Alzheimer : pourra-t-on détecter la maladie grâce à une prise de sang ?

La maladie d'Alzheimer se diagnostique aujourd'hui grâce aux symptômes, à l'IRM et à la ponction lombaire. Rendre ce diagnostic plus accessible, grâce à des marqueurs sanguins, est un enjeu considérable pour les malades.

Dr Charlotte Tourmente
Dr Charlotte Tourmente
Rédigé le , mis à jour le
Alzheimer : pourra-t-on détecter la maladie grâce à une prise de sang ?
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Diagnostiquer et prédire l'évolution de la maladie d'Alzheimer grâce à une prise de sang ? C'est ce qu'espèrent beaucoup de chercheurs. "Aujourd'hui, nous avons des outils indirects, comme la ponction lombaire qui permet d'avoir des dosages de marqueurs de la maladie d'Alzheimer comme l'amyloïde, la protéine tau et tau phosphorylé", constate le Pr Sarazin, neurologue. "Mais sa limite est d'être invasive, d'où l'intérêt des marqueurs sanguins". Parmi eux : les protéines amyloïdes à laquelle se consacre une étude française qui s'appuie sur la cohorte Balthazar.

Vers une prise de sang comme outil de diagnostic ?

Cette  étude menée par le Pr Hanon, gériatre, porte sur les marqueurs sanguins et le risque de maladie d'Alzheimer. Les patients qui ont participé à cette recherche étaient atteints de troubles cognitifs légers, autrement dit des troubles de la mémoire modérés, mais sans diagnostic de démence. 

"L'objectif était de déterminer si les marqueurs que nous dosions dans le sang (la protéine amyloïde, le Aβ1-42 et le Aβ1-40), prédisaient le risque de démence avec les mêmes résultats que la ponction lombaire" précise le Pr Hanon. "On sait déjà que 10 % des patients atteints de troubles cognitifs légers par an peuvent voir ces troubles s'aggraver, et développer une maladie d'Alzheimer. Nous avons donc suivi ces patients durant trois ans".

Des résultats inattendus

Sur les 485 patients étudiés, un peu plus de 30% ont évolué vers une démence dans les trois ans.

"Finalement, et c'est cela la recherche, nous n'avons pas trouvé ce que nous nous attendions à trouver" s'exclame le Pr Hanon. "Nous n'avons pas découvert un marqueur sanguin de la maladie d'Alzheimer, car ce n'est pas suffisamment fiable ni aussi bon qu'avec la ponction lombaire. Par contre, nous avons découvert que les patients ayant les taux les plus élevés de marqueurs avaient très peu de risque de développer une maladie d'Alzheimer. C'était donc protecteur."

Cette découverte n'est pas négligeable. "C'est aussi un gros progrès d'identifier les gens qui ont peu de risque", confirme le Pr Hanon. "D'autres équipes ayant travaillé sur la cohorte britannique de patients, baptisée Framinghamont reproduit les mêmes résultats. Ce n'est qu'un premier résultat de recherche et ces dosages ne sont pas encore remboursés par la CPAM (Caisse primaire d'assurance maladie, ndlr). Mais il est possible, s'il est confirmé par d'autres travaux, que ce soit un élément rassurant pour les patients et les familles."       

La recherche progresse mais la prise en charge stagne

"L'enjeu des marqueurs sanguins est très important et la France est intégrée dans cette recherche", reprend le Pr Sarazin. "Mais dans les maladies neurodégénératives, c'est fondamental de diagnostiquer la cause de la mort du neurone, avec des marqueurs spécifiques. Celui qui semble très prometteur est la protéine tau et tau phosphorylé, des marqueurs sanguins très intéressants. Pour le moment, cela reste de la recherche."

Justement, l'équipe française poursuit ses efforts dans cette direction : "Nous continuons nos recherches en dosant la protéine tau", précise le Pr Hanon qui annonce que des résultats seront publiés prochainement.

Le Pr Sarazin insiste enfin sur la nécessité de la prise en charge pour les patients : "Il y a des traitements symptomatiques certes modestes. Ils ne sont plus remboursés en France, contrairement aux autres pays européens, et alors même qu'une étude anglaise montrait qu'ils réduisent les coûts en évitant les complications ! Mais même sans médicaments, les patients et les familles doivent savoir qu'il y a une prise en charge avec les « consultations Mémoire »". Ces consultations, prescrites par le médecin traitant, sont dédiées aux troubles de la mémoire. Elles peuvent avoir lieu à l'hôpital ou auprès de médecins spécialistes certifiés.