Crash : ''probablement un suicide-homicide prémédité''

Le copilote de l'avion de la Germanwings, resté seul dans le cockpit, est fortement soupçonné d'avoir volontairement précipité l'appareil sur le Massif des Trois-Évêché. Les circonstances de l'évènement interrogent sur la psychologie d'Andreas Lubitz, 28 ans, et sur les raisons qui l'ont amené à un tel acte. Le Pr Jean-Louis Terra, psychiatre, spécialisé dans la prévention du suicide, nous donne des éléments de réponses.

Héloïse Rambert
Rédigé le
Photo du compte Facebook d'Andreas Lubitz, le copilote. (DR)
Photo du compte Facebook d'Andreas Lubitz, le copilote. (DR)
  • Selon vous, s'agissait-il d'un acte impulsif ou prémédité ?

Il est évidemment difficile de tirer des conclusions définitives. Cependant, nous sommes certainement dans le cas d'un suicide-homicide prémédité, comme c'est le cas pour la plupart des suicides. Plusieurs éléments dont nous disposons le laissent penser. Son calme, tout d'abord : il a été parfaitement capable de tenir une conversation posée avec le commandant de bord pendant une vingtaine de minutes avant de rester seul. Sa respiration était tranquille. Le fait qu'il n'ait pas répondu aux sollicitations multiples va aussi dans ce sens. Son acte a été précis, efficace, effectué au moment voulu. Tout le contraire d'un acte impulsif qui est, au contraire, souvent maladroit et fait au mauvais moment. Peut-être en saurons-nous plus dans les jours qui viennent sur son éventuelle préparation. Par exemple, en apprenant qu'il avait dit "au revoir" à certaines personnes...

  • Comment expliquer un tel acte ?

Il y a probablement de grandes souffrances à l'origine d'une pareille décision. Le symbole est fort : il s'en est pris à la fois à un corps de métier, chargé du transport et de la protection, à sa compagnie, et à des familles. Avait-il le sentiment d'être quantité négligeable ? De ne pas être considéré à sa juste valeur ?

  • Est-ce le signe d'une pathologie psychiatrique ?

La plupart des suicides s'inscrivent dans un contexte de dépression. Dans le cas d'Andreas Lubitz, j'excluerais une dépression mélancolique : les personnes qui en souffrent sont comme "figées", incapables de prises de décision, de passages à l'acte. Je n'envisagerais pas non plus une bouffée délirante. Si tel était le cas, il aurait communiqué, crié, repoussé ceux qui cherchait à entrer en contact avec lui. Je pencherais plutôt vers une dépression accompagnée d'amertume, d'un sentiment d'injustice et de persécution. Qui se serait peut-être concrétisée par une vengeance dont il se serait alors délecté, tant la chute de l'avion (8 minutes) a été longue.

Pour en savoir plus sur l'accident de la Germanwings :