Dans les airs, suspendus au bout d'une corde, les cordistes ont choisi un métier à risque

Suspendus dans les airs au bout d’une corde, sur des façades d’immeubles, ou de monuments historiques... les cordistes interviennent dans des zones difficiles d’accès, pour réaliser des travaux en hauteur. 

Lucile Degoud
Rédigé le , mis à jour le

La cathédrale de Troyes, édifice haut de 62 mètres, est l’un des plus beaux monuments historiques de France. Cette belle et flamboyante vieille dame de 800 ans a besoin d’une nouvelle jeunesse, elle va donc être restaurée.

La sécurité, seul mot d'ordre

Le programme pour Franck et Benoît, deux grimpeurs prêts à gravir le beffroi, est la réparation des abats-son, les lames qui permettent de conduire le son des cloches vers le sol. Ils sont équipés de la tête aux pieds et travaillent sur 2 cordes, une corde de progression et une corde de sécurité sur laquelle ils sont reliés avec un système auto-bloquant. Ainsi s'ils ont un souci avec une corde, il leur reste une corde de sécurité pour se rattraper.

Benoît, cordiste depuis 4 ans, réalise un travail de maçonnerie, suspendu dans les airs, à 40 mètres de hauteur : "Dans le métier de cordiste, ce côté vertical est ce qu’on recherche, ce qu’on aime, c'est presque une passion. Il y a aussi le côté sportif, c’est un métier dans lequel on doit avoir une bonne condition physique et être exigeant avec soi-même. Notre métier, est la sécurité avant tout, on doit être rigoureux avec soi-même et les collègues, on ne peut pas parler de peur mais rester conscient du milieu dans lequel on travaille".

Les risques de ce métier

Pour assurer leur sécurité, les cordistes travaillent toujours en binôme. Si un de leur collègue se blesse sur une corde, ils doivent être en mesure d'aller le chercher rapidement, le binôme est le maître-mot. Tout est une question d'entraide, d'auto-contrôle et de secours.

Cordiste depuis 25 ans, Franck aime transmettre son expérience aux plus jeunes, qui sont nombreux à être attirés par ce métier à sensations fortes : "Ça sort un petit peu du bâtiment traditionnel... Ça a un petit côté fun. On a eu la chance de travailler sur le Panthéon, sur Notre Dame... Ce sont des sites magnifiques... De mon bureau, j'ai une très belle vue". 

La carte postale ne doit pas faire oublier les risques liés au travail sur ce type de bâtisses. Il y a des risques liés à la grande hauteur, au chaud, au froid, aux matériaux qui sont polluants pour certains comme le plomb. 

A ces risques s’ajoutent ceux spécifiques au métier de cordiste, comme les blessures articulaires, ligamentaires, et musculaires. Les tendinites ou troubles musculo-squelettiques touchent également les épaules, particulièrement sollicitées et sont des pathologies très récurrentes. 

Le syndrome du harnais

Les cordistes peuvent être victimes de malaise entraînant la mort, comme les spéléologues et les alpinistes, en suspension. Le traumatisme de suspension ou syndrome du harnais, est un état de choc consécutif à une suspension immobile passive. Cette suspension inerte et prolongée nécessite une prise en charge adaptée sachant que la perte de conscience est un facteur aggravant.

"Il y a tout un mécanisme physio-pathologique qui intervient si on n'agit pas vite, il peut avoir un arrêt cardio-respiratoire. Les pieds sont dans le vide, il n'y a pas de retour veineux donc il y aura une baisse d'arrivée de sang dans le coeur et le coeur va réagir en essayant de pomper le plus rapidement possible. Il y a un risque d'hypertension et le coeur va s'arrêter, il faut intervenir dans les 3 minutes." explique le Dr Simla Chutturdharry médecin du travail à l'Association Paritaire de Santé au Travail

Ces travailleurs de l’extrême doivent donc être suivis régulièrement par la médecine du travail. La France compte 8 500 cordistes et selon une association, 21 sont morts depuis 2006, dans des accidents du travail.