Atteinte sexuelle sur mineure : la question de l’âge du consentement sexuel

Les magistrats qui devaient juger mardi 13 février, à Pontoise, un adulte pour "atteinte sexuelle" sur mineure et non pour viol ont demandé une nouvelle enquête. Cette affaire a relancé depuis quelques mois le débat sur l'instauration en France d’un âge minimal pour le consentement sexuel. 

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Atteinte sexuelle sur mineure : la question de l’âge du consentement sexuel
ccc/Pixabay

L’affaire avait fait grand bruit à l’automne dernier. Un homme de 29 ans a comparu mardi 13 février devant le tribunal correctionnel de Pontoise, dans le Val-d'Oise, pour atteintes sexuelles sur une jeune fille de 11 ans. Le procès, initialement prévu fin septembre, avait été renvoyé. La ligne de défense de l’homme est simple : la jeune victime aurait consenti et il n’aurait usé ni de violence, ni de menace ou de contrainte.  S’il a bien commis un acte illégal, il n’est pas jugé pour un crime (le viol) mais pour atteinte sexuelle, un délit puni beaucoup plus légèrement par la loi. Il s'agit de la qualification juridique concernant l'acte sexuel entre un adulte majeur et un enfant de moins de 15 ans, commis sans violence, contrainte menace ou surprise. Les parents de la fillette ont demandé la requalification des faits en viol.

Apporter la preuve du non-consentement

L’ouverture de ce procès a mis au grand jour un flou législatif important. En France, aucun âge limite n’est fixé par la loi pour le consentement sexuel. L’absence de consentement d’un ou une mineure à un acte sexuel n’est donc jamais présumée. Il faut en apporter la preuve quel que soit son âge.

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Pour Edouard Durand, juge des enfants et co-président de la commission "Violences de genre" du Haut Conseil pour l’Egalité (HCE), cette situation juridique ne protège pas suffisamment les mineurs de moins de 15 ans des violences sexuelles. "Sans être très fréquents, les cas comme celui qui s’apprête à être jugé à Pontoise ne sont pas isolés. La conscience sociale et les connaissances sur les conséquences dramatiques de la violence sur les enfants progressent. Il est urgent de légiférer pour progresser vers plus de clarté" a -t-il déclaré à Allodocteurs.fr.

Un âge-seuil du consentement recommandé à 13 ans et un interdit clair

La loi pourrait changer relativement. Le ministère de la Justice a annoncé le 12 février la création d'une mission pluridisciplinaire chargée de réfléchir au projet du gouvernement d'établir un âge minimal de consentement à un acte sexuel. En 2016, le Haut Conseil pour l’Egalité recommandait déjà dans son Avis pour une juste condamnation judiciaire et sociétale du viol et autres agressions sexuelles, l’instauration, dans le Code pénal, d’un seuil d’âge fixé à 13 ans, en dessous duquel toute pénétration sexuelle commise par un majeur sur un enfant doit être considérée comme un viol. "L’âge de 13 ans tient compte du besoin de développement de l’enfant et préserve la possibilité de relations sentimentales et parfois sexuelles entre de très jeunes majeurs et des enfants entrés dans l’adolescence. C’est aussi un âge qui est cohérent avec le choix des autres démocraties qui ont légiféré sur le sujet ", a justifié Edouard Durant. L'Espagne a par exemple choisi 12 ans, l'Angleterre 13 ans, la Belgique 14 ans, et le Danemark 15 ans.

Un projet de loi présenté le 7 mars prochain

Dès lors qu’un adulte aura une relation sexuelle avec un enfant de 13 ans et moins, la contrainte –qui est l’un des éléments qui définit le viol – résultera nécessairement de l’écart d’âge. Le viol serait donc constitué et il ne serait plus nécessaire d’apporter la preuve de la violence, la menace, la contrainte ou la surprise." La contrainte serait présumée sans qu’il soit possible d’apporter la preuve contraire", précise Edouard Durand. " C'est le comportement de l'agresseur qui sera observé, pas celui de la victime." 

Le but : poser un interdit clair, à destination des adultes d’avoir des relations sexuelles avec un enfant de moins de 13 ans et ce, quel que soit leur jugement sur la maturité physique et psychique de l’enfant. "Il est essentiel d’arriver à voir qu’un enfant de 10-12 ans ne peut pas se représenter les implications et le réel même de la relation sexuelle comme le fait un adulte. On ne pourra pas se représenter la scène sexuelle en se disant qu' il a perçu les enjeux de l’acte."

Un projet de loi sur l'âge du consentement sexuel doit être présenté en conseil des ministres le 7 mars prochain. En novembre dernier, le président Emmanuel Macron s’était prononcé à titre personnel pour l’âge de 15 ans.