Histoire de la médecine : l'invention du stéthoscope

C'est probablement l'instrument médical le moins impressionnant qui soit, pourtant, en permettant d'écouter ce qui se passe à l'intérieur du corps, le stéthoscope a révolutionné le diagnostic. Ce stéthoscope a une histoire incroyable. On la doit à la curiosité d'un médecin du XIXe siècle : le Dr Laennec.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Le stéthoscope est l'outil indispensable à l'auscultation. Un objet familier, presque banal. Pourtant, derrière l'invention du stéthoscope se cache une histoire méconnue, un véritable conte. L'histoire d'une rencontre fortuite entre deux enfants et un médecin un peu austère.

Laennec, inventeur du stéthoscope

À Paris en 1816, le docteur René-Théophile Laennec est préoccupé. De quoi souffre donc la jeune patiente, dont il n'arrive pas à saisir les symptômes ? "Il essaie d'écouter son coeur. Elle a plusieurs épaisseurs et il n'entend rien. Pourtant, il voudrait entendre son coeur car il est certain qu’elle a une maladie du coeur", raconte le Pr Jean-Noël Fabiani, professeur d'histoire de la médecine à l'Université Paris Descartes.

Difficile à l'époque d'oser déshabiller les patients pour les ausculter. Alors pour poser un diagnostic, il reste des gestes limités. On palpe le thorax, on le percute, on place la tête et l'oreille sur la poitrine… mais ces gestes ne sont pas très précis. Et la précision, c'est justement ce que recherche le Dr Laennec. Le jeune médecin de 36 ans est méthodique et intransigeant.

Comment mieux entendre le coeur de cette patiente ? Pour Laennec, cette question tourne à l'obsession. Jusqu'à ce jour de septembre 1816. Au détour d'une ruelle parisienne, la providence lui sourit : "Il voit des enfants jouer de part et d'autre d'une poutre. L'un qui gratte d'un côté et l'autre qui met son oreille de l'autre", explique le Pr Patrick Berche, directeur de l'Institut Pasteur de Lille. Une technique qui leur permettait d'entendre un son particulier, très amplifié.

Le Dr Laennec a alors un éclair de génie. Avec le même principe, ne pourrait-on pas entendre, amplifiés, les bruits du cœur et des poumons ? Laennec court chez sa patiente. Il prend quelques pages, les tourne ensemble pour en faire un cornet qu'il pose ensuite sur la poitrine de sa patiente. Il entend alors ses battements cardiaques.

Un outil de diagnostic devenu incontournable

Le phénomène acoustique est là. Il suffit alors au Dr Laennec d'en améliorer le procédé. Le rouleau de papier devient un instrument en bois démontable. Il apprend ensuite à écouter. Chef de service à l'hôpital Necker, il passe ses journées au chevet de ses patients, armé de son stéthoscope.

À quelle maladie correspond chacun des bruits entendus ? À une époque où l'on n'avait ni radio, ni échographie, il n'existait qu'une façon d'y répondre : attendre la mort des patients. "Au moment où le patient décédait, on allait en salle d’autopsie pour noter tous les signes que l'on pouvait observer sur les organes du malade", note le Dr Fabiani. Pour chaque patient décédé, le Dr Laennec relie les sons entendus aux constatations de l'autopsie. Il fait en quelque sorte parler le cœur et les poumons malades. C'est le début de la médecine moderne.

Grâce à son stéthoscope, Laennec révolutionne le diagnostic des maladies cardiaques et pulmonaires. Insatiable, travailleur acharné, il se lance dans une œuvre folle : recenser l'ensemble des pathologies du coeur et des poumons. Ce travail lui permet de publier un manuel de l'auscultation de 900 pages.

L'oeuvre de Laennec connaît un retentissement immédiat dans le monde entier. Le médecin poursuit une carrière prestigieuse jusqu'à son décès suite à une maladie pulmonaire. Mais malgré une carrière éphémère, René-Théophile Laennec laisse derrière lui un instrument devenu l'emblème même du métier de médecin.