Sida : une protéine à l'origine de l’inflammation chronique ?

Un des mécanismes clés de l’inflammation généralisée chronique qui persiste chez la plupart des patients infectés par le VIH, malgré le traitement antirétroviral, vient d'être mis en évidence par une équipe de chercheurs du CHU de Toulouse, dirigée par le Dr Pierre Delobel.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Sida : une protéine à l'origine de l’inflammation chronique ?

Chez la majorité des patients infectés par le VIH, même lorsqu'ils sont sous traitement antirétroviral et que celui-ci est efficace, une inflammation généralisée chronique persiste. Si cette inflammation ne provoque pas de symptômes visibles sur le plan clinique, à long terme elle favorise un vieillissement accéléré et l'apparition de pathologies cardiovasculaires. 

L'équipe de chercheurs sous la direction du Dr Pierre Delobel, a démontré que la cause de cet état inflammatoire chronique était une altération de l'immunité de la muqueuse intestinale. La muqueuse intestinale étant altérée, les bactéries de la flore intestinale passent vers la circulation sanguine, ce qui entraîne cette inflammation chronique.

Une barrière contre les bactéries

Cette étude a concerné vingt patients infectés par le VIH en succès thérapeutique et dix témoins séronégatifs sur plus de trois ans. Elle montre que, chez les patients infectés par le VIH, certains lymphocytes CD4 (cellules du système immunitaire) qui sont normalement destinés à migrer vers la muqueuse intestinale, restent bloqués dans le sang.

Ces lymphocytes ont pour rôle de faire "barrière" entre le tube digestif et la circulation sanguine, et donc d'empêcher le passage des bactéries vers le sang. Mais chez les patients VIH, les chercheurs ont constaté un nombre anormalement diminué de ces lymphocytes CD4 dans la muqueuse intestinale alors qu'ils étaient paradoxalement très nombreux dans le sang.

Un cercle vicieux

Ce phénomène est lié à la production insuffisante d'une protéine appelée chimiokine. Cette protéine a pour fonction d'attirer les lymphocytes CD4 vers la muqueuse intestinale. "Lorsque les patients prennent un traitement antirétroviral efficace, le nombre de leurs lymphocytes CD4 sanguins remonte sensiblement, détaille Pierre Delobel. Ces lymphocytes devraient donc en toute logique être attirés vers la muqueuse intestinale. Mais comme la production de la chimiokine y est insuffisante, ces lymphocytes n'atteignent pas leur cible au niveau de l'intestin."

"C'est un vrai cercle vicieux, ajoute Pierre Delobel. Le déficit immunitaire de la muqueuse conduit à une altération de celle-ci, qui entraîne le déficit en chimiokine, qui lui-même entretient le déficit immunitaire de la muqueuse."

Les résultats de cette étude, publiée dans le Journal of Clinical Investigation du 12 décembre 2011, ouvrent des perspectives enthousiasmantes pour la prise en charge de l'inflammation persistante observée chez les patients séropositifs sous traitement antirétroviral efficace. Elle plaide pour un dépistage et un traitement antirétroviral précoce du VIH. Elle ouvre par ailleurs la voie à des traitements immunologiques permettant de restaurer la production intestinale de chimiokine.

 

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