Sécurité sociale : un "trou" difficile à combler

La Sécurité sociale et les remboursements par l'Assurance-maladie font la fierté des Français, mais aujourd'hui le système semble proche de l'implosion. Et en période de campagne électorale, le fameux "trou de la Sécu" est dans tous les esprits. Pourquoi cette obsession médiatique et politique ? Qu'ont tenté les gouvernements successifs de la Ve République pour combler ce déficit ?

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le

Il y a 72 ans, l'ordonnance du 4 octobre 1945 posait les fondements de la Sécurité sociale. Le début d'un modèle solidaire selon lequel chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. Mais déjà le début d'un long combat budgétaire. Car malgré un contexte économique florissant durant les trente glorieuses, la menace d'un déficit est dans tous les esprits. Elle ne cessera plus de hanter les gouvernements. À l'époque, la Sécurité sociale est considérée comme une jeune fille dépensière. Elle gaspille sans compter et il serait temps de la recadrer. C'est en substance ce que propose le gouvernement Pompidou en 1967 avec l'ordonnance Jeanneney, la première grande réforme de la Sécurité sociale.

Le tour de vis le plus important date de 1995. Une réforme des retraites signée Alain Juppé qui ignore encore combien elle va lui coûter. Face à la colère populaire, le plan Juppé avorte mais rien n'y fait, à droite comme à gauche, le fameux trou de la Sécu vire à l'obsession : "Il n'y a aucune raison économique pour que les recettes égalent les dépenses pour une raison simple : les recettes évoluent en fonction de la masse salariale, c'est-à-dire en fonction de la croissance économique et de l'emploi, donc en fonction de variables strictement macro-économiques, alors que les dépenses évoluent en fonction d'autres variables, d'autres facteurs qui sont par exemple le progrès médical, l'augmentation de la population…", souligne Frédéric Pierru, sociologue et chercheur au CNRS.

Depuis 2004, pour les gouvernements successifs, la principale responsable de ce déficit jamais comblé est la branche Assurance-maladie : "On constate que dans le système, il y a des prix trop élevés, des actes inutiles… et on va essayer de travailler sur ces éléments pour maîtriser la dépense de santé. C'est la stratégie de la France depuis le milieu des années 2000", note Dominique Libault, ancien directeur de la Sécurité sociale de 2002 à 2012. Pour Frédéric Pierru, "cette stratégie a un intérêt pédagogique parce que cela permet de préparer les esprits à des réformes jugées impopulaires. C'est-à-dire que quand on souhaite dérembourser des médicaments, quand on veut introduire des forfaits, des franchises… cela est beaucoup plus facile après une séquence de dramatisation de l'état des comptes de la Sécurité sociale".

En septembre 2016, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a annoncé la fin du trou de la Sécu. Politiquement et socialement, cette affirmation n'a pas fait l'unanimité. L'avenir tranchera…