Ménopause : aucun impact sur la sexualité !

C'est une idée reçue qui vole en éclat : les changements biologiques et hormonaux qui accompagnent la ménopause n'auraient absolument aucun effet sur les comportements sexuels, la libido ou le plaisir des femmes. En réalité, la seule chose qui puisse influencer négativement leur sexualité est... la croyance en cette idée reçue.

Florian Gouthière
Rédigé le , mis à jour le
Ménopause : aucun impact sur la sexualité !
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Selon plusieurs études réalisées en Europe et aux Etats-Unis, une majorité de femmes continuent d'avoir une vie sexuelle active passé l'âge de 50 ans. Cependant, l'âge de la ménopause est parfois imaginé comme un "cap" hormonal, au-delà duquel les différents aspects de la sexualité peuvent être dégradés. Mais qu'en est-il réellement ?

En 2006, des chercheurs de l''Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et l'Institut National d'Etudes démographiques (INED) ont initié une importante étude destinée à faire le point sur l'état des pratiques et des représentations des Français en matière de sexualité. La collecte des données avait pour but premier une meilleure orientation des politiques de prévention des risques associés à la sexualité - principalement, la transmission des différents types d’infections.

La très grande richesse des données collectées a permis aux initiateurs de l'enquête d'élargir le champ de leurs préoccupations. Ainsi, dans une étude à paraître le mois prochain dans the Journal of Sexual Medicine, les chercheurs se sont penchés sur l'influence de la ménopause sur différents aspects de la vie sexuelle des femmes. La conclusion est nette et sans appel : les pratiques sexuelles, la satisfaction, les fonctions biologiques, les fantasmes, les représentations en terme de sexualité sont significativement les mêmes chez les Françaises de plus de 45 ans non ménopausées et celles de moins de 55 ans ayant cessé d'ovuler. L'influence d'un éventuel traitement hormonal pour les femmes récemment ménopausées s'est elle aussi révélée négative.

L'analyse révèle précisément la très grande uniformité des pratiques sexuelles des 632 femmes âgées de 45 à 55 ans, ayant accepté de compléter le questionnaire préparé par l'Inserm et l'Ined. Qu'il s'agisse des femmes ménopausées, ménopausées avec ou sans traitement, la proportion de personnes ayant eu au moins un partenaire sexuel dans l'année précédant l'enquête est identique. Par suite, une proportion constante rapporte la pratique de la pénétration vaginale (95%), anale (12%), du cunnilingus (71%) ou de la fellation (65%).

Les auteurs notent toutefois que les rapports sexuels sans pénétration sont un peu plus fréquents chez les femmes ménopausées sans traitement hormonal (34%) que chez les femmes non ménopausées (28%). Seule autre différence : la masturbation, pratiquée par 23% des femmes avant la ménopause, contre 13% après.

Si le mode de collecte de données (questionnaire rempli sur la base du volontariat) est susceptible d'introduire un biais quant à la proportion réelle de femmes ayant une vie sexuelle active, un fait reste incontestable : chez les femmes de 45 à 55 ans ayant, précisément, une vie sexuelle active, les chercheurs n'ont pu déceler aucune variation de la satisfaction sexuelle, ni même d'accroissement des "difficultés sexuelles". Au cours de l'année précédant l'étude, 60% des femmes avaient rencontré "des troubles du désir ou de l'excitation, […] indépendamment de leur statut hormonal".

Au vu de ces données, l'effet négatif de la ménopause dans la vie sexuelle de certaines femmes apparait donc "plus symbolique que biologique", selon le mot des chercheurs. Persuadées que la ménopause serait synonyme d’entrée dans "la vieillesse", elles se détourneraient de l'activité sexuelle. Selon les auteurs de l'étude, "il est très important d'informer les femmes [qui vont entrer dans la période d'apparition de la ménopause], de même que leurs partenaires et les professionnels de santé qui les traitent, que les effets rapportés négatifs sur la sexualité sont plus susceptibles d'être dus à l’anticipation [de ces problèmes] ou à des représentations négatives qu’à d'effets biologiques ou hormonaux."

Les signataires de ces travaux observent en conclusion qu’il serait "très éclairant d'interroger les hommes sur leurs attitudes, leurs croyances ou leurs représentations sur la ménopause, sur la sexualité des femmes ménopausées et les relations qu'ils établissent avec elles."

Source : Women’s Sexuality: From Aging to Social Representations, V.Ringa, K.Diter, C.Laborde & N.Bajos, J Sex Med (à paraître) DOI: 10.1111/jsm.12267, consulté avec l'aimable autorisation des auteurs.

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