Médecins exerçant en libéral à l'hôpital : la facture reste salée

Au sein des hôpitaux publics, 12% des médecins consacrent l'équivalent d'une journée par semaine à une clientèle privée, facturant leurs services très au-delà des seuils de remboursement de la Sécurité sociale. Si les dépassements d'honoraires de ces praticiens apparaissent en légère baisse en 2013, les sommes en jeu restent souvent coquettes…

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le
Entretien avec Thomas Laurenceau, rédacteur en chef de 60 millions de consommateurs
Entretien avec Thomas Laurenceau, rédacteur en chef de 60 millions de consommateurs

En 2013, 4.889 des 40.000 praticiens hospitaliers ont exercé en secteur dit "libéral" au sein de l'établissement public les employant, selon des données publiées dimanche par 60 millions de consommateurs et le Collectif interassociatif sur la santé (Ciss).

Parmi cette minorité, 43% (2.107 médecins) pratiquaient des tarifs supérieurs au plafond de la Sécu, c'est-à-dire qu'ils traitaient des patients ayant choisi de payer plus que les tarifs remboursés par la Sécurité sociale pour s'offrir leurs services.

Ces dépassements pratiqués dans le cadre de cet exercice libéral, au sein de l'hôpital public, ont représenté 68,7 millions d'euros l'an dernier, contre 70 millions en 2011 et 69,1 millions l'année suivante.

Quand les tarifs des cliniques s'invitent à l'hôpital public

Bien que limités dans leur nombre, les montants n'en restent pas moins parfois conséquents : 2.000 euros pour la pose d'une prothèse de hanche, 700 euros pour une intervention de la cataracte.

En 2013, le montant moyen des dépassements d'honoraires cumulés s'est élevé à 33.000 euros, selon les données de l'institut des données de santé consultées par le Ciss. Les pratiques sont très différentes selon les spécialités : les ophtalmologues ont perçu en 2013 en moyenne 55.000 euros au-delà du tarif Sécu, les gastro-entérologues 15.000 euros. Les chirurgiens comptabilisent près de la moitié des dépassements.

Le Ciss et 60 millions de consommateurs observent toutefois "une tendance à la modération" pour "quelques uns des champions du dépassement" qui ont revu leurs prix à la baisse.

Des règles accompagnent l'exercice libéral à l'hôpital comme la limitation de cette pratique à 20% du temps de travail du médecin. Un certain pourcentage du chiffre d'affaires réalisé doit également être reversé à l'établissement hôte, au titre de l'utilisation de l'infrastructure.

Une dérive clairement identifiée

"Au moment où une nouvelle loi de santé porte parmi ses objectifs à la fois la rénovation du service public hospitalier et la lutte contre les barrières financières à l'accès aux soins, nous attendons qu'elle introduise [des] dispositions très concrètes [pour] répondre à une dérive déjà identifiée de notre système hospitalier public", plaide 60 millions de consommateurs, qui dénonce régulièrement cette situation dans ses colonnes.

Malgré un infléchissement des dépassements à l'hôpital, le Ciss et 60 millions de consommateurs disent attendre "beaucoup plus, avec les promesses affichées du nouveau contrat d'accès aux soins sur lequel nous n'avons aucune visibilité quant au nombre de praticiens hospitaliers l'ayant signé".

Les dépassements d'honoraires sont l'un des chevaux de bataille de la ministre de la Santé, Marisol Touraine. Elle avait obtenu à l'arraché, en 2012, un accord instaurant un contrat d'accès aux soins, appliqué depuis près d'un an et proposé aux médecins à honoraires libres. Il vise à limiter les dépassements d'honoraires parfois très coûteux pour les patients (les complémentaires santé ne remboursant pas forcément l'intégralité des dépassements). 

VOIR AUSSI