Eczéma : le staphylocoque doré impliqué dans le déclenchement de la maladie ?

Une importante colonisation de la peau par le staphylocoque doré pourrait être un facteur déclencheur de l'eczéma, selon une étude publiée dans le British Journal of Dermatology ce lundi 25 juillet 2016.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Eczéma : le staphylocoque doré impliqué dans le déclenchement de la maladie ? - Crédit photo : NIAID via Visualhunt / CC BY
Eczéma : le staphylocoque doré impliqué dans le déclenchement de la maladie ? - Crédit photo : NIAID via Visualhunt / CC BY

Démangeaisons, sécheresse cutanée, plaques rouges. Les signes de l'eczéma sont connus, mais l'origine exacte de cette maladie chronique et inflammatoire n'a pas encore été totalement élucidée, même si des facteurs allergiques sont habituellement retrouvés.

La piste bactérienne comme facteur déclenchant de la maladie est exploré par une nouvelle étude publiée dans le British Journal of Dermatology. Le Département de dermatologie du centre médical universitaire Erasmus de Rotterdam a effectué un examen systématique de 95 études d'observation réalisées auprès de 9.000 patients. Les auteurs signalent que seule une étude rassemble les critères de qualité nécessaires à la fiabilité des résultats.

Les patients atteints d'eczéma sont près de 70% à présenter des lésions cutanées contaminées par le staphylocoque doré (staphylococcus aureus ou S. aureus, y compris le SARM) et 39% d'entre eux étaient porteur du S. aureus sur la peau saine.

La proportion observée est presque vingt fois supérieure comparativement aux témoins en bonne santé. La présence de staphylococcus aureus est d'autant plus élevée chez les patients qui souffrent des formes plus sévères de la maladie.

"Cette analyse vient montrer l'importance de la colonisation par le S. aureus comme facteur de risque dans la pathogenèse de la dermatite atopique", souligne Suzanne Pasmans, professeur en dermatologie pédiatrique auprès du centre médical universitaire Erasmus et auteure principale de l'article. D'autres études plus étendues sont cependant nécessaires pour confirmer cette hypothèse.

Une toxine à l'origine d'une réponse immunitaire excessive

En outre, la peau de 80% des patients atteints d'eczéma était porteuse d'une souche particulière de S. aureus qui produit une toxine. Cette toxine serait capable d'induire une réponse excessive des cellules immunitaires au niveau de la peau.

Elle provoquerait la libération d'histamine par les mastocytes (cellules de l'immunité) qui joue un rôle important dans les réactions allergiques. La toxine libérée par S.aureus pourrait donc constituer, un facteur déclencheur des poussées d'eczéma.

À l'heure actuelle, l'eczéma est surtout traité avec des corticostéroïdes ou des antibiotiques en cas d'infection. Ces médicaments peuvent entraîner des effets secondaires et perdre de leur efficacité à long terme.

Les antibiotiques ne ciblent pas uniquement les bactéries pathogènes. Ils tuent aussi les "bonnes" bactéries nécessaires à l'équilibre de la peau. De plus, ces micro-organismes peuvent devenir résistants aux antibiotiques. L'administration à long terme de ces deux types de médicaments est donc déconseillée.

"Des études sur le traitement antistaphylococcique ciblé de la peau sont nécessaires pour comprendre la contribution exacte du S. aureus", explique Suzanne Pasmans.

Micreos, une société de biotechnologie néerlandaise qui a contribué au financement de l'étude, a mis au point un nouveau médicament le Staphefekt™. Il s'agit d'une une enzyme (ou endolysine) qui détruit les bactéries. Elle ne s'attaque qu'aux souches de S. aureus et serait même efficace contre le SARM (Staphylocoque aureus et résistant à la méthicilline).

Le mode d'action des endolysines n'a aucun rapport avec celui des antibiotiques de sorte que même les bactéries résistantes comme le SARM sont susceptibles d'être éliminées. Contrairement aux antibiotiques, aucune résistance bactérienne au Staphefekt n'a été constatée ni anticipée. Étant donné qu'il épargne les bonnes bactéries, ce traitement semble en théorie convenir à un usage quotidien à long terme mais il doit être testé sur l'homme.

"Nous venons d'inscrire des patients dans un essai prospectif, randomisé, contrôlé par placebo sur l'utilisation de Gladskin. Cette étude nous renseignera sur les effets de l'élimination ciblée du S. aureus sur le microbiome cutané global et les symptômes cliniques de l'eczéma", a rajouté la professeure Pasmans.

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Source : Totté, J.E.E., van der Feltz, W.T., Hennekam, M, et al. (2016) « Prevalence and odds of staphylococcus aureus carriage in atopic dermatitis: A systematic review and meta-analysis » (Prévalence et probabilité de la présence du staphylocoque doré dans la dermatite atopique : examen systématique et méta-analyse), British Journal of Dermatology. doi: 10.1111/bjd.14566.

Crédit photo : Methicillin-Resistant Staphylococcus aureus (MRSA) Bacteria - NIAID via Visualhunt / CC BY