Des tétraplégiques retrouvent l’usage de leurs bras grâce à un transfert de nerfs

Grâce à une opération de transfert de nerfs réalisée en Australie, 13 patients tétraplégiques peuvent à nouveau se servir de leurs bras pour saisir un objet ou faire un mouvement de pince avec leurs mains.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Des tétraplégiques retrouvent l’usage de leurs bras grâce à un transfert de nerfs
Crédits Photo : Capture Ecran Youtube ©TheLancetTV, van Zyl et al. 2019

Rendre l’usage de leurs bras à des personnes tétraplégiques. C’est la prouesse réussie par des chercheurs de l’université de Melbourne, en Australie, pour 13 patients qui ont à nouveau pu se servir de leurs bras pour certains gestes comme celui de saisir ou de pincer grâce à une nouvelle technique : le transfert de nerfs. Les scientifiques publient leurs résultats le 4 juillet 2019 dans la revue The Lancet.

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Nerfs fonctionnels contre nerfs paralysés

Pour cette étude, les chercheurs ont recruté 16 jeunes adultes tétraplégiques, âgés en moyenne de 27 ans. Tous avaient été victimes d’une lésion de la moelle épinière qui les avait paralysés moins de 18 mois avant l’étude, le plus souvent lors d’un accident de la route ou d’une blessure survenue lors de la pratique d’un sport.

L’opération qu’ils ont reçue a consisté à prélever des nerfs fonctionnels situés au-dessus de la blessure et à les relier à des nerfs paralysés car au-dessous de la blessure. L’objectif de ce transfert : restaurer chez ces patients le mouvement d’extension du coude mais aussi la capacité à faire un mouvement de pince avec la main et à saisir des objets. Chez 10 des 16 patients, une technique de transfert des tendons a été utilisée en plus de celle du transfert de nerfs.

Tendre le bras, ouvrir et fermer la main

Et les résultats sont bien là : deux ans après les 59 opérations, et après une rééducation intense, 13 patients étaient capables de tendre leurs bras, d’ouvrir et de fermer leurs mains et de manipuler des objets comme des bouteilles, des couverts ou des brosses à dents. "Ces résultats suggèrent que les transferts de nerfs peuvent aboutir aux mêmes améliorations fonctionnelles que les transferts de tendons traditionnels, avec des incisions moins grandes et de plus courtes périodes d'immobilisation après la chirurgie", se félicitent les chercheurs dans leur publication.

Paul Robinson est l’un des patients de l’étude. En février 2015, un accident de moto endommage sa moelle épinière et lui fait perdre la mobilité des bras. Il est alors obligé de retourner vivre chez ses parents. L’opération de transfert des nerfs qu’il a reçu en décembre 2015 fait partie, dit-il à la BBC, des expériences les plus douloureuses de sa vie. Mais après une phase de rééducation, les progrès de Paul sont énormes : "J’ai récemment emménagé dans ma propre maison et je vis de façon indépendante, je n’avais jamais pensé que ce serait possible" confie-t-il au site britannique. "Je peux faire du sport (rugby en fauteuil roulant) et j'étudie l'ingénierie" ajoute-t-il. "Cela a fait une énorme différence dans ma vie : être capable de couper de la nourriture, de tenir des couverts normaux et d'utiliser un stylo pour écrire à l'université."


©TheLancetTV


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"Pouvoir se servir de sa main est la priorité numéro un"

Une technique porteuse d’espoir pour tous les patients tétraplégiques : "Le message à tous les patients au monde qui souffrent d'une lésion à la moelle épinière et à tous les soignants qui les traitent, c'est : il est possible de restaurer les fonctions de la main et du coude", assure à l’AFP la docteure Natasha van Zyl, chirurgiennne à Melbourne et autrice principale de l'étude. "Pour ces patients, pouvoir se servir de sa main est la priorité numéro un, avant le fait de marcher ou de restaurer les fonctions sexuelles", estime la chirurgienne. Seul bémol, souligné par le docteur Mark Dallas de l’université de Reading (Angleterre) qui n’a pas participé à l’étude : ce type d’intervention "ne restaure pas cette fonction au niveau où elle était avant la blessure".

Prochaine étape pour les chercheurs australiens : comprendre pourquoi le transfert de nerfs n’a pas fonctionné pour trois des participants à l’étude et comment faire pour y remédier.