Covid : des enfants prématurés privés de leurs parents

Depuis le début de la crise sanitaire, certains hôpitaux limitent la présence des parents aux côtés de leur enfant prématuré. Des mesures restrictives, qui pèsent sur la santé des parents et des enfants.

Myriam Attia
Myriam Attia
Rédigé le , mis à jour le
Covid : des enfants prématurés privés de leurs parents

“C’est avec vive émotion et le coeur plein de larmes que je vous adresse ce courrier. Depuis 66 jours maintenant, je me rends dans vos locaux le coeur serré et la gorge nouée pour retrouver mon enfant.”  

Ce sont les mots d'une mère adressés au directeur de l’hôpital où se trouve son nouveau-né. Dans son long courrier, elle dénonce un protocole sanitaire difficilement supportable pour de jeunes parents. “Vous avez pris la décision d'appliquer des mesures de restrictions (...) Je me retrouve à devoir demander l'autorisation de voir mon enfant. Je me retrouve à devoir établir un planning avec les parents du bébé qui partage le même box que le nôtre.”

Visites courtes et parents seuls

“Certains établissements interdisent l’accès aux deux parents en même temps”, déplore Charlotte Bouvard, fondatrice et présidente de SOS Préma, une association qui a pour but d’améliorer la prise en charge de la prématurité en France et en Europe. Elle a reçu de nombreux témoignages de parents impuissants. Mises en place lors du premier confinement, au printemps dernier, ces mesures restrictives ont continué d'être appliquées dans certains hôpitaux sans parfois avoir été remises en question.

Les parents regrettent aussi les visites écourtées, limitées parfois à 4 heures par jour. En temps normal, ils sont libres de passer autant de temps qu'ils le souhaitent auprès de leur enfant.

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Des mesures contradictoires

Des mesures d'autant plus difficiles à comprendre qu'elles ne suivent aucune recommandation officielle. Bien au contraire. Le ministère de la Santé et la Société française de néonatalogie se sont en effet exprimés en faveur d’une “présence continue et sans condition des parents” de nouveaux nés hospitalisés. 

Une contradiction que souligne la jeune mère dans sa lettre au directeur de l'hôpital : “J'ai cherché des recommandations nationales allant dans votre sens mais à ma grande surprise je n'ai rien trouvé pouvant justifier vos choix, bien au contraire.”

Un manque d’attachement

En plus d’être difficile à vivre pour le parent, cet éloignement prive l’enfant de ses premiers contacts avec sa famille. Or, “le nouveau né a besoin de cette présence. Le peau à peau avec les parents favorise le développement de l’enfant. ”, affirme Charlotte Bouvard, fondatrice et présidente de SOS Préma. 

“C’est dans les première semaines que les parents tissent un lien avec l’enfant”, explique Jean-François Magny, chef du service réanimation néonatale à l'hôpital Necker (Paris).“On ne sait pas encore quelles seront toutes les conséquences de ces restrictions mais ce qui est sûr c’est qu’on a déjà observé des problèmes d’attachement chez les nouveaux-nés isolés, et chez leurs parents.”

La détresse des parents

Un détachement dont témoigne Julie, une jeune mère qui a accouché prématurément au début du mois de mars 2020. A cause du confinement, elle s’est retrouvée isolée avec son nouveau-né pendant 48 jours dans une chambre d’hôpital. Son mari n’a pu voir son enfant qu’à la fin de l’hospitalisation. “J’ai eu l’impression de lui donner l’enfant d’un autre. Aujourd’hui encore il a du mal à être seul avec notre fils.” 

Qu’en sera-t-il pour le nouveau confinement ? Jean-François Magny se veut rassurant. Pour lui, les hôpitaux ont pris en compte les erreurs du premier confinement et sauront faire preuve de plus de souplesse. “Nous avons décidé d’autoriser les visites à deux pour les enfants en chambre seule. Pour les chambres à plusieurs il faudra continuer les créneaux de visite.”

En revanche, le reste de la famille ne pourra toujours pas se rendre au chevet de l’enfant. Et en cas de symptômes covid, les parents devront effectuer un test PCR avant de retrouver leur nouveaux-né.