Vers une analyse au cas par cas des métiers interdits aux diabétiques ?

L’Assemblée examine aujourd’hui un projet de loi visant à ouvrir au cas par cas le marché du travail aux diabétiques. Jusqu'à présent de nombreuses professions leur sont toujours interdites malgré les progrès de la médecine.

Laurène Levy
Rédigé le , mis à jour le
Vers une analyse au cas par cas des métiers interdits aux diabétiques ?
Crédits Photos : ©Pixabay / peter-facebook

Pompier, policier, pilote d’avion, militaire, contrôleur, hôtesse de l’air, steward, conducteur de train… Tous ces métiers ont une caractéristique en commun : ils sont actuellement interdits à toutes les personnes diabétiques. Mais un projet de loi est débattu ce 30 janvier à l’Assemblée nationale pour ouvrir le marché du travail aux diabétiques. Car malgré les progrès de la médecine, ce sont toujours 300.000 Français et Françaises qui se voient refuser l’accès à ces professions.

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Des décrets vieux de plus de 50 ans

A l’origine de ces limitations, un vieux texte de loi rédigé il y a plus de 40 ans "avec des décrets qui datent pour certains de plus de 50 ans", raconte Jean-François Thébaut, vice-président de la Fédération Française des Diabétiques (FFD), en charge du plaidoyer et des affaires externes. "A cette époque, les diabétiques sous insuline pouvaient être exposés à des incidents d’hypo ou d’hyperglycémie mal gérés, peu prévisibles, avec dans un certain nombre de cas une mise en danger d’eux-mêmes ou de la vie d’autrui"justifie-t-il.

Une immense majorité de diabétiques "quasiment autonomes"

Mais aujourd’hui, ces mesures sont obsolètes car "la gestion du diabète sous insuline a fait d’énormes progrès à la fois sur les médicaments, le mode de dispensation par pompe à insuline et la surveillance en continue par dispositif sous-cutané" témoigne Jean-François Thébaut. C’est donc "l’immense majorité des patients de type 1 ou 2" qui est désormais "quasiment autonomes" pour gérer leur diabète. A cela s’ajoutent les techniques de télétransmission et la facilité de contact avec les diabétologues "qui rendent parfaitement possible une gestion à distance de la maladie", ajoute le vice-président de la Fédération.
L’interdiction n’est donc, selon la FFD, plus justifiée et aboutit souvent à des situations insensées : "On connaît par exemple le cas d’un gendarme motard qui a été mis au placard du jour au lendemain quand il est devenu diabétique : il n’a plus eu le droit de conduire, de porter une arme et de sortir de la caserne" confie Jean-François Thébaut. "Ce qui était absurde puisqu’une fois sa journée terminée, il avait tout à fait le droit de conduire sa voiture personnelle."

Examen au cas par cas et contrôle annuel

Du côté de la loi, la demande de la FFD est "raisonnable" : "on ne demande pas que tous les diabétiques de type 1 puissent avoir automatiquement accès à tous les métiers", tempère Jean-François Thébaut. En pratique, la demande porte plutôt sur un examen au cas par cas pour connaître l’équilibre du patient "avec un contrôle annuel pour éviter la mise en danger de l’individu et de la vie d’autrui" précise-t-il.

Fait notable, ces examen ne seraient pas réalisés par la médecine du travail seule mais nécessiterait l’avis d’un diabétologue, professionnel "le plus à même de juger de l’équilibre de son patient" poursuit le vice-président.

Le diabète, terrain d’expérimentation du projet ?

Ce projet figure parmi les combats de la FFD depuis une dizaine d’années déjà. Sa mise en application "prendra du temps car de nombreux métiers et de nombreux interlocuteurs sont concernés" reconnaît Jean-François Thébaut. L’ouverture du marché du travail à d’autres patients, comme ceux souffrant de pathologies cardiaques, doit également être discutée devant l’Assemblée nationale et la FFD s’est d’ores et déjà prononcée "pour que le diabète puisse servir de terrain d’expérimentation dans cette discussion".

Le projet de loi a déjà été adopté à l’unanimité en Commission des Affaires Sociales le 22 janvier dernier. "J’espère que ce sera à nouveau le cas aujourd’hui à l’Assemblée nationale", avance Jean-François Thébaut. Mais même si l’issue du vote est favorable, il faudra attendre que le Sénat examine à son tour ce projet et le renvoie enfin à l’Assemblée.