Une équation pour prédire le bonheur

Sur une échelle de 1 à 10, à combien vous estimez-vous heureux ? Une équipe de chercheurs vient de trouver une équation qui pourrait répondre avant vous à cette question !

La rédaction d'Allo Docteurs
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Une équation pour prédire le bonheur
Capture d'écran de l'équation du bonheur. PNAS. Robb B. Rutledge et al
Capture d'écran de l'équation du bonheur. PNAS. Robb B. Rutledge et al

Ce n'est pas la richesse qui fait le bonheur... mais la différence entre ce que l'on reçoit et ce que l'on imaginait recevoir ! Voilà comment, de façon très simplifiée, on pourrait résumer le travail de scientifiques de l'University College London qui ont construit une équation permettant de prédire le niveau de bonheur d'un individu à un instant donné

Ils ont ainsi montré que les événements et aléas qui surviennent dans la vie quotidienne n'influencent pas à eux seuls le niveau de bonheur ou de satisfaction ressenti, mais que la différence entre ce que l'on pensait vivre ou obtenir après avoir pris une décision (comme accepter un nouveau travail ou acheter une nouvelle voiture) et la réalité tient un rôle très important.

L'effet de l'attente

Prenons l'exemple d'un joueur de casino devant une roulette. D'après ce modèle, le joueur se dira d'autant plus heureux que la différence entre ce qu'il pensait gagner et la somme effectivement empochée est grande. Ne dit-on pas souvent que c'est lorsque l'on s'y attend le moins que l'on est le plus heureux ?

"Néanmoins, l'attente influence elle aussi le niveau de bonheur avant même que le résultat d'une décision ne soit connu", fait remarquer Robb Rutledge, directeur de l'étude. "Si vous prévoyez de retrouver un ami dans votre restaurant préféré, votre attente positive peut faire grimper votre niveau de bonheur au moment même où vous prévoyez ce rendez-vous", et donc avant qu'il n'ait lieu.

L'équation prend en compte ces différents effets. Pour la construire, les scientifiques ont demandé à 26 participants de se prêter à un jeu où ils devaient effectuer une succession de décisions, chacune pouvant déboucher sur un gain ou une perte d'argent. Toutes les deux à trois décisions, ils devaient évaluer leur niveau de bonheur.

Testée sur 18.420 participants

Parallèlement, l'activité cérébrale de certains d'entre eux était enregistrée par Imagerie par résonnance magnétique fonctionnelle (IRMf). A l'aide de toutes ces données collectées, les scientifiques ont construit une équation qui prend en compte à la fois l'influence des évènements précédents (qui décroit avec le temps), l'espérance du gain, et la différence entre cette espérance et le gain effectivement obtenu.

Pour évaluer son efficacité à prédire le bonheur, cette équation a été testée sur 18.420 participants de l'un des jeux d'une application pour smartphones créé pour aider la recherche en science cognitive : The Great Brain Experiment. Les scientifiques se sont alors rendus compte que cette équation est capable de prédire le niveau de satisfaction des joueurs pendant le jeu.

L'analyse par IRMf a quant à elle mis en évidence une région du cerveau qui s'active lors des changements d'humeur : le stratium. Comme cette zone renferme de nombreuses connexions avec les neurones à dopamine, ces résultats appuient l'hypothèse du rôle de ce neurotransmetteur dans la régulation de l'humeur.

Pourquoi une telle équation ?

Pour les chercheurs, le but de cette nouvelle équation n'est évidemment pas de remplacer la boule de cristal et de s'amuser à prédire le bonheur des individus, mais de mieux comprendre ce qui fait le bonheur et ce qui l'influence dans les évènements de la vie courante. Autant de données qui pourraient leur permettre de mieux cerner, puis soigner, les troubles de l'humeur.

Les chercheurs estiment également que cette étude pourrait aussi aider les états à mesurer le bien-être de la population. En particulier le Royaume-Uni qui a lancé en 2010 un programme de mesure du bien-être national.

Sources : A computational and neural model of momentary subjective well-being. PNAS. Août 2014. Robb B. Rutledge et al. doi : 10.1073/pnas.1407535111