Mediator : les laboratoires Servier accusés de tromperie

Les laboratoires Servier et l’Agence du médicament de l’époque sont accusés de blessures et homicides involontaires. Mais les laboratoires Servier sont aussi accusés de tromperie. Ils ont été questionnés sur cette question ces derniers jours. 

La rédaction d'Allo Docteurs
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  • Comment le laboratoire a-t-il répondu devant le tribunal ? 

Il a répondu par la voix d’Emmanuel Canet, qui est un des vice-présidents actuels du Groupe. Il a commencé par rappeler que pendant la période concernée par l’affaire du Mediator, toutes les décisions étaient prises par Jacques Servier, décédé en 2014. Puis les questions ont donc porté sur la façon dont les laboratoires Servier se seraient ou non rendus coupables de tromperie quant à la nature du Mediator et les risques que ce médicament pouvait entraîner. Des risques, on le rappelle, de développer une maladie mortelle des vaisseaux pulmonaires, une hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). Certains patients ont souffert d’une dégradation des valves cardiaques qui pouvait exiger leur remplacement.  

  • Selon l’instruction, le laboratoire aurait dissimulé ces risques qu’il connaissait  ?  

Exactement… Une accusation explorée à travers des heures de débat sur la nature chimique de la molécule du Mediator. Et plus précisément sa proximité avec deux autres médicaments du laboratoire, le Pondéral et l’Isoméride. Ces médicaments étaient des coupe-faim. Pendant la « conception » du Mediator à la fin des années 60, le laboratoire espérait qu’il remplacerait le « vieux » Pondéral. Mr Canet l’a reconnu. La molécule chimique mise au point devait être un coupe-faim, un « anorexigène ». Mais après des essais encourageants chez l’animal et même chez l’homme, Mr Canet a expliqué que les résultats furent finalement décevants dans ce domaine. Donc ils ont demandé une Autorisation de mise sur le marché, AMM, pour deux indications plus « convaincantes » selon eux, dans le traitement du cholestérol et du diabète pour faire simple.  

  • Pourquoi cette surveillance n’a pas permis d’identifier les dangers du Mediator avant son retrait en 2009 ?  

C’est une autre partie essentielle des débats. Et c’est une des raisons pour lesquelles l’Agence du Médicament est aussi sur le banc des accusés. Du coup, les échanges ont été vifs hier autour de cette question cruciale : le laboratoire a-t-il vraiment donné aux autorités sanitaires toutes les informations dont il disposait à l’époque pour cerner le risque ? M. Canet répond que oui. Les avocats de l’Agence du Médicament le contestent. Et sur l’absence de réaction du laboratoire au fil de l’apparition des premiers cas dès 1999, d’alerte des médecins par exemple, M. Canet répond, je cite qu’il « n’y a pas eu une volonté de dissimuler quoi que ce soit ni de tromper qui que ce soit ». Selon lui, l’Agence non plus n’a pas jugé nécessaire de s’inquiéter davantage à l’époque. Il s’agissait donc, je cite encore, d’une « mauvaise appréciation du risque de notre part et de la part de l’agence qui avait les mêmes informations que nous ».