Douleurs chroniques : quels recours lorsque les médicaments ne soulagent pas ?

Les douleurs chroniques sont souvent insuffisamment soulagées par les médicaments. Quelles nouvelles techniques peuvent soulager en cas de douleurs réfractaires ? Le point avec deux spécialistes.

Dr Charlotte Tourmente
Dr Charlotte Tourmente
Rédigé le , mis à jour le
Douleurs chroniques : quels recours lorsque les médicaments ne soulagent pas ?

Les spécialistes de la douleur mettent en garde sur les limites des médicaments dans les douleurs chroniques, leurs effets secondaires, les risques de dépendance dans certains cas. 

En parallèle, d'autres techniques se développent et sont destinées aux douleurs réfractaires au traitement médical bien conduit.

La neuromodulation a transformé la prise en charge des douleurs réfractaires aux traitements médicamenteux et elle utilise un courant électrique ou les ondes magnétiques pour réguler l'activité des neurones et par ce biais les messages douloureux. Plusieurs techniques existent.

La stimulation médullaire

"La stimulation médullaire consiste à placer une électrode en arrière de la moelle épinière, explique Marc Lévêque, neurochirurgien et spécialiste de la douleur. Elle est reliée à un boitier qui est réglé par le chirurgien en fonction des intensités et durée des stimulations voulues. L'électrode produit un courant électrique qui stimulera la sensibilité non douloureuse et prendra le pas sur la sensibilité douloureuse. L'intervention se fait sous anesthésie locale et comme la stimulation médullaire n'est pas efficace chez tous les patients, un test est effectué durant quelques jours : "il sera fait une semaine de test avec un boitier externe, avant de mettre le boitier définitif. Dans 80% des cas, le patient est soulagé et on internalise le boitier." 

"C'est indiqué pour toutes les douleurs neuropathiques, rebelles, depuis plus d'un an et qui ont un impact sur la qualité de vie, précise le neurochirurgien. Il y a très peu d'effets secondaires mais il existe un risque d'infection." 

La principale limite de cette intervention réside dans son accessibilité puisqu'il faut des chirurgiens formés à la technique : "Le problème des gestes chirurgicaux est qu'ils ne sont disponibles que dans certains centres", reconnait le Dr Lévêque. Le même principe peut être effectué en bas de la colonne vertébral, dans une affection rare, le syndrome douloureux régionnal.

La TENS ou neurostimulation externe cutanée

La neurostimulation électrique transcutanée, ou TENS en anglais, est beaucouop plus accessible à tout le monde. ELle est assurée par des électrodes que l'on colle sur la peau durant ½ heure ou davantage. 

Elles sont reliées à un petit appareil qui génère un courant électrique. Selon les réglages choisis, elle va être efficace sur des douleurs liées à des lombalgies, d'arthrose, de séquelle de fracture, ou les douleurs d'origine neurologique comme les névralgies ou l'algie faciale. 

En fonction des réglages, la TENS stimuler la sensibilité non douloureuse, elle peut aussi stimuler la production d'endorphines, des antidouleurs naturels. 

"C'est une action en surface et moins puissante que la stimulation médullaire. Chez ceux qui répondent bien à la TENS, on peut pérenniser les effets ainsi avec une stimulation.  C'est en cours d'évaluation pour les douleurs lombaires." 

La stimulation magnétique transcranienne répétitive ou rTMS

D'autres procédés de neuromodulation non invasive, sans avoir recours à la chirurgie, sont étudiés. Le Dr Bouhassira, spécialiste de la douleur, a participé à l'une des études sur la stimulation magnétique transcrânienne répétitive (SMTr). 

Une bobine est placée sur la tête du patient et envoie un champ magnétique sur une région du crâne, ce qui va induire un courant électrique local et modifier l'activité des neurones sous-jacents. La séance dure une quinzaine de minutes et elle est répétée en cure de plusieurs mois. 

"Nous continuons à utiliser la stimulations magnétiques (rTMS), avec succès en routine depuis maintenant plus de 4 ans, explique le Dr Bouhassira. Nous avons maintenant terminé une très grosse étude de recherche, qui sera bientôt publiée. Elle tend à confirmer les résultats très bénéfiques sur les douleurs neuropathiques, avec des  effets prolongés qu’il est possible de maintenir dans le temps avec des stimulations mensuelles." 

La stimulation magnétique transcrânienne permettrait dans certains cas de réduire les doses de médicaments contre les douleurs.

"En ce qui concerne les autres techniques de neuromodulation, nous utilisons de plus en plus les stimulations non invasives du nerf vagal, par voie auriculaire avec un stimulateur similaire à celui utilisé pour les TENS, ajoute le Dr Bouhassira. C'est intéressant notamment pour les céphalées et les douleurs abdominales." 

Les techniques d'action locale

En dehors de la neuromodulation, il existe des traitements locaux à appliquer localement sur la zone douloureuse. Les patches d'un piment, la capsaïcine, sont collés sur la région douloureuse durant une heure, à l'hôpital. Ce piment détruit un récepteur impliqué dans la douleur, avec un effet qui dure 3 mois le temps que le récepteur se régenère. 

"C'est douloureux car cela provoque des brûlures mais il y a une efficacité", confirme Marc Lévêque. 

Les injections de toxine botulique dans la zone douloureuse sont actuellement à l'étude, notamment pour les névralgies faciales et du trijumeau.

"On fait un nappage sur toute la zone douloureuse, explicite le spécialiste. Il faut refaire des injections régulièrement car l'action dure quelques mois et l'indication est la douleur neuropathique (NDLR d'origine neurologique), à condition qu'elle soit superficielle. "

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