Refroidir les organes pour mieux les préserver

On sait que le froid permet de conserver des organes quelques heures en cas de transplantation. Une équipe américaine a mis au point une nouvelle technique qui permet de conserver l'organe à - 6°C pendant trois jours au lieu de 24 heures.

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
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Le refroidissement des organes avant transplantation est un enjeu important car il pourrait permettre de transplanter plus d'organes, en tout cas d'avoir plus de temps avant de les implanter. On a tous vu ces images de course contre la montre (avec avions, motards de la police...) pour ne perdre aucune minute entre le prélèvement sur le donneur et la transplantation sur le receveur, parfois situé géographiquement à l'autre bout de la France.

Actuellement, les greffons sont déjà placés dans des glacières hermétiques où la température ne dépasse pas 4°C : ils sont en hypothermie. Chaque heure est comptée, il ne faut pas dépasser 3 à 4 heures pour un cœur ou 24 à 36 heures pour un rein, par exemple.

Ces délais sont bien sûr des moyennes qui dépendent de l'état de l'organe. Cette technique de "supercooling" consiste à optimiser ce refroidissement en descendant très bas (en dessous de zéro sans congeler...) et en oxygénant et nourrissant les organes pour les faire tenir jusqu'à 4 jours.

Une technique ancienne

L'hypothermie est une technique ancienne déjà utilisée en réanimation ou en médecine d'urgence. Ce sont surtout les effets neuroprotecteurs de l'hypothermie (c'est-à-dire de protection du cerveau) qui sont recherchés et qui ont été rapportés dès la fin des années 1950... Mais ils semblent être tombés dans l'oubli pendant une vingtaine d'années avant de revenir en force depuis 10 ans, en réanimation notamment.

On parle même d'hypothermie thérapeutique en cas d'arrêt cardiaque, d'accident vasculaire cérébral, ou de traumatisme crânien.

Différentes techniques

Plusieurs techniques de refroidissement sont à la disposition des équipes que ce soit dans les camions du SAMU qu'en réanimation. Mais la plus utilisée demeure le refroidissement externe.

  • Refroidissement externe : il est réalisé à l'aide de systèmes refroidissants (matelas, draps mouillés et couvertures) et utilise la pulsion d'air froid, permettant d'obtenir un refroidissement par convection. Le refroidissement exclusif du crâne (obtenu à l'aide d'un casque de gel polymérisé réfrigéré) est également possible, mais son efficacité reste mal démontrée chez l'adulte.
  • Refroidissement par perfusion intraveineuse de liquide froid : une autre méthode, le refroidissement par perfusion intraveineuse de liquide froid, nécessite des perfusions rapides de liquide maintenu à une température inférieure à 5°C.
  • Refroidissement par un dispositif intravasculaire placé dans la veine cave inférieure et refroidissement par circulation extracorporelle : le refroidissement par un dispositif intravasculaire placé dans la veine cave inférieure, ainsi que le refroidissement par circulation extracorporelle, sont des techniques très lourdes à mettre en place et réservées à des centres très spécialisés, dans le domaine de la recherche.

 Attention, l'hypothermie n'est pas la panacée et pose plusieurs problèmes :

  1. Au terme de la phase d'hypothermie, le réchauffement doit être impérativement progressif et contrôlé en raison du risque de collapsus, véritable désamorçage cardiaque. La prudence recommande un réchauffement lent (d'environ 1°C par 8 heures).
  2. Il existe des phénomènes inflammatoires au réchauffement qui sont très négatifs pour le cerveau.
  3. Enfin, de récentes études contrôlées et randomisées ont été publiées fin 2013 dans le JAMA et le New England Journal of Medicine et ne montrent finalement pas de différence entre les groupes ayant subi une hypothermie ou non et pourraient remettre en cause ces pratiques.

*Etude de référence : Supercooling enables long-term transplantation survival following 4 days of liver preservation, 29 June 2014, Nature Medicine (2014) doi:10.1038/nm.3588

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