Trisomie 21 : le parcours du combattant d'une mère pour scolariser sa fille

Retards administratifs, sentiment d’abandon des institutions… pour inscrire sa fille atteinte de trisomie 21 en maternelle, une mère s'est heurtée à une réalité des plus éprouvantes. Elle s’est exprimée dans un post Facebook.

Héloïse Rambert
Rédigé le , mis à jour le
Trisomie 21 : le parcours du combattant d'une mère pour scolariser sa fille
©Extralouise

Pour Caroline Boudet, maman de Louise, 3 ans, "trop c’est trop ". "J’avais vraiment l’intention de n’avoir ni à écrire, ni à publier ce post. Vraiment. Parce que tout devait se passer pour le mieux, et il n’y avait pas de raison que ça se passe autrement, n’est-ce pas ?", écrit-t-elle sur sa page Facebook et blog "ExtraLouise". Depuis la naissance de sa fille "avec deux bras, deux jambes, et un chromosome en plus", Caroline et son mari racontent sur cette page les progrès de Louise. Ses hauts, ses bas. Ils n'hésitent pas à y pousser des coups de gueules très remarqués. Le dernier concerne son entrée en maternelle.

 

Des mois de démarche ….

Alors que les autres parents s’occupent de la rentrée de leur enfant quelques semaines avant la date (pour les plus organisés), Caroline Boudet s’y est, elle, prise en novembre dernier. A ce jour, la situation administrative de sa fille n’est toujours pas réglée. "Je savais, pour avoir échangé avec les associations et les autres parents, que cela n’allait pas être facile. On avait prévu un vrai parcours du combattant, d’où le délai que nous avons pris", explique-t-elle. 

L’inscription à la maternelle n’a pas posé de problème en tant que telle. "Les enseignants et animateurs de vie périscolaire ont été de très bonne volonté ", admet la jeune femme. C'est du côté de la  Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH), l’administration qui décide des attributions d’aide humaine pour les personnes handicapées, que le bât blesse. Elle met plusieurs mois à traiter les dossiers.

Pour que Louise ait une rentrée sereine, les médecins et les autres professionnels qui la suivent ont demandé pour elle l'attribution d’une auxiliaire de vie scolaire (AVS) individualisée. Requête qui dépend de la MDPH. "Aux vues des effectifs -au moins 25  par classe en petite section-, c’est  une demande qui est justifiée, explique sa mère. Ma fille a besoin d’être assistée dans certains gestes de la vie quotidienne qu’elle ne peut pas fait toute seule, comme boutonner son manteau ou choisir un stylo. Et aussi dans les apprentissages. Elle met plus de temps que les autres enfants à comprendre les consignes, ou les choses doivent lui être reformulées."

… et une réponse inadaptée aux besoins de son enfant

La réponse obtenue de la MDPH, après des mois d’attente, a été très décevante et froide. "Nous avons reçu un courrier qui nous expliquait qu’on nous accordait une AVS mutualisée. Nous avons dû chercher ce que cela voulait dire", rapporte Caroline Boudet. En clair, l’AVS, répartie entre plusieurs enfants et peut-être plusieurs écoles, ne pourra pas être auprès de Louise plus de 2 heures par jour. "Pour elle s’est une perte de chance", se désole-t-elle. La pilule  est d’autant plus difficile à avaler pour elle et son mari que la réponse, en plus d’être peu claire pour les non-avertis, n’est pas motivée.  "On ne nous explique pas les choses. Cela frustre et cela rend fou", ajoute-t-elle. Caroline a fait appel de la décision et replongé dans la corvée administrative.  Elle a dû de nouveau "envoyer ce dossier, en plusieurs exemplaires, en courrier suivi, en recommandé. Et attendre qu’il soit réceptionné. Et appeler deux fois, trois fois, cinq fois, pour entendre en juin "Mais oui on l’a reçu le 14 mai, mais alors là, vraiment, on ne pourra pas l’examiner avant septembre"", écrit-elle sur sa page Facebook.

"un système où les droits des personnes ne sont pas respectés"

La jeune femme s’estime coincée "entre l’éducation nationale et la MDPH, soit deux administrations et même deux ministères différents qui ne communiquent pas." Elle s’apprête à passer un été bien moins serein que les autres. "Nous sommes début juillet et la plupart des familles préparent leurs vacances. Les familles d’enfants handicapés sont toutes en train d’attendre dans l’angoisse pour savoir si elles auront une AVS pour la rentrée et dans quelles conditions. " La dernière fois qu’elle a pu parler à une personne décisionnaire sur son dossier, celle-ci n’a rien pu lui dire sur l’organisation concrète de la présence de l’AVS auprès de Louise et sur le moment où elle pourrait lui en dire plus. 

La mère de famille, qui a aussi un fils, se dit épuisée. "Dans la pratique, c’est le parent qui est la cheville ouvrière du système. C’est lui qui fait la demande, qui attend, qui relance. C’est un vrai deuxième travail, en fait. " Elle se sent aussi très seule. "Je ne m’attendais pas à ce que l’on soit si peu soutenus et aidés. D’où ce grand sentiment de solitude. J’ai découvert un système où les droits des personnes ne sont pas respectés." Positive, Caroline Boudet estime que le regard que la société porte sur la trisomie 21 change. "Mais dans les institutions, ça ne change pas à la même vitesse."