Comment fonctionne le cœur artificiel Carmat ?

Il y a 10 ans avait lieu à l’hôpital Georges Pompidou une première mondiale : le cœur artificiel Carmat était implanté sur un homme. Mais comment fonctionne ce cœur qui suscite encore aujourd'hui tant d’espoirs ?

Anne-Laure Jean
Rédigé le
Le coeur artificiel, une prouesse française
Le coeur artificiel, une prouesse française  —  Le Mag de la Santé - France 5

Il est le cœur de demain. Cette prothèse dernière génération, le cœur artificiel Carmat, permet de prolonger la survie des malades souffrant d’insuffisance cardiaque terminale et qui attendent désespérément une greffe de cœur.

Une prothèse qui bat comme un cœur sain

C’est dans cette usine aux airs de laboratoire qu’est fabriqué le cœur artificiel Carmat. "On va rentrer dans la salle blanche. Il faut s'équiper puisqu'on est dans une atmosphère contrôlée, à la fois en termes de température, d'hygrométrie et d'empoussièrement", explique Alexandre Eléonore, directeur industriel de Carmat.

Ce cœur artificiel total est le fruit de 30 années de recherches. À l’origine : une alliance de médecins et d’ingénieurs aéronautiques, dirigée par un Français, le Pr Alain Carpentier. Son obsession : construire une prothèse qui bat comme un cœur sain.

Tissu animal, téflon, silicone...

L’une de ses spécificités, est d’être en partie constituée de tissu animal, par exemple un péricarde de veau. Il s'agit d'une membrane biocompatible qui limite le risque de rejet. "La membrane est souple, extrêmement fragile" décrit Alexandre Eléonore. "Si vous le touchez avec des gants trop rugueux vous créez des élaminations qui rendent le péricarde non utilisable", poursuit Alexandre Eléonore.

Associer cette enveloppe fragile à des matériaux aussi différents que le téflon, le silicone ou le polyuréthane, reste une opération délicate. "C'est le processus qui a mis le plus de temps à être mis au point. Quand je suis arrivé dans la société, on était à peu près à 80 % de pièces rejetées. Aujourd'hui, on est environ à 20 %, et on arrive même à faire des pièces bonnes du premier coup, sans aucune retouche. On progresse, on avance", se réjouit Alexandre ELéonore.

Trois mois pour assembler un coeur

Aujourd’hui, il faut trois mois pour assembler les 200 pièces de cette prothèse. Et le procédé est loin d’être robotisé. "Ce genre d'opération est entièrement manuelle, on fait toute la découpe manuellement. Aujourd'hui, on n'a aucune autre manière de le faire parce que les formes sont spécifiques, parce que les matériaux sont spécifiques, parce qu'il faut absolument qu'il n'y ait pas de rayures, sinon ça pourrait faire des zones de rétention pour le sang. Donc tout ça doit être fait de manière très, très délicate", confie Alexandre Eléonore.

Des capteurs pour s'adapter à l'activité physique

10 ans après la première implantation, le cœur artificiel a peu évolué technologiquement. La partie haute de la prothèse est en contact avec le sang. La partie inférieure, quant à elle, contient l’électronique."Une électronique qui est en 3D, elle vient épouser la forme du cœur. C'est dans la carte qu'il y a les fameux capteurs qui vont nous permettre de nous adapter en permanence à l'activité du patient. C'est cette capacité à évidemment fournir un peu plus de sang au moment où la personne en a besoin. C'est pour ça qu'on a des patients qui font du vélo, par exemple", précise Alexandre Eléonore.

Aujourd’hui, deux cœurs artificiels sortent chaque semaine de cette usine. En 2024, grâce à l’extension du site de production, Carmat espère multiplier ce chiffre par cinq, et élargir les indications à d’autres patients.