L'excision, une mutilation sexuelle

200 millions de femmes ont subi une excision. On estime à 60 000 le nombre de femmes excisées en France, malgré l'interdiction de la pratique. Certaines ont fait le choix d'avoir recours à la chirurgie pour réparer les dégâts de cette mutilation génitale.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Qu'est-ce que l'excision ?
Qu'est-ce que l'excision ?  —  Le Mag de la Santé - France 5


De quoi s'agit-il ? L'excision simple consiste à enlever le capuchon qui recouvre le clitoris, le prépuce : c'est la clitoridectomie. L'excision complète consiste à couper le clitoris et les petites lèvres. Elle représente 80 % des cas. Une autre pratique, l'infibulation, consiste à couper non seulement ces deux parties mais aussi à coudre ensemble les grandes lèvres, en ne laissant qu'un petit orifice pour l'écoulement des urines et des règles.

Ces pratiques font courir des risques d'infections et d'hémorragies, parfois responsables du décès. Les femmes excisées souffrent souvent de douleurs intenses toute leur vie, notamment lors des règles et des rapports sexuels. La vie sexuelle est en effet altérée, les risques d'infection et d'incontinence existent, parfois sources d'abandon scolaire. Il y a plus de complications durant l'accouchement, à type de déchirures du périnée et de saignements. Le retentissement psychologique de ces mutilations sexuelles est considérable, avec davantage d'anxiété, de dépression, de syndrome de stress post-traumatique (source : Unicef)

L'excision : une pratique ancestrale

L'excision, une pratique ancestrale
L'excision, une pratique ancestrale

Où pratique t-on l'excision ? L'excision se pratique dans trente pays d'Afrique et du Moyen-Orient. Et bien que la plupart de ces Etats soient musulmans, l'excision n'est en aucun cas d'origine religieuse. Aucun texte sacré n'oblige l'excision du clitoris, contrairement à la circoncision des garçons dans les religions musulmane, juive, chrétienne du Moyen-Orient et copte. On estime que 5% des femmes mutilées vivent en Europe. Les 60.000 femmes excisées vivant en France viennent principalement des pays pratiquant les mutilations sexuelles, le Mali, le Sénégal, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire et la Guinée (source : site du gouvernement).

Cette pratique date de bien avant l'arrivée de toutes les religions monothéistes. Elle aurait pour raison de garantir la "pureté" des jeunes filles dans le but d'un "bon mariage" et plus tard, qu'elles restent fidèles.

L'excision est pratiquée à tous les âges mais particulièrement entre l'enfance et l'âge de 14 ans. Ce sont des femmes qui la pratiquent, on les appelle les exciseuses. Dans les zones rurales, elles utilisent des couteaux ou des lames de rasoir, sans aucune anesthésie. Le risque de transmission du VIH est bien réel, les instruments n'étant pas forcément suffisamment désinfectés. En ville, ce sont des sages-femmes qui officient, cette fois sous anesthésie. Mais même s'il y a moins de risque d'hémorragie ou d'infection, le résultat final est le même. Sans parler des douleurs que l'excision provoque sur le moment et par la suite, lors des rapports, des règles et de l'accouchement, par exemple.

L'opération de restauration du clitoris

Depuis une quinzaine d'années, une technique de réparation du clitoris après excision a été mise au point par le Dr Pierre Foldès, un chirurgien urologue français. La partie visible du clitoris (composée du gland et du corps du clitoris) se prolonge en effet à l'intérieur du corps par une double arche.  Il est attaché au bassin par les ligaments suspenseurs.

Le chirurgien retire la partie lésée du clitoris puis il coupe les ligaments attachés au clitoris, pour faire avancer celui-ci de quelques centimètres et reconstruire un gland. Les nerfs sont toujours opérationnels. A la fin de l'intervention, le clitoris a un aspect très inflammatoire. Il y a toujours un œdème, c'est normal. Le nouveau gland clitoridien est rouge et gonflé mais au fur et à mesure de la cicatrisation, il va retrouver un aspect normal.

Le retour de l'acquisition sensorielle de cette zone apparaît entre la quatrième et la huitième semaine. Sachez néanmoins qu'en ce qui concerne la sensibilité "sexuelle", le fait de retrouver du plaisir est plus difficile à déterminer, car ces femmes n'ont pas de point de comparaison et la sexualité était surtout associée à la douleur. Elles découvrent au fil des mois de nouvelles "sensations". Un accompagnement spécialisé, par un sexologue, est donc vivement recommandé en parallèle de la chirurgie, pour accompagner les femmes à la découverte de leur corps, sur le chemin du plaisir.

L'opération de restauration du clitoris est aujourd'hui considérée comme un acte de chirurgie réparatrice, elle est donc remboursée par la Sécurité sociale.

En 2021, la découverte de la zone du cerveau associée au clitoris pourrait déboucher sur de nouvelles thérapies mais les recherches sont encore longues...

Lutter contre l'excision : un devoir

La lutte contre l'excision fait partie des grands programmes de l'OMS et de l'UNICEF. Cette dernière organisation a même fait du 6 février la journée internationale de tolérance zéro pour les mutilations génitales féminines.

La loi française précise que les mutilations sexuelles féminines sont considérées comme des crimes relevant de la cour d'assises. Les peines prévues par le Code pénal pour l'auteur d'une mutilation et pour les responsables de l'enfant vont de dix à vingt ans de réclusion criminelle. La loi s'applique aussi quand l'excision est commise à l'étranger, lorsque la victime est de nationalité française.

En Afrique, des représentants religieux et différents gouvernements tentent d'interdire cette pratique ancestrale, notamment par des campagnes d'information sur les méfaits de l'excision. Le changement des mentalités est malheureusement un processus très lent, or pour toutes ces fillettes, il est urgent d'agir.

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