Front populaire : le sport pour tous !

L'année 2016 marque les 80 ans de l'élection du Front populaire, une coalition de partis de gauche qui gouverna la France de 1936 à 1938. On doit au gouvernement de Léon Blum les deux semaines de congés payés, la semaine de 40 heures, l'accès aux loisirs... mais aussi une politique en faveur du sport pour tous, portée par Léo Lagrange. Explications.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Été 1936, de nombreux Français partent pour la première fois en vacances. Et pour occuper ce temps libre, ils découvrent les loisirs. Pour le gouvernement de Léon Blum, le sport a une place de choix. Un sous-secrétariat d'Etat au sport et à l'organisation des loisirs voit même le jour, incarné par Léo Lagrange. Ce jeune socialiste âgé de 36 ans va imposer sa vision très politique de la pratique sportive : "Dans les sports, nous devons choisir entre deux conceptions différentes. La première se résume dans (…) la pratique de sports restreints à un nombre relativement petit de privilégiés. (…) Selon la seconde, (…) c'est du côté des grandes masses qu'il faut porter le plus grand effort".

Cette phrase prononcée par Léo Lagrange à la radio pose les fondements de la politique qu'il compte mener. "Il faut distinguer deux catégories de sports dans les années 30. Vous avez quelques sports populaires qui sont pratiqués certes, mais qui sont surtout admirés comme le cyclisme, le football, la boxe… Par ailleurs, vous avez des sports d'élite comme le tennis, les sports d'hiver… Et l'une des intentions du Front populaire, c'est justement de populariser les sports d'élite", précise Pascal Ory, historien. Un projet un peu fou verra même le jour : le développement de l'aviation populaire. À la veille de la guerre, adolescents et adultes ont ainsi la possibilité de s'essayer à l'aviation, au vol libre (planeur) ou au modélisme.

Pour démocratiser le sport et le rendre accessible au plus grand nombre, il faut des infrastructures. Le Front populaire réalise un inventaire national des équipements sportifs : stades, gymnases, piscines, terrains de jeux… On construit dans tout le pays des équipements peu coûteux mais nombreux. Et c'est surtout pour la jeunesse que cette politique publique est menée, car la France doit rattraper son retard sur le plan sportif par rapport à ses voisins totalitaires. C'est notamment pour cette raison qu'est créé en 1937 un examen : le brevet sportif populaire.

Cette politique de démocratisation du sport menée par le Front populaire répond à un souci d'égalité mais c'est aussi un véritable enjeu de santé publique : "Notre but, simple et humain, est de permettre aux masses de la jeunesse française de trouver dans la pratique des sports, la joie et la santé", déclare Léo Lagrange le 10 juin 1936. Le sous-secrétariat d'Etat est d'ailleurs rattaché au ministère de la Santé publique.

En 1938, c'est la fin du Front populaire. Léo Lagrange ne sera resté au pouvoir que quelques mois mais au delà des gymnases qui portent son nom, son héritage est bien réel : "Quand on a aujourd'hui 17 millions de licenciés dans les clubs, quand on a autant de pratiquants, l'héritage du Front populaire est poursuivi", explique Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports. "À nous de savoir le valoriser, l'amplifier avec notamment des mesures concrètes comme le plan Citoyens du sport en direction des quartiers prioritaires de la ville".

"Je pense que les gouvernants du Front populaire seraient heureux de voir que pour la première fois dans notre histoire, nous avons intégré le sport sur ordonnance", poursuit le ministre. Reste à savoir s'il s'agira d'une de ces petites révolutions dont on parlera encore dans 80 ans.