Commotion cérébrale : les rugbymen écartés du terrain pendant 10 minutes après un choc

Mis en place depuis 2012, le protocole commotion doit permettre aux médecins de déterminer si un rugbyman est apte à retourner sur la pelouse après un choc violent à la tête. Cet examen doit désormais durer au minimum dix minutes. Un laps de temps suffisant selon les instances pour évaluer les riques qu'encourent les joueurs.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Le protocole commotion est mis en place depuis 2012 dans le rugby professionnel.
Le protocole commotion est mis en place depuis 2012 dans le rugby professionnel.

Groggy, hébété après un choc à la tête, le joueur revient sur la pelouse presque immédiatement après sa sortie du terrain. Cette scène, courante dans le rugby professionnel, ne devrait plus se reproduire. C’est ce qu’espère World Rugby, l’instance mondiale de l’ovalie. Elle a décrété que les joueurs victimes d'un choc à la tête ne pourront plus revenir sur le terrain avant une durée minimale de dix minutes, afin de protéger les joueurs faisant l'objet d'un protocole commotion.

Il n’existait jusqu’alors aucune durée minimale pour cet examen. L’amendement prend effet à compter du 26 août et sera appliqué à toutes les compétitions professionnelles. "Les dernières données indiquent que le temps moyen nécessaire pour bien visualiser les images par une équipe ou un médecin indépendant est de sept minutes. La durée désormais imposée de dix minutes est destinée à apporter un environnement plus détendu, permettant une meilleure prise de décision et ainsi d'échapper au stress d'une décision rapide", justifie World Rugby.

Ces dernières années, des protocoles plus stricts ont été mis en place pour tenter d'empêcher les joueurs de reprendre trop vite quand ils ont subi de tels chocs. "Actuellement, sur 22 compétitions professionnelles, 92% des joueurs ayant subi une commotion cérébrale ont été identifiés et retirés du match de manière définitive", se félicite World Rugby, dont le président Bill Beaumont a rappelé que la santé des joueurs "continue d'être notre priorité".

Le nombre de commotions cérébrales dans le Top 14 en hausse

En mai 2017, le quotidien L’Equipe rappelait pourtant que 34% des joueurs ayant subi une commotion lors de la saison 2015-2016 de Top 14 étaient revenus sur le terrain, malgré le protocole. Les dix minutes imposées devraient réduire ce taux dramatique, puisque subir une deuxième commotion quelques minutes après la première aggrave les conséquences neurologiques et peut même fatal chez les jeunes joueurs.

Dans le championnat français, les chiffres du nombre de commotions cérébrales avérées sont en hausse : 17 de plus en 2015-2016 par rapport à 2012-2013. Une augmentation qui s’explique en partie par la plus grande attention portée à ce type de blessures, mais aussi par la violence accrue des contacts.

Le choc de la commotion va faire cogner le cerveau contre les parois de la boîte crânienne. Cela génère des lésions dans le lobe frontal, qui ne peuvent être détectées que par un examen neurologique. On ne sait pas combien de commotions cérébrales un joueur peut supporter. Chacun de nous aurait une sorte de quota à ne pas dépasser, et qui varierait d'une personne à l'autre.

Une commotion peut d’abord entraîner un hématome ou un œdème cérébral. Si les premiers examens montrent que ce danger est écarté, il est toutefois possible de ressentir ensuite des symptômes liés au syndrome post-commotionnel : sensibilité auditive, problèmes de concentration, irritabilité, anxiété, fatigue. Avec du repos, ces problèmes peuvent mettre entre une vingtaine et une centaine de jours à disparaître.

Un footballeur américain a pris sa retraite à 26 ans après les résultats d’une étude sur les commotions

Mais les sportifs professionnels, poussés par la pression du résultat, reprennent souvent une activité sportive trop tôt après leur choc. Ils risquent alors d’abîmer encore plus un cerveau déjà fragile. Plusieurs études, portant cette fois sur le football américain, montrent que la répétition de ces chocs au cours de la carrière augmente le risque de souffrir maladies de neuro-dégénératives, comme la sclérose latérale amytotrophique ou la maladie d’Alzheimer.

Après l’une de ces études confirmant le lien entre la pratique du football américain et dégénérescence cérébrale parue fin juillet, le joueur des Ravens de Baltimore John Urschel, seulement 26 ans, avait annoncé l’arrêt de sa carrière pour se consacrer à son doctorat en mathématiques. Les médias outre-Atlantique avaient fait le lien entre l’annonce de cette retraite anticipée et l’étude publiée dans la revue JAMA. En août 2015, Urschel avait avoué avoir subi une commotion qui avait "réduit ses capacités à bien réfléchir en termes mathématiques".

La littérature scientifique est moins abondante pour le rugby professionnel, mais il y a peu de doutes sur le fait que ses pratiquants soient victimes des conséquences neurologiques à long terme des commotions. Un constat qui devrait, espérons-le, inciter les différentes fédérations à prendre d’autres mesures pour mieux protéger la santé des joueurs.

Avec AFP