Protéger les enfants des risques d'Internet

Internet et les réseaux sociaux sont des outils formidables et incontournables quand ils sont bien utilisés. Mais ils exposent également nos enfants à des risques graves, comme la divulgation de leurs photos, le harcèlement ou un contact avec un prédateur sexuel. Comment les protéger et leur apprendre la prudence ?

Dr Charlotte Tourmente
Dr Charlotte Tourmente
Rédigé le , mis à jour le
Protéger les enfants des risques d'Internet

Les risques des réseaux sociaux

Les enfants sont de plus en plus connectés : d'après une étude[1] Ipsos réalisée en 2015, les enfants de 3 à 6 ans, utiliseraient Internet 3 heures 40  par semaine, ceux de 7 à 12 ans 5 heures 30, les 13-19 ans y consacrant13 heures 30.

Facebook, Snapchat, Youtube, Instagram, Tumblr, ces sites sont très fréquentés par les ados et les enfants. Ils font courir des risques inédits : exposition à des images choquantes, divulgations d'informations personnelles, dépense involontaire d'argent… "Mais ce qui nous inquiète le plus sont les risques de harcèlement entre enfants et de mise en contact avec des personnes mal intentionnées", commente l'adjudant-chef Violaine Chabardes, commandant la Brigade de prévention de la délinquance juvénile de Lyon et auteur d'une intervention sur ce thème lors des 4èmes Assises des violences sexuelles début janvier. "Elles créent facilement des liens pour avoir des photos suggestives, voire un contact physique avec les enfants."

Le harcèlement prend des formes variées, allant des insultes à l'incitation à jouer à des jeux dangereux, ou à la réalisation de défis périlleux (comme la necknomination, un jeu poussant à la consommation d'alcool). Les provocations répétées et les chantages aboutissent parfois à une issue dramatique, poussant au suicide les jeunes fragilisés.

Plutôt que d'interdire (en vain) les réseaux sociaux, il vaut mieux apprendre aux plus jeunes à les utiliser à bon escient et à se protéger. Et ce dès l'âge de 8-9 ans : "On aborde dès le CM1 des actions de prévention, car c'est là où ils sont le plus vulnérables, à la pré-adolescence, évalue Violaine Chabardes. Mais beaucoup d'adolescents sont aussi naïfs et tombent dans le piège, donc à tout âge les risques sont réels !" Une notion que beaucoup de parents ignorent, pensant leur enfant en sécurité dans leur chambre…


[1] Etude Ipsos Junior Connect 2015 (diapositive 13) http://www.blogdumoderateur.com/etude-ipsos-junior-connect-2015/

Le dialogue et des mesures simples au cœur de la prévention

Or le danger existe dès que les enfants surfent sur internet, notamment lorsque le contrôle parental n'est pas mis. Cette première mesure est incontournable : créer des sessions personnalisées sur ordinateur permet d'activer un logiciel de contrôle parental sur la session des enfants uniquement.

L'étape suivante consiste à dialoguer et prévenir les enfants des risques encourus afin de les responsabiliser. Les enfants doivent prendre conscience de la notion de vie publique et vie privée sur le net. "Il ne faut pas donner d'indications personnelles ou privées sur Internet", explique Violaine Chabardes. "Il ne faut pas mettre des photos de soi sans l'autorisation de ses parents, ni poster de photo d'un camarade sans son autorisation. Beaucoup d'enfants donnent dans leur pseudo leur nom et prénom avec l'âge, comme petiteemilie8ans, ce qui attire les prédateurs."

À partir du moment où des données personnelles sont publiées, elles peuvent être détournées à mauvais escient – un risque qui échappe souvent aux ados insouciants. Les prédateurs sexuels savent pertinemment trouver leurs victimes en se cachant sous des pseudos anodins et des approches insidieuses sur les messageries instantanées. "Il faut expliquer aux enfants que l'interlocuteur n'est pas forcément quelqu'un de leur âge," recommande l'adjudant-chef. "C'est notamment le cas dans les jeux en réseau, où il ne faut pas accepter n'importe qui, uniquement les enfants que l'on connaît physiquement."

D'après l'ONU, plus de 750 000[2] prédateurs sont présents sur Internet et cherchent à entrer en contact avec les enfants. Plus d'un sur deux aurait été abordé par un inconnu en ligne, d'après l'association e-enfance. "Concrètement, beaucoup d'enfants nous disent être contactés sur les réseaux sociaux et les jeux en ligne", s'alarme-t-elle. "Alors ceux qui sont prévenus n'acceptent pas leur demande mais d'autres acceptent très facilement des inconnus comme amis, avec ce challenge d'avoir le plus d'amis possibles !" Il est donc primordial de leur apprendre la méfiance…

Avec les adolescents, qui prennent souvent pour argent comptant ce qu'ils lisent sur Internet, il est important d'aborder la notion de la fiabilité des contenus et de leur vérification : "ils doivent apprendre à croiser les informations, à utiliser leur esprit critique", détaille V. Chabardes. "De plus, il faut faire attention à ne pas relayer de rumeurs pouvant nuire à un camarade et à ne pas relayer des insultes ou provocation suicides."

Certains sont plus sensibles à la pression d'autres adolescents, les poussant à publier des photos dénudées, à relever certains défis dangereux par exemple. Pour les aider à résister à la pression de leurs pairs, il n'y a rien de mieux que le dialogue, d'après Violaine Chabardes. "C'est là où on amplifie son sens critique et on lui apprend à avoir un certain recul sur les situations. Si on le sent vulnérable, il faut passer du temps avec lui, aller sur les sites avec lui et essayer de lui montrer comment croiser les sources notamment."

Autres conseils : renforcer leur estime de soi (un ado qui a une bonne estime de lui sera plus capable d'assumer ses décisions) ; leur apprendre à repérer et éviter les situations où ils se retrouveront contraints d'adopter un comportement inacceptable ; le National Mental Health Information Center – centre national d'information sur la santé mentale – recommande même les jeux de rôle, pour que l'enfant puisse répéter ce qu'il dira en cas de proposition de tabac, de drogue ou d'alcool, et s'affirmer davantage.

A l'instar de la question "Comment s'est passée ta journée ?", discuter avec son enfant de ses moments de surf sur Internet permet de créer le dialogue. "Et si l'ado rechigne, on peut lui dire que l'on n'a pas réussi à faire ça et créer ainsi une communication sur un sujet qui les concerne et les intéresse", propose la spécialiste.


[2] Chiffre issu d'un rapport de l'ONU datant de 2009, mentionné dans un article d'Europe 1

Et si l'adolescent n'écoute pas les recommandations ?

Le conseil de Violaine Chabardes est simple : "il ne faut pas fermer la porte et dire à son enfant : si tu es confronté à un problème, tu sais que tu peux m'en parler ou en parler à un autre adulte." L'enfant ou adolescent ne doit pas rester seul avec son souci et doit pouvoir demander de l'aide avec un adulte référent. La policière recommande également de le rassurer en lui expliquant que se faire embobiner arrive également à des adultes, encore faut-il avoir la possibilité de s'en sortir et d'en parler...

 

Quelques conseils pratiques

Les parents maîtrisent souvent moins bien Internet que leur progéniture et ne savent pas forcément que les sites de réseaux sociaux proposent de paramétrer les outils de confidentialité. Pour Facebook, il suffit d'aller dans l'onglet Paramètres, puis Confidentialité et de restreindre l'accès des publications sur le journal. Il est également possible de consulter tous les contenus où l'on apparaît, ce qui permet de vérifier qu'ils ne portent pas préjudice. Sur Youtube, le mode restreint (tout en bas de la page d'accueil) permet de masquer les contenus inappropriés.

Sur Instagram, l'onglet Confidentialité se trouve en bas de la page (puis allez dans Politique de confidentialité, puis Gestion de votre compte, puis Paramètres et informations de confidentialité). 

Snapchat permet de modifier les personnes autorisées à contacter l'utilisateur et à voir ce qu'il publie.

Les conseils de la CNIL pour un usage d'internet plus sûr

La Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés a proposé quelques règles à soumettre à l'enfant utilisant Internet.

  • réfléchir avant de publier.
  • donner le minimum d'informations personnelles
  • ne pas publier de photos gênantes
  • sécuriser les profils
  • faire attention à ses mots de passe
  • vérifier ses traces
  • respecter les autres
  • utiliser un pseudonyme

Pour en savoir plus, ces trois sites sont intéressants :

  • L'association e-enfance donne de judicieux conseils aux enfants âgés de 7 à 12 ans, aux ados et aux parents, pour permettre une utilisation d'Internet avec le plus de sécurité possible.
  • Le Ministère de l'Education nationale prodigue également quelques recommandations pour protéger les mineurs sur Internet. 
  • Le site Internet-signalement propose une brochure Internet sans crainte pour les parents

 

Le signalement en ligne

En cas d'exposition à des contenus ou images illicites (à caractère pornographique par exemple), le site du Ministère de l'intérieur propose un outil très efficace sur Internet-signalement.

Si les données personnelles de votre enfant sont utilisées pour le harceler, vous pouvez adresser une plainte sur le site de la CNIL :

Enfin, tous les sites comme Facebook, proposent une possibilité de signalement.