Qui sont ces mères infanticides ?

Les mères néonaticides (infanticide d'un nouveau-né) apparaissent souvent immatures, effacées et dépendantes et ont souvent essuyé des ratages dans leur passé, selon l'étude d'une pédiatre, directrice de recherche de l'Inserm, Anne Tursz.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Qui sont ces mères infanticides ?

Cette étude sur le thème plus général de "La maltraitance : une pathologie largement sous-estimée en France", réalisée à partir des données recueillies entre 1996 et 2000 auprès des hôpitaux et tribunaux de trois régions, s'est notamment penchée sur les expertises psychiatriques de seize mères néonaticides (on parle de néonaticide si les nouveaux-nés sont tués dans la journée qui suit leur naissance).

Elles révèlent des "résultats étonnamment convergents, conduisant à dresser un véritable profil psychologique de ces femmes", selon Anne Tursz.

"Dans leur passé, on ne note pas d'événements violents mais plutôt des ratages (échecs répétés à des examens par exemple). Elles ne paraissent pas avoir une image solide d'elles-mêmes et sont décrites comme immatures, effacées, très préoccupées de satisfaire les autres et dépendantes, soit de leur mère, soit de leur mari ou compagnon par qui elles craignent d'être abandonnées", souligne l'étude.

Ces femmes présentent "d'évidentes carences affectives mais pas de troubles mentaux caractérisés".

Les grossesses ont toujours été cachées à l'entourage mais les femmes en ont assumé la responsabilité : "on n'a relevé aucun cas de véritable déni de grossesse, tel qu'il est usuellement défini (non prise de conscience de l'état d'être enceinte)" mais plutôt des "stratégies d'auto-protection ("j'essayais de ne pas y penser")".

La contraception étant la grande absente des dossiers, Anne Tursz estime que dans ces cas, le néonaticide leur "apparaît comme la seule solution face à une grossesse non désirée" et "une forme de régulation des naissances".

L'étude est à paraître à partir du 2 août 2010 sur le blog de la revue "Contact Santé" du Nord Pas-de-Calais à paraître en septembre 2010. Anne Tursz est auteur de l'ouvrage intitulé Les oubliés - Enfants maltraités en France et par la France, paru aux Editions Le Seuil.

Le drame de Villers-au-Tertre (Nord)

Cette étude intervient après la découverte de huit corps de nouveau-nés près de Douai. Il s'agit de la plus grave affaire d'infanticide en France. Dominique Cottrez, une aide-soignante de 45 ans, mère de deux filles aujourd'hui âgées d'une vingtaine d'années, a été mise en examen pour le meutre de ses huit enfants jeudi 29 juillet 2010, après avoir reconnu les faits.

Selon les spécialistes, lors d'un déni de grossesse, la femme, enceinte physiquement, ne l'est pas dans sa tête. Cette "pathologie grave" peut constituer une circonstance atténuante à l'infanticide.

Maître Berton, avocat de Mme Cottrez, est soutenu sur ce point par l'avocat du père des enfants, Maître Pierre-Marie Gribouva, selon qui la mère n'était peut être pas complètement responsable de ses actes. "De par le nombre d'enfants retrouvés, nous sommes dans la logique d'un déni de grossesse ou de graves problèmes d'ordre psychologique ou psychiatrique", a-t-il estimé.

L'argument du déni avait cependant été écarté par le procureur de Douai Eric Vaillant, qui avait souligné que Mme Cottrez "se rendait parfaitement compte de ses grossesses".

Maître Berton a appelé "à la plus grande prudence sur cette affaire hors norme". Déni de grossesse ou grossesse cachée : les mots auront leur importance pour l'issue judiciaire de cette affaire.

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