Sida : avancée vers la compréhension de la résistance spontanée

Certaines personnes infectées par le VIH résistent naturellement à la propagation du virus dans le sang pendant plus de dix ans, même en l'absence de traitement. Ce mécanisme est rendu possible par l'action de cellules de l'immunité qui présentent des spécificités particulières chez ces individus, selon une étude publiée dans la revue PLOS One en juillet 2014.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Sida : avancée vers la compréhension de la résistance spontanée

Une équipe de recherche a mis en lumière une particularité dans le système immunitaire des personnes dites "contrôleurs de VIH", capables de contrôler spontanément l'infection. Ces personnes ne développent pas le sida (entre 0,5% et 1% des séropositifs) et maintiennent la charge virale dans le sang à un niveau très faible pendant plusieurs années, même en l'absence de traitement.

Des lymphocytes peu ordinaires

De précédentes études ont montré le rôle d'une catégorie de cellules de l'immunité, les lymphocytes T CD8. Chez les "contrôleurs de VIH", ces lymphocytes sont préservés et éliminent très efficacement les cellules infectées, contribuant ainsi à limiter la propagation du virus. Un phénomène qui ne se produit pas chez la plupart des personnes infectées.

Pour cette étude, les scientifiques ont donc cherché à comprendre ce qui confère aux lymphocytes des "contrôleurs de VIH" cette capacité. Ils ont comparé les lymphocytes T CD8 de patients "contrôleurs" et de patients traités par trithérapie.

Les chercheurs ont ainsi observé chez les patients "contrôleurs", la présence de lymphocytes T CD8 possédant sur leur membrane des marqueurs HLA-DR mais pas de marqueurs CD38, habituellement présents sur les lymphocytes des personnes séropositives qui présentent ces deux types de marqueurs.

La clé : une activation modérée

Les marqueurs jouent un rôle extrêmement important dans l'immunité puisque c'est grâce à eux que les lymphocytes s'activent, prolifèrent et se mettent à détruire les cellules infectées. Ceci se passe lorsqu'une partie du virus (l'antigène), est mis en contact avec le marqueur. Le lymphocyte qui était jusqu'alors "endormi" se "réveille" et passe à l'attaque.

C'est justement sur ce phénomène d'activation que se sont concentrés les chercheurs. Chez les personnes infectées par le virus, cette activation est très forte, mais elle ne permet pas d'éliminer le virus. Les scientifiques ont constaté que l'activation des lymphocytes des "contrôleurs" était quant à elle modérée, ce qui ne les empêchait pas d'être plus efficace pour survivre, se multiplier et tuer les cellules infectées.

La nouvelle étape consistait donc à mettre en évidence les mécanismes impliqués dans cette réponse modérée.

Exposition à une faible dose d'antigènes

Les chercheurs se sont aperçus que la prolifération des lymphocytes "contrôleurs" est associée à une faible dose d'antigènes. Alors qu'une forte dose d'antigènes est associée à la prolifération de lymphocytes portant les deux types de marqueurs, qui sont rapidement dépassés par l'infection.

Voilà une nouvelle découverte qui amène une nouvelle question. Pourquoi les contrôleurs sont-ils d'emblée exposés à une faible dose virale, leur permettant de produire ces lymphocytes originaux ?

Selon les chercheurs, plus de la moitié des "contrôleurs de VIH" possèdent dans leur génome une variante d'un gène leur permettant de détecter la présence du virus à des doses plus faibles que les autres individus. "Cela pourrait expliquer le déclenchement d'une meilleure réponse et le contrôle de la charge virale sur la durée", explique Alain Venet, l'auteur principal de l'étude.

"C'est une toute petite avancée pour la recherche sur le sida", estime avec modestie le scientifique. Pas à pas, les chercheurs y voient plus clair. Mais avant de complètement cerner le phénomène de la résistance naturelle au virus du sida, ils devront avancer encore.

Source : Potential Role for HIV-Specific CD38−/HLA-DR+ CD8+ T Cells in Viral Suppression and Cytotoxicity in HIV Controllers. Alain Venet et al. jullet 2014. Plos one. Doi : 10.1371/journal.pone.0101920

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