"On aurait pu sauver Tomek", déplore l’alpiniste Élisabeth Revol

Élisabeth Revol est en colère contre l'organisation des secours pakistanais. Selon elle, ils auraient pu sauver son coéquipier polonais décédé au cours de leur descente du Nanga Parbat.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Élisabeth Revol souffre de graves gelures aux mains et aux pieds et risque l'amputation.
Élisabeth Revol souffre de graves gelures aux mains et aux pieds et risque l'amputation.

Élisabeth Revol est en colère. Bien qu’elle ait été sauvée des sommets de l'Himalaya, où elle a failli mourir, elle déplore qu’il n’ait pas été possible de faire de même pour son compagnon de cordée polonais, Tomasz Mackiewicz [qu’elle appelle Tomek, ndlr]. D’après elle, les secours pakistanais ont mis trop de temps à intervenir. A l’heure actuelle, Tomek est probablement décédé.

"J'ai beaucoup de colère"

"J'ai beaucoup de colère, on aurait pu sauver Tomek si ça avait été un réel secours, pris à temps et organisé", a déclaré Élisabeth Revol à l’occasion d’une conférence de presse. L’alpiniste, sauvée de la "montagne tueuse", qui culmine à 8 126 mètres de hauteur, est en soins intensifs à l'hôpital de Sallanches (Haute-Savoie). Elle risque l’amputation du pied gauche, gravement atteint par d’importantes gelures.

Lorsqu’un problème survient dans le blizzard himalayen, toute opération de sauvetage devient "une course contre la montre", a expliqué Élisabeth Revol. Pourtant, entre son message de détresse et son retour au camp de base, 63 heures se sont écoulées. Elle raconte : le 25 janvier dernier, à 23h10 au Pakistan, elle alerte son routeur, son mari et la femme de Tomasz Mackiewicz. D’après elle, une centaine de messages sont alors échangés. Puis, son GPS s’éteint. Dès lors, Élisabeth Revol attendra l’arrivée des secours, informée au minimum.

Une opération de sauvetage à 40 000 dollars

D’après son routeur, les secouristes auraient rencontré "des freins et des problèmes", dont des "mensonges de certains Pakistanais" sur la "disponibilité, la réservation et les capacités des hélicoptères" pour aller chercher Tomasz Mackiewicz – atteint de cécité des neiges – resté à 7 000 mètres d’altitude, et Elisabeth Revol, descendue à 6 300 mètres. Il dénonce également le prix des opérations : les secours pakistanais auraient fait dans la surenchère, proposant d’abord leurs services pour 15 000 dollars, puis pour 40 000, "en cash sur la table".

Or, payer en liquide était impossible pour l’ambassade de France. Aussi celle de Pologne a-t-elle versé 30 000 dollars de sa poche. "Le reste, ce sont ses employés qui les ont donnés", d’après Masha Gordon, une alpiniste russo-britannique.

La veuve de Tomasz Mackiewicz, Anna Antonina Solska, a exprimé à Élisabeth Revol sa "profonde gratitude" pour avoir guidé son mari jusqu'à une crevasse, où elle l'a laissé à l'abri. A ce stade, Élisabeth Revol était convaincue que son ami serait secouru. Elle reconnaît aujourd'hui que "dans la tête, ce n'est pas simple", car elle s'en veut de ne pas avoir "insisté" pour que Tomek mette ses lunettes lors de l'ascension finale, ce qui l'aurait protégé de la cécité des neiges.

Néanmoins, Tomasz Mackiewicz a très probablement souffert d’un œdème pulmonaire contre lequel Élisabeth Revol ne pouvait rien faire, estime le Dr Frédéric Champly, spécialiste des pathologies de très haute altitude. Selon lui, Tomek est certainement décédé deux ou trois heures après le départ de sa coéquipière.