Comment faciliter la communication entre le soignant et le soigné ?

On se parle dans le couple, entre parents et enfants, on se parle aussi entre soignants et soignés, mais est-ce qu’on se parle bien ? Les conflits qui surviennent entre soignants et soignés sont-ils liés à une carence de cette communication ? Voici quelques clefs pour comprendre comment pouvoir mieux communiquer avec une personne malade.

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le

La maladie est un événement extra-ordinaire, l'ordinaire c’est un corps qui fonctionne, qui nous porte là où nous avons besoin d’aller. La maladie, longue, grave, va chasser le malade de cette normalité. Ce sera un séisme qui reconfigurera nos préoccupations, nos intérêts, nos priorités, notre caractère, en bref notre vie. Personne ne peut savoir comment il réagirait à l’annonce d’une maladie, comment il la gèrerait. Un tel bouleversement touchera évidemment notre rapport aux autres (et à soi), nos échanges. Aura-t-on besoin des autres ? Aura-t-on besoin de parler, de savoir ? Comment réagiront les autres ? Nous n’en savons rien...  

La relation soignant-soigné est pourtant au cœur de cette médecine humaine dont chacun rêve et dont on s’éloigne un peu plus chaque jour. Cette relation est fondée sur la communication, échange à double sens de messages verbaux, écrits ou comportementaux entre les personnes.

Parler de la maladie et de son traitement

On peut parler de la maladie, de son traitement sans réellement échanger. Les soignants ont appris à soigner, ils n’ont pas forcément appris comment parler, ni été guidés dans leur approche du malade. Certains ont le sens de l’autre, des mots adéquats, d’autres se cacheront derrière leur technique et leur jargon. Ils diront la maladie sans tenir compte du malade. Si chacun se tient dans son rôle "imaginaire ", savant et lointain pour le médecin, ignorant et obéissant pour le malade, les informations seront transmises sans qu’il y ait dialogue. Ces soignants-là, souvent, refoulent leurs propres appréhensions, du malade et de ses attentes qu’ils ne pourront satisfaire, appréhensions de leur impuissance, parfois.  

Ce que le patient peut et veut entendre

Idéalement c’est le malade qui devrait donner la couleur du dialogue à tricoter ensemble, de ce qui peut ou ne peut pas se dire. Une couleur qui évidemment dépendra de l’interlocuteur. Tout soignant a constaté que le patient n’entend que ce qu’il peut entendre, occultant des informations ou verdicts trop écrasants. Le malade est très vulnérable, forcément perturbé par sa maladie. On ne peut exiger de lui une écoute "comme il se doit", qui faciliterait la tâche du médecin. On ne peut exiger de lui qu’il soit fort, lucide, ou à l’inverse qu’il épargne aux équipes soignantes ses questions incessantes sur le pourquoi et le comment. Si le médecin peut être disposé à annoncer une issue fatale, le malade n’a pas forcément envie de l’entendre, sans pour autant la nier. C’est pourquoi les devoirs de vérité, ou à l’inverse l’idée qu’il faille surtout ménager le patient, ne peuvent être érigés en généralités.    

L'entourage dans la relation au malade

L'entourage aussi peut se trouver embarrassé sur la façon d’aborder le malade, ou du moins sa maladie. L’atteinte physique ne va pas seulement perturber celui qui la vit, c’est tout l’entourage qui s’en trouve bouleversé. À cause de l’affection que l’on voue au malade, à qui on souhaite le meilleur mais aussi parce que c’est le rappel de notre fragilité, de notre mortalité et chacun fait comme il le peut. Nos "pouvoirs" sont parfois limités et tout sera perturbé. Il y a des amis qui se défilent, pas par indifférence, mais par incapacité à affronter la situation. Certains dont la sollicitude sera très pénible.
Il y aura du manque de tact, des "allez, tout ira bien !" dont certains ont besoin, qui font horreur à d’autres. Il y aura des déceptions, des confirmations, d’excellentes surprises, des rencontres. Il se joue, à l’endroit de la maladie, toute la palette des relations, leur subtilité et leurs impossibilités. C’est encore le malade qui indiquera ce dont il a besoin, les mots ou silences qui le soutiennent et qui peut être décevra son entourage, en ne réagissant pas "comme il faut". Lui-même devra s’accommoder de ce que l’autre, parent ou ami, est en mesure de lui apporter ou pas.  

Une parole à inventer

Une parole, ou des sous-entendus sont à inventer, ils seront propres à chaque cas et réclameront des efforts de part et d’autre. Ils réclameront davantage d’écoute du malade, qui lui-même ne sera pas toujours en mesure d’écouter les autres, "occupé" qu’il est par son mal. Ce ne sera pas une relation d’égalité entre soignant et malade, le malade est en infériorité, ce dont "profitent" certains soignants d’ailleurs, qui jouent de leur pouvoir, mais une relation d’altérité. L’un et l’autre devront s’accorder et s’aider. Les soignants sont aussi démunis que le malade qui se découvre tel. Ils sont démunis et livrés à eux-mêmes et peut-être, qu'eux d’abord, pour accompagner au mieux les patients, devraient pouvoir être mieux soutenus dans cette approche de l’autre, qui ne va pas de soi.