Les corticoïdes ont-ils un effet sur le cerveau ?

D'après une étude récente, les corticoïdes modifient la structure et le volume du cerveau. Cette découverte pourrait expliquer certains effets secondaires.

Dr Charlotte Tourmente
Dr Charlotte Tourmente
Rédigé le
Les corticoïdes modifient la structure et le volume du cerveau,
Les corticoïdes modifient la structure et le volume du cerveau,  —  Shutterstock

Les corticoïdes sont des anti-inflammatoires utilisés dans de nombreuses maladies inflammatoires, pulmonaires, articulaires, dermatologiques, neurologiques, etc. Ils peuvent être inhalés, injectés ou sous forme de comprimés.

Une étude publiée dans le British Medical Journal en septembre montre une association entre la prise de corticoïdes, inhalés ou par voie systémique (comprimés et injections), et une modification du volume et de la structure du cerveau.  

À lire aussi : Covid : les corticostéroïdes efficaces pour les cas graves

Le volume et la structure du cerveau modifiés

Les chercheurs ont étudié une cohorte de patients issus d'une banque de données de santé britannique. Ils ont exclu les personnes avec des antécédents neurologiques, psychiatriques, endocriniens et sous psychotropes. Ces facteurs peuvent éventuellement être responsables d'une modification cérébrale.   

Conclusion : chez les patients sous corticoïdes, le volume du cerveau ainsi que la quantité de substance blanche étaient diminués.

Il faut savoir qu'il existe 2 types de substances dans le cerveau : une substance grise et une substance blanche. La grise est composée des corps cellulaires des neurones, avec le matériel génétique. La substance blanche contient majoritairement des axones permettant les échanges d'informations entre les cellules nerveuses.   

D'après les auteurs, la diminution du volume cérébral et de substance blanche pourrait expliquer les effets secondaires neurologiques et psychiatriques des corticoïdes. Ces effets se manifestent par une dépression, une excitation, un épuisement ou encore des troubles de l'humeur et cognitifs.    

Des résultats connus et non prouvés

"Ce sont des données connues depuis 70 ans, les corticostéroïdes (NDLR : nom médical des corticoïdes) ayant été découverts dans les années 40 ", modère le Pr Chast, pharmacien et toxicologue. "Mais cette étude, de mon point de vue, soulève un certain nombre de questions. Tout d'abord, les auteurs n'affirment pas que les corticostéroïdes sont à l’origine des modifications observées. Ils évoquent simplement une possible causalité." En d'autres termes, le rôle des corticoïdes est loin d'être prouvé, ils sont simplement sur la liste des causes possibles.  

Autre argument très rassurant pour les patients, une diminution du volume du cerveau n'est pas synonyme de baisse de performances. "La capacité d'un cerveau ne se mesure pas à son volume ni à sa substance blanche ", estime le Pr Chast. "La preuve, les femmes ont 18 % de moins de substance blanche que les hommes et leurs performances cognitives ne sont pas inférieures !"   

 Un troisième élément dans l'étude modère également l'impact des corticoïdes.   

"L'étude évoque davantage de troubles psychiatriques et comportementaux, comme la dépression, l'anxiété ou l'épuisement, chez les patients sous corticostéroïdes" reprend le Pr Chast. "Or les maladies pour lesquelles les corticoïdes sont utilisées sont de nature à provoquer ces troubles (...)".  

Avant d’imputer les modifications anatomiques du cerveau aux corticostéroïdes, il faudrait d'abord évaluer l’impact de la maladie sur le cerveau. Enfin, dernier biais de l'étude, la durée des traitements par corticoïdes et leur posologie n’ont pas pu être pris en compte.      

Le manque de disponibilité des corticoïdes serait tel que la plupart des pharmacies n'en auraient plus dans les tiroirs.
Le manque de disponibilité des corticoïdes serait tel que la plupart des pharmacies n'en auraient plus dans les tiroirs.  —  Le Mag de la Santé