Alzheimer : une perte d'autonomie inéluctable ?

On a diagnostiqué un Alzheimer à ma mère. Combien de temps pourra-t-elle vivre seule ?

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le

Les réponses avec le Dr Christophe Trivalle, gériatre, et avec le Dr Philippe Denormandie, chirurgien orthopédiste :

"Le délai entre le diagnostic de la maladie d'Alzheimer et la perte d'indépendance et d'autonomie d'un malade est variable. Tout dépend du moment où l'on fait le diagnostic, si le diagnostic est très précoce ou s'il est tardif. Pour le moment, on voit encore des diagnostics assez tardifs où la maladie est déjà très évoluée. Quand la personne rentre dans la salle de consultation, on fait le diagnostic en deux minutes. C'est donc beaucoup trop tard. L'espérance de vie des malades d'Alzheimer est la même que celles des personnes qui ne sont pas Alzheimer. Il y a eu de gros progrès. Ensuite, il y a tellement de sortes de maladie d'Alzheimer, chaque cas est particulier et l'évolution est très différente d'un malade à l'autre parce qu'il y a des malades qui gardent leur autonomie, en tout cas leur autonomie de la marche, assez longtemps. Ce sont notamment des malades qui déambulent, qui marchent sans arrêt. Ces personnes gardent une certaine autonomie, très longtemps, alors que d'autres vont perdre leur autonomie et vont se retrouver en fauteuil."

"C'est toujours le sujet de savoir quelles capacités on perd, et quelles capacités on garde. Chez les patients Alzheimer, comme les personnes âgées avec d'autres types de pathologies, les tableaux sont très variés. Il est important d'avoir une prise en charge très individuelle. On garde très longtemps une autonomie pour faire un certain nombre de choses. Le vrai sujet, c'est de respecter ces autonomies qui permettent de continuer à faire des choses et de se dire qu'il y en a d'autres sur lesquelles on doit avoir des compensations. Le drame, ce serait d'avoir une approche trop rapide en disant on a une perte d'autonomie dans sa façon globale et à ce moment-là, on a tendance à faire à la place des gens. Or, on sait qu'une des rentrées les plus rapides dans la dépendance, c'est de faire à la place des gens.

"Dans ce domaine, la France n'est pas le pays le plus exceptionnel. Il y a eu des rapports, notamment le rapport Aquino, qui montrent tous les éléments qu'il faut suivre pour maintenir au maximum le fait que des personnes peuvent encore faire des choses. Plus on continue à faire des choses, plus on retarde la vision de la perte d'autonomie globale. Il y a donc un regard de la personne et un regard de l'environnement à la fois familial et professionnel.

"Il faut voir à quel moment on change le fait de dire qu'il est plus important de faire faire que de faire à la place. Il est plus important d'aller jusqu'au bout de l'aménagement du chez soi plutôt que de dire qu'on va placer la personne dans une organisation. Il faut avoir une réflexion de l'autonomie et de la capacité. Et ensuite on adapte. En France, on a beaucoup d'aides humaines et peu d'aides techniques, environnementales alors que dans d'autres pays, on a beaucoup plus d'aides techniques et environnementales que d'aides humaines. Le leitmotiv c'est de continuer à faire en sorte que les personnes, si elles le souhaitent, se fassent plaisir et à partir du moment où on se fait plaisir, il faut voir comment on peut aider la personne à continuer à faire des choses. On travaille beaucoup dans ce domaine dans les établissements notamment en Allemagne. Il est très intéressant de voir la vision des Allemands du respect des capacités. C'est vraiment un leitmotiv."