Pilule : des accidents sous-déclarés ?

Au terme d'une consultation de quatorze années d'archives, un hôpital français universitaire anonyme révèle des dysfonctionnements importants dans son processus de déclaration des accidents associés à la prise de médicaments. L'étude, transmise ce week-end à l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM), porte plus spécifiquement sur le cas des accidents cardio-vasculaires associés à la prise d'une pilule contraceptive : sur 47, dont deux suivis un décès, seuls trois cas ayant été signalés aux autorités.

Florian Gouthière
Rédigé le , mis à jour le

Entretien avec Claude Rambaud, présidente du Collectif interassociatif sur la santé (CISS)

Selon les données consultées par des journalistes de l'AFP et du journal Le Figaro, les 47 cas couvrent une large gamme de pathologies : embolie pulmonaire, thrombose veineuse profonde ou accident vasculaire cérébral. Les données sont issues des dossiers médicaux de femmes âgées de 15 à 25 ans, et seraient à rapporter à un échantillon de 800.000 patients ayant consulté le CHU de 1998 à 2012.

L'ANSM déclare procéder à l'analyse des données brutes, qui confirment selon elle l'existence d'une "très importante sous notification" des effets secondaires graves des médicaments.

La pharmacovigilance en question

Selon les chiffres publiés début janvier 2013 par l'ANSM, les déclarations effectives d'accidents thromboemboliques veineux associés aux pilules se dénombrent à 567 depuis 1985, seuls 13 décès étant comptabilisés. L'ANSM précise que 262 cas signalés concernent les pilules de seconde génération, 244 étant associés à celles de troisième génération, progressivement apparues sur le marché durant les années 1990.

Peu de déclarations sur les effets indésirables des médicaments sont rédigés par les médecins, soulignait la revue médicale indépendante Prescrire, dans son édition du 2 janvier 2013, soulignant là aussi une faille du système de pharmacovigilance. La notification des effets secondaires doit être encouragée auprès des soignants et des patients, préconisait-elle.

Car dans un souci de prévention, les professionnels de santé ont le devoir de remplir cette déclaration. Une obligation peu respectée pour plusieurs raisons selon Claude Rambaud, présidente du Collectif Interassociatif Sur la Santé (CISS) : "d’abord il faut que les médecins fassent le lien entre le médicament et l’événement qui survient. Ensuite, les médecins craignent qu’on les accuse de mal avoir utilisé un médicament ou de ne pas avoir fait d’examens cliniques suffisants avant sa prescription. Le système de déclaration est, comme son nom l’indique, déclaratif, c’est donc à la bonne volonté du déclarant."

Face à ce manquement, les patients ont un rôle à jouer selon Claude Rambaud : " l’une des voies pour améliorer la déclaration des effets indésirables est d’impliquer davantage les patients, de les inciter à les déclarer spontanément. "

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