épilepsie  —  Le Magazine de la Santé - France 5

L'épilepsie est une maladie neurologique qui touche près de 700.000 personnes en France d'après l'association Epilepsie France (entre 0,5 et 1% de la population selon le Vidal). La moitié des épilepsies commence avant 10 ans

Quels sont les signes de l'épilepsie ?

Elle se manifeste par des crises pouvant prendre la forme de convulsions ou d'absence et une altération de la conscience. Extrêmement imprévisible, cette maladie peut devenir un véritable handicap social et professionnel.

Sur le plan neurologique, ces crises font suite à une décharge anormale dans le cerveau. Le cerveau est composé de millions de cellules, principalement des neurones. Ces derniers sont reliés les uns aux autres pour former différents réseaux. Ils communiquent entre eux grâce à des signaux électriques. Certains réseaux de neurones ont pour rôle de déclencher une fonction, d'autres au contraire de l'inhiber.

Normalement, ces réseaux fonctionnent en parfait équilibre. Mais en cas d'épilepsie, cet équilibre est par moment rompu. Au lieu de fonctionner en alternance, ils s'hyperactivent tous en même temps. Se produisent alors des décharges électriques simultanées. Une sorte de court-circuit qui provoque une panne temporaire du cerveau. C'est la crise d'épilepsie.

Des crises généralisées ou partielles

Les décharges peuvent se produire à différents endroits du cortex cérébral. C'est ce qui explique qu'il y ait plusieurs types de crises d'épilepsie. Quand la crise est partielle, une décharge peut se produire dans la partie qui gère la motricité de la main. Cela se traduit par un raidissement ou des secousses rythmiques du pouce, des doigts et même d'une partie du bras. 

Quand la décharge touche plusieurs parties à la fois, elle peut provoquer une crise dite généralisée (1/3 des cas). La personne peut perdre conscience, avoir des absences de plusieurs minutes puis reprendre une activité normale. D'autres sont plus gravement atteints.

Quelles sont les causes de l'épilepsie ?

Les causes de l’épilepsie sont très variées et très complexes, c'est pour cette raison qu'il n’existe pas une seule épilepsie, mais des épilepsies. On en dénombre plus d'une cinquantaine selon l'INSERM. Elles peuvent être distinguées entre deux grands groupes : celles provoquées par une lésion et celles sans lésion.

D'une part, les épilepsies symptomatiques dues à une lésion peuvent faire suite à des perturbations du métabolisme, à une tumeur, une infection, à des troubles vasculaires du système nerveux central ou encore à des anomalies de l'organisation cérébrale. Elles peuvent aussi être d'origine traumatique, suite à un hématome cérébral ou une conséquence de maladies neurodégénératives ou encore de maladies rares.

D'autre part, les épilepsies idiopathiques, celles dont on ne connait pas la cause, sont probablement génétiques. "On considère que les facteurs sont génétiques, mais pour autant on ne les connaît pas", précise le Docteur Vercueil, épileptologue au CHU de Grenoble, interrogé en novembre 2016. "A l'heure actuelle, seuls trois ou quatre gênes par an sont identifiés par les chercheurs. Ce n'est pas suffisant pour mettre au point des traitements", poursuit-il. Pour l'instant, tous les antiépileptiques inhibent les crises, mais ne sont pas curatifs. 

Selon l'Institut du cerveau et de la moëlle épinière (ICM), les épilepsies héréditaires sont rares ; elles représentent 10 à 15% des épilepsies et sont liées à la mutation d'un seul gène (source Vidal). C’est le cas lorsque une mutation génétique a eu lieu "dans un seul gène majeur". En revanche, dans la majorité des cas, il y a plusieurs mutations génétiques dans plusieurs gènes, d'où la difficulté des les identifier.

D'après le Dr Vercueil, "on observe deux populations majeures : les enfants dont l’épilepsie est souvent génétique et les personnes âgées suite à un AVC, une tumeur ou la maladie d’Alzheimer par exemple".

Une maladie sans symptômes

"La seule maladie dont le symptôme est le risque, c'est l’épilepsie", explique Le Dr Vercueil. "Pour un malade, penser au risque de faire une crise est un vrai handicap. C'est un facteur d'angoisse et d'anxiété pour lui et son entourage", ajoute-t-il. L’épileptologue explique que "pour évaluer cette maladie, aucun symptôme n’est visible, la seule chose à évaluer est le risque de faire une crise". Trois critères existent pour évaluer les risques :

  • le temps qui passe après une crise ;
  • la cause (une lésion sera toujours à haut risque) ;
  • un électroencéphalogramme (EEG) pour voir s’il y a des décharges neuronales ou non.

"C’est donc une maladie très particulière, difficile à évaluer et encore trop stigmatisée par la société", conclut-il.

Crise d'épilepsie : les effets sur le cerveau

Quand on parle d'épilepsie, on pense aux crises très spectaculaires, mais cette maladie peut revêtir des dizaines de formes différentes et on estime qu'il existe une cinquantaine de maladies épileptiques différentes (source : INSERM). En France, on dénombre près de 700.000 patients épileptiques dont près de la moitié a moins de 20 ans. Que se passe-t-il dans le cerveau au moment d'une crise d'épilepsie ? Quelles en sont les conséquences ?

Comme expliqué plus haut, certaines épilepsies n'ont pas encore de causes clairement identifiées. Mais elles peuvent être provoquées dès la petite enfance par des maladies génétiques ou par des anomalies anatomiques du cerveau. À chaque fois, la crise se caractérise par une sorte de court-circuit au niveau des neurones.

En se répétant dans l'enfance, les crises empêchent la formation des réseaux des bonnes connexions entre les neurones des différentes régions du cerveau. Plus les crises sont longues, plus le risque de séquelles irréparables est important, surtout chez les nourrissons. Malheureusement le diagnostic est souvent trop tardif. Le Pr Rima Nabbout, neuropédiatre, conseille donc aux parents de réaliser, si possible, la vidéo d'une crise quand elle survient pour faciliter le diagnostic médical.

Gamma Knife, la radiochirurgie pour traiter l'épilepsie

Le premier traitement de l'épilepsie est médicamenteux. Mais lorsque les antiépileptiques ne suffisent plus, un traitement chirurgical peut être envisagé. Dans ce cas, il n'est pas toujours nécessaire d'ouvrir le crâne pour détruire la zone responsable des crises d'épilepsie.

Le Gamma Knife est en effet un appareil de radiochirurgie qui permet de cibler précisément la région à détruire, sans abimer les parties voisines du cerveau. Un cadre repère est fixé sur la tête du patient pour assurer la précision de la technique qui est en général réservée aux lésions de 3 cm maximum. Une cartographie obtenue par scanner et IRM permet au chirurgien de définir la région à éliminer. La puissance très elevée des radiations agit alors sur le foyer d'épilepsie.  Les effets ne sont pas immédiats mais progressifs, il faut attendre un an pour voir s'atténuer ou disparaître l'épilepsie.

La technique présente différents avantages : elle ne nécessite pas d'ouverture du crâne, elle ne nécessite pas d'anesthésie générale, elle présente moins de complications que la chirurgie et l'hospitalisation est courte, moins de 48 heures habituellement. 

Pour le moment, elle est surtout réservée aux patients avec une épilepsie résistante au traitement, avec des localisations particulières de la lésion qui doit aussi être de taille limitée.

La première phase de l'opération consiste à accéder au cerveau. Le neurochirurgien écarte le cuir chevelu, le muscle temporal puis dégage le crâne. Il découpe ensuite l'os avant d'inciser la dure-mère. Au coeur du cerveau, la minutie des gestes nécessite de pratiquer la suite de l'opération sous microscope. L'efficacité de l'opération permet aux patients d'arrêter les traitements médicamenteux. Il faut cependant patienter plus d'un an avant d'être opéré. 

La chirurgie ne concerne pas tous les patients loin de là, elle est réservée à ceux dont l'épilepsie n'est pas équilibrée par les médicaments, qui présentent un foyer bien localisé dans le cerveau et qui peut être enlevé sans créer de déficit comme un trouble du langage ou une paralysie. Ce qui représente au final la moitié des patients non soulagés par les médicaments. La chirurgie est particulièrement efficace dans les épilepsies dont le foyer responsable des crises est situé dans le lobe temporal (un des lobes du cerveau), les résultats y sont jugés excellents dans 80 à 90% des cas (source : Fondation Epilepsie).

Quels sont les traitements naturels de l'épilepsie ?

Il a été observé que les crises diminuaient avec un régime cétogène, c'est-à-dire un régume pauve en graisses, qui entraîne une augmentation des cétones, substances obtenues par la dégradation des graisses par le corps. Le régime est pauvre en glucides, ce qui est compensé par l'augmentation des lipides et des protéines. L'apport calorique doit être surveillé pour ne pas être excessif. ce régime est contraignant et il est proposé surtout aux enfants, lorsque les médicaments ne fonctionnent pas suffisamment.

La stimulation vagale est également une alternative aux traitements chirurgicaux. Il s'agit d'une technique récente, qui consiste à implanter une l'électrode au contact du nerf vague, nerf qui part du cerveau pour aller innerver le coeur et les organes digestifs. Son mécanisme d'action est mal connu et la stimulation vagale est réservée aux épilepsies non soulagées par les autres traitements.

Épilepsie : les enfants aussi

L'épilepsie est une maladie qui touche les adultes mais aussi les enfants. Différentes formes sont rencontrées comme chez les ouneaux-nés ou les premiers mois le syndrome de West, associant des spasmes et des troubles du développement psychomoteur (psychique et moteur) ou le syndrome de Dravet (crises sévères avec des contractions). Les premières années de l'enfance, il est possible de souffrir d'un syndrome de Lennox-Gastaut associant des absences et des crises avec un raidissement soudain des muscles.

Mais l'une des formes les plus fréquentes chez l'enfant est l'épilepsie-absence : elle apparaît souvent entre 5 et 7 ans disparaît le plus souvent à l'adolescence ou chez l'adulte jeune. Elle concerne particulièrement les filles.

Problème, les médicaments en vente sur le marché ne sont pas forcément adaptés. Le suivi est indispensable car dans les formes rares d'épilepsie chez les enfants, il n'existe pas de médicaments adaptés à leur âge. Ils doivent donc prendre des traitements initialement destinés aux adultes : 

"Pour environ la moitié des syndromes épileptiques, il n'y a jamais eu aucun essai qui a permis de valider une stratégie thérapeutique. Nous disposons d'un panel de molécules sur lequel on peut choisir la prescription. Le seul critère pour le choisir, c'est l'expérience personnelle et le profil des effets secondaires si on veut éviter certains effets. Chez les enfants en pleine phase d'apprentissage, il faut notamment éviter toutes les molécules qui ont un impact cognitif ou comportemental important", explique le Pr Stéphane Auvin, neuropédiatre.

La solution reste donc de trouver des médicaments adaptés aux enfants qui souffrent de formes rares d'épilepsie. Tel est l'objectif d'une équipe de recherche. Les molécules sont testées in vitro sur des cellules embryonnaires de neurones de rats. Les premiers résultats obtenus sont très prometteurs. Mais d'autres étapes sont encore nécessaires avant d'arriver aux essais cliniques sur l'homme. Les chercheurs espèrent pouvoir proposer des nouveaux traitements pour les enfants d'ici dix ans.

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