Faites le tri dans vos épices pour éviter l'intoxication

Les épices, ingrédients incontournables de nos cuisines, ne sont pas sans danger pour notre santé. Conservées dans de mauvaises conditions, elles peuvent abriter des champignons toxiques. On fait le point.

Christophe Mercier
Rédigé le , mis à jour le
Faites le tri dans vos épices !
Faites le tri dans vos épices !  —  Le Mag de la Santé - France 5

Nous en avons tous dans les placards de notre cuisine, et certains en ont peut-être même acheté sur les marchés pendant les vacances. Mais contrairement à l’adage qui dit à propos d’un aliment "c‘est sec donc ça ne craint rien ", les épices peuvent être à l'origine de sérieux problèmes de santé.

“Si la poudre est agglomérée, c’est qu’il y a dans le pot un super développement de champignons microscopiques filamenteux, qui sont une famille de micro-organismes : Aspergillus, Pénicillium” explique Christophe Mercier, hygiéniste et microbiologiste en agitant un pot d’épices aggloméré.

Un mycélium qui se développe facilement

Ces micro-organismes se développent à la manière d’un petit arbre : à la place d’un tronc, ils ont un “thalle”, à la place des racines, du mycélium et à la place des graines, des spores qui peuvent germer. Avant d’être une poudre agglomérée, ces épices étaient des végétaux, remplis de vitamines, de minéraux et d’oligo-éléments. Elles constituent donc un terreau fertile pour le développement des champignons.

Et plus on utilise le pot contenant l’épice, plus on augmente la quantité d’oxygène présent à l’intérieur, favorisant le développement des spores de champignons. Et enfin, pour couronner le tout, lorsque l’on verse ces épices au-dessus d’une poêle ou d’une casserole fumante de vapeur d’eau, de l’humidité pénètre inévitablement.

Toutes ces conditions, nutriments, oxygène et humidité, favorisent le développement des spores.

Des toxines dangereuses pour la santé

Problème : ces champignons microscopiques produisent des poisons au niveau de leurs racines, qu’on appelle des mycotoxines. Ces dernières résistent à la chaleur de la cuisson, et ne sont pas détruites lors de l’ingestion par l’acide chlorhydrique de l’estomac.

Pire, depuis l’intestin, elles rejoignent directement la circulation sanguine et provoquent divers troubles. Certaines s’attaquent au cerveau (Patuline), d’autres au foie (Aflatoxine) ou encore aux reins (Ochrotoxine A). La plupart sont oncogènes, c’est-à-dire qu’elles peuvent générer des cancers de ces organes.

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Les épices de marché, un "ensemble non hygiènique"

Malgré les dangers encourus, les épices continuent d’être vendues sous cette forme pour un côté pratique. “Il suffit d’ouvrir le pot, de saupoudrer le plat, et hop, c’est fait !” déclare Christophe Mercier. Plus pratique à l’utilisation, mais aussi plus pratique à la vente : si les épices étaient vendues entières et non en poudre, elles seraient invendables, à cause de contaminants comme des insectes, des déjections animales, des poils… On les broie donc pour les rendre acceptables à la vente.

La réglementation européenne autorise un pourcentage de 5% de contaminants dans les épices en poudre. Mais dans les marchés d’été, ce pourcentage n’est bien souvent pas respecté. “Les épices sont en vrac, à l’air libre, avec les acheteurs et les vendeurs qui postillonnent dessus, ceux qui les sentent, ceux qui les touchent, les insectes qui s’y posent, ceux qui y meurent. C’est un bel ensemble non hygiénique.” 

Les bons gestes à avoir

“Lorsque vous ouvrez un flacon pour la première fois, inscrivez la date d’ouverture au feutre indélébile, et jetez le contenu quand cette date dépasse six mois”, conseille le microbiologiste. “Mais surtout, achetez des épices entières pour les moudre au dernier moment”.

Pour le poivre, il est également recommandé d’éviter les petits sachets, sur lesquels ne se trouve pas la date de fabrication ni la date limite. Evitez aussi les poivrières à trous des restaurants, qui sont rarement lavées. Il vaut mieux favoriser les moulins à poivre, et moudre les grains soi-même.

Seule exception : le sel raffiné, qui se conserve sans limite de temps. “Dans mille ans, il ne sera jamais contaminé !” affirme Christophe Mercier.