Le père des bébés-bulles accusé de prise illégale d'intérêt
Le 26 avril 2013, un article du Figaro révèle une instruction à l'encontre de Claude Griscelli pour "prise illégale d'intérêt", initiée par le parquet de Paris. En 2004, bien qu'il fut membre du Conseil d'Etat, le scientifique aurait accepté de réaliser pour les laboratoires pharmaceutiques Servier et Wyeth des missions rémunérées. Portrait d'une icône de la médecine et de la recherche, aujourd'hui dans la tourmente de l'affaire du Mediator.
Le professeur Claude Griscelli est une figure emblématique de la pédiatrie et de la recherche française. Etudiant en médecine pédiatrique au milieu des années soixante, il s'oriente rapidement vers la recherche, travaillant en collaboration avec des grands noms de l'immunologie tels que Seligmann ou Benacerraf. En 1968, Claude Griscelli crée au sein de l'hôpital Necker son propre laboratoire de recherche sur les déficits immunitaires d’origine héréditaire, qui sera rapidement rattaché à l'Inserm.
Au début des années 70, Griscelli et son équipe cherchent à identifier et décrire les anomalies immunitaires d'enfants atteints, de manière chronique, de maladies infectieuses de toutes natures. Leurs travaux permettront de révéler les mécanismes physiologiques inhérents au développement de plusieurs maladies infantiles. L'observation, en 1971, d'une enfant aux cheveux gris présentant des lésions sur le visage conduira à l'identification d'une maladie jusqu'alors inconnue, le "déficit immunitaire et albinisme partiel" (maladie de Griscelli).
Le père des "enfants bulles"
Inspiré par l'observation d'élevages de souris immunodéprimées dans des cages étanches, il conçoit un prototype de table d'opération stérile, dans laquelle le patient est protégé de tout contact avec l'extérieur. C'est au travers d'une de ces bulles que le scientifique réussit en 1975 la première greffe de moelle osseuse sur un enfant. Les premières couveuses stériles seront également développées sur ce modèle.
Au milieu des années 80, Griscelli et ses collaborateurs découvriront l'existence d'une forme de déficit immunitaire dans lequel les globules blancs, bien que présents, ne sont pas fonctionnels (ils ne produisent pas d'anticorps), et découvrent certains des mécanismes génétiques à l'origine de cette maladie.
Griscelli décrira également le premier cas de syndrome d'immunodéficience acquise chez l'enfant, et identifiera plusieurs mécanismes expliquant la transmission du HIV de la mère à l'enfant.
Renommée scientifique et implication politique
En 1989, Claude Griscelli fonde la Fondation des Hôpitaux de Paris, et est nommé l'année suivante président du Conseil scientifique de l'AP-HP (Assistance Publique et Hôpitaux de Paris).
De 1993 à 1995, le scientifique occupe un poste de conseiller technique au ministère de la Recherche et de l'Enseignement supérieur. En 1995, il est élu conseiller de Paris, puis nommé adjoint au maire, chargé de la santé. Cette année est également celle de sa distinction au grade de Commandeur de la Légion d'honneur.
Il devient directeur général de l'Inserm en 1996, pour une durée de cinq ans. A l'issue de son mandat à la tête de l'institution scientifique, il devient commandeur dans l'Ordre national du mérite. Claude Griscelli rejoindra ensuite le Conseil d'Etat, pour une durée de quatre ans, en tant que responsable du pôle "affaires hospitalo-universitaire et recherche médicale" auprès du ministre de la Santé.
En septembre 2011, un article du Figaro, basé sur la transcription d'écoutes téléphoniques, accuse Claude Griscelli d'avoir fait modifier un rapport du Sénat afin de disculper les laboratoires Servier dans le dossier du Médiator.
Pour en savoir plus :
- Le Figaro.fr
- "Le Pr Griscelli, star de la pédiatrie mis en cause pour trafic d'influence", par Anne Jouan, 26 avril 2013.