Sexe et pouvoir : des liaisons nombreuses

Le pouvoir est-il l'aphrodisiaque le plus puissant ? On pourrait le croire si on liste les maîtresses des grands de ce monde ! Les hommes de pouvoir ont toujours été entourés d'une aura sulfureuse. Pourquoi le pouvoir attire-t-il les gens comme un aimant ?Qu'en est-il des femmes de pouvoir ? Plongée au cœur du pouvoir…

Dr Charlotte Tourmente
Dr Charlotte Tourmente
Rédigé le , mis à jour le
Sexe et pouvoir : des liaisons nombreuses

Les hommes d’Etat, ces chauds lapins

Nombreux sont les hommes d'Etat à avoir une sexualité plus intense que la moyenne. Les frasques de César régalaient déjà les Romains au 1er siècle après Jésus-Christ... Le Président Félix Faure est mort dans les bras de sa maîtresse. Bill Clinton a choqué les Américains avec la fellation de Monica Lewinski. Dominique Strauss-Kahn a fait la Une des magazines suite au scandale du Novotel en 2012. Les exemples sont légion ! 

Mais que suscite un tel engouement féminin ?

Apparemment pas leur physique, si on exclut les Kennedy, dotés d'un physique de jeunes premiers… Ainsi Mao aurait-il eu une haleine de chacal tandis que Henri IV sentait très mauvais et Henri Kissinger, politicien américain, arborait un nez proéminent, aux dimensions considérables. Leurs nombreuses maîtresses passaient au-delà, mais à quoi succombaient-elles donc ?

La politique est avant tout une histoire de séduction : pour gagner,  il convient de mettre son électorat dans sa poche. Le pouvoir se conquiert à force de conviction et de charme, de discours devant une foule à captiver. L'homme politique maîtrise les techniques de séduction et se nourrit de ses conquêtes.

Un très bon relationnel, de l'humour, de la répartie, une assurance peu commune sont des atouts précieux en politique, auxquels succombe aisément la gente féminine.

Attention, tous les politiciens ne sautent pas sur une proie, fort heureusement. Le général de Gaulle ne jura que par son épouse Yvonne. Jamais Bernard Tapie n'a fait parler de lui pour des histoires sexuelles, tout comme Raymond Barre et Edouard Balladur. Les exceptions existent (ou alors, diront les mauvaises langues, à défaut d'être fidèles, ils sont plus discrets !).

Un rapport domination-soumission

Les femmes seraient attirées par les mâles dominants qui transmettraient à leur progéniture un meilleur patrimoine génétique. La sexualité féminine est longtemps passée par la soumission, même elles sont de plus en plus nombreuses à développer des fantasmes de domination et à les pratiquer. Du fait de leur anatomie, l'homme pénètre quand la femme reçoit le pénis : un rapport dominant-dominée est en place et le lit est donc le lieu d'excellence où s'exerce le rapport de pouvoir et de domination-soumission. Un constat à modérer par les évolutions sociétales du 20ème et 21ème siècle.

Autre argument expliquant la domination masculine, on a longtemps associé à l'homme de pouvoir la force et l'argent. Partager son lit permettait d'absorber un peu de sa force et de s'en valoriser ; son argent assurait aussi un train de vie agréable. L'accès à l'emploi des femmes a modifié la donne, même si l'analyse persiste parfois.

La mère, ce premier amour

Pour expliquer l'attirance des hommes de pouvoir envers les femmes, certains évoquent également le rapport très fort qu'entretiennent bon nombre de politiciens avec leur mère, contrastant avec l'absence ou la dureté de leur père. John Fitzgerald Kennedy entretenait des relations passionnelles et chaotiques avec sa mère Rose et Louis XIV était très proche de Anne de Médicis. Inconsciemment, ils développeraient ainsi le besoin d'une femme dans leur entourage et en changeraient régulièrement, incapables de retrouver leur mère.

Pourquoi tant de libido ?

Si l'on en croit l'expérience de Napoléon, dont la libido suivit okl∂apparemment  b≈son ascension politique, plus les hommes ont du pouvoir, plus leurs besoins sont exacerbés. Plusieurs hypothèses sont avancées.

Les rapports sexuels seraient un moyen d'évacuer le stress et la pression. Le sexe est alors un exutoire de l'agressivité et de la tension, sans compter le bien-être qui succède à l'orgasme et qui s'explique notamment par les endorphines, sécrétées par le cerveau et qui sont les messagers chimiques du bien-être. Autre possibilité, enchaîner les conquêtes sexuelles serait un moyen de se rassurer sur leur capacité de séduction et parfois le temps qui passe et les outrages de l'âge.

Le besoin de dominer

Autre explication parfois avancée, pour expliquer l'appétit sexuel associé au pouvoir : le besoin de dominer et le sentiment de toute-puissance. De tout temps, le mâle a eu besoin de dominer ses congénères ; dans le monde animal, le mâle alpha régne sur la meute et les femelles n'échappaient pas à la règle. L'homme politique, au narcissisme vraisemblablement exacerbé, est peu habitué aux refus et à l'habitude de voir ses demandes exaucées sans discussion. Par ses collaborateurs comme par par ses partenaires ! Ce qui donne un sentiment de toute-puissance, et qui stimule aussi le système de la récompense dans le cerveau de la même façon ou presque que la jouissance sexuelle.

Quand le sexe flirte avec la perversion ou l'addiction

Un tel plaisir demande à être renouvelé sans cesse. Ce qui peut conduire à une désinhibition et à une escalade en terme de quantité d'activité mais aussi de pratiques sexuelles : toujours plus ! En cas d'addiction ou de perversion, il peut y avoir un danger pour les partenaires car il ne s'agit plus de simples besoins exacerbés par le pouvoir, mais d'une maladie touchant aussi bien les hommes de pouvoir que les autres. Et l'addiction et la perversion sont alors parfois associées à la violence. Ainsi Mussolini déclarait-il au siècle dernier que la foule, comme les femmes, était faite pour être violée...

Sexe et pouvoir, une liaison dangereuse ?

Il est effrayant de constater à quel point la sexualité fait perdre la raison. Dominique Strauss-Kahn a compromis son poste à la tête du FMI et vraisemblablement la présidence de la France, à laquelle il était destiné, à cause de son addiction sexuelle. Et il est loin d'êtrel le seul... Bill Clinton a été mis en difficulté par son égarement, aboutissant à une affaire nationnale, le Monicagate.

 

Alors peut-on faire confiance aux dirigeants à la libido exacerbée ?

 

 

Si on excuse avec indulgence les "écarts", on pardonne difficilement aux hommes de faire passer leur sexualité débridée avant les affaires de l'Etat. Qu'ils s'amusent, soit. Mais qu'ils négligent les concitoyens qui les ont élus et leur préfèrent la bagatelle, hors de question !

Louis XV, que le peuple adorait au début de son règne fut détesté lorsque l'on apprit que son penchant pour les jouvencelles le poussait à négliger son royaume...La France, moins puritaine que l'Amérique, regarde avec amusement et sans jugement la sexualité de ses présidents mais elle ne supporte pas l'impunité qui accompagne trop souvent le pouvoir.

JFK, un président à la sexualité frénétique…

Jeune, beau et séduisant, JFK avait tout pour lui. Idéaliste, il séduit les Américains grâce aux promesses de changement. Mais derrière le bronzage et le sourire, se cachaient d'intenses souffrances liées à une ostéoporose, mais également une sexualité compulsive. Marilyn Monroe, Gene Tierney, Marlene Dietrich ou encore Jayne Mansfield,… une maîtresse en suivait une autre, quand elles n'étaient pas cumulées.

Kennedy, également affecté par la maladie d'Addison (qui expliquait son teint), était sous un cocktail explosif de médicaments, composé de corticoïdes, d'amphétamines, d'hormones thyroïdiennes mais également d'opium. L'activité sexuelle était une thérapie à elle toute seule, grâce aux endorphines qu'elle produisait, des substances à la structure proche de la morphine.

Et les femmes de pouvoir ?

Le temps où Cléopâtre et Catherine de Russie multipliaient les amants et où Mata-Hari entrenait une aura sulfureuse semble bien loin... Aujourd'hui, les femmes de pouvoir font nettement moins parler d'elles que les hommes. Toutefois, une étude* de 2015 avait montré que les femmes comme les hommes de pouvoir, voyaient leur désir s'exacerber avec leurs fonctions, et leur confiance en leurs capacités de séduction augmenter.

A l'heure où les rapports entre hommes et femmes ont été modifiés par la révolution me  too, certains hommes peinent à trouver leur place vis-à-vis des femmes. Ils seraient impressionnés et déstabilisés par leur rôle plus dominant, qui a longtemps été l'apanage de la gent masculine. La volonté d'égalité des sexes a ses limites et peut perturber profondément les rapports dans le couple hétérosexuel, si dans son lit, un homme (ou une femme) veut faire l'amour avec une femme soumise. Même si bienheureseusement, la personnalité sexuelle n'est pas forcément calquée sur la personnalité sociale : une femme très dominante socialement peut être soumise dans un rapport (et vice-versa). Une étude de 2015 avait montré que les femmes de pouvoir avaient davantage de fantasmes sadiques, tandis que les hommes de pouvoir se stimulaient plus avec des fantasmes masochistes. Une autre étude** montrait que quelque soit le sexe, ils trompaient davantage que les personnes disposant de moins de responsabilités.

De plus, le syndrome de la maman et de la putain fait encore des ravages. Les homme qui enchaîne les histoires sexuelles est un grand séducteur, alors qu'une femme est qualifiée de traînée... Les mentalités évoluent lentement.

Des problématiques actuelles

La très réaliste série "Borgen" semble refléter les considérations actuelles : le mari de Birgitte Nyborg, Premier ministre du Danemark, finit par quitter sa femme en lui reprochant de gérer les affaires familiales comme celles du Danemark et de ne plus avoir de temps pour lui. Qu'il est difficile pour une femme de tout concilier : vie professionnelle, familiale, sociale... La charge mentale est probablement encore plus marquée chez les femmes de pouvoir.

Le pouvoir et ses nombreuses obligations conduiraient-ils les femmes à la chasteté ? Souhaitons-leur que les mentalités évoluent, à l'instar des gains au sein du couple. Car de plus en plus d'hommes acceptent de voir leurs femmes gagner plus qu'eux et s'occuper de régler la crèche ou les dépenses liées aux enfants, si certains postes traditionnellement masculins, comme les impôts ou le loyer, leur sont laissés. Tout est question de susceptibilités à ménager !

* Power Affects Sexual Assertiveness and Sexual Esteem Equally in Women and Men, publié dans Arch Sex Behav., 2018

** Power Increases Infidelity Among Men and Women, dans Psychological Science, 2011

***Power and Sadomasochism : Understanding the Antecedents of a Knotty Relationship in Social Psychological and Personality Science de 2015

En savoir plus

Ailleurs sur le web :

Livres :

  • Sexe et pouvoir
    "Les dessous de la vie des chefs"
    Dimitri Casali, Antoine Auger
    Ed. de La Martinière, septembre 2008

  • Sexe et pouvoir
    "Secrets d'alcove de César à DSK"
    Dimitri Casali, Sandrine Gallotta
    Ed. de La Martinière, juin 2012