GPA : la filiation du couple Mennesson reconnue par la justice

La Cour de cassation a validé la transcription en droit français des actes de naissance des jumelles Mennesson nées par GPA en Californie il y a 19 ans. Une décision historique dans une affaire devenue emblématique.

La rédaction d'Allo Docteurs
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GPA : la filiation du couple Mennesson reconnue par la justice
Crédits Photo : Wikimedia Commons / © DXR

La Cour de cassation a validé le 4 octobre 2019 l'entière transcription en droit français des actes de naissance de deux jumelles nées par gestation pour autrui (GPA) en Californie il y a 19 ans, Fiorella et Valentina. Une reconnaissance de filiation taillée sur mesure pour le "cas particulier" de la famille Mennesson, devenue emblématique.

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"Nos enfants ne sont plus des fantômes"

Si la reconnaissance de la paternité de Dominique Mennesson, père biologique, était acquise, ce dossier posait la question du statut en droit français de la "mère d'intention", Sylvie Mennesson, qui a désiré et élevé les enfants, mais n'en a pas accouché.

"Nos enfants ne sont plus des fantômes. Ce sont nos enfants, légalement parlant", a réagi le père des jumelles, Dominique Mennesson, devant la presse au palais de justice de Paris. Les époux Mennesson apparaissent donc désormais comme seuls père et mère sur l’acte de naissance des deux jeunes femmes.

La solution de l’adoption écartée

"C'est une immense victoire pour la famille Mennesson, la fin d'un combat de 19 ans", a salué l'avocat de la famille, maître Patrice Spinosi. "Ce combat est définitivement et complètement gagné" et "cela fera jurisprudence pour des cas identiques à ceux de la famille Mennesson", a-t-il estimé.

Jusqu'à présent, la jurisprudence de la Cour de cassation ne permettait pas une telle transcription des actes de naissance, s'agissant de la "mère d'intention", préconisant la solution de l'adoption. La Cour a pris cette décision "en l'absence d'autre voie" préservant l'intérêt supérieur de ces jeunes femmes : la solution de l'adoption n'est pas satisfaisante, notamment "au regard du temps écoulé depuis la concrétisation du lien entre les enfants et la mère d'intention", explique-t-elle dans son arrêt.

Quant à la solution de la "possession d'état" que permet le code civil, qu'avaient proposée les Mennesson, elle ne présente pas de "sécurité juridique suffisante", selon la Cour.

Une décision non généralisable à d’autres familles

Mais la décision de la Cour ne généralise pas la transcription automatique en droit français : elle est spécifique au cas de cette famille, dont les filles sont aujourd'hui majeures. "Maintenant, il faut que les choses avancent et que l'ensemble des administrations se mettent au pas et acceptent de considérer comme des dossiers normaux ces dossiers d'enfants issus d'une GPA réalisée légalement à l'étranger" a estimé Me Spinosi.

La décision "ne règle pas tout, puisque chaque famille devra faire l'objet d'un examen qui en passera par le juge, mais l'avancée est nette", a également salué dans un communiqué l'avocate Caroline Mecary, spécialiste de ce type de dossier.

"La prohibition de la GPA reste une ligne rouge infranchissable"

A l'inverse, l'association pro-vie Alliance Vita a critiqué une décision "sidérante en pleine discussion du projet de loi bioéthique" et qui "revient à valider la pratique pourtant illégale en France de la GPA".
"La prohibition de la GPA reste une ligne rouge infranchissable", a réaffirmé de son côté le ministère de la Justice. Le gouvernement avait indiqué en septembre être "suspendu" à cette décision pour clarifier "l'état du droit" pour les enfants nés à l'étranger de mère porteuse. Une "circulaire interministérielle" sera donc émise "prochainement", a indiqué le ministère.

Pas de légalisation prévue

Cette décision survient alors que la loi de Bioéthique est discutée à l’Assemblée nationale. Le 3 octobre, les députés ont voté un amendement automatisant la reconnaissance en France de la filiation, sous forme d'adoption, entre un parent d'intention et un enfant conçu par GPA à l'étranger. Contre l'avis du gouvernement, qui a aussitôt réclamé une seconde délibération.

La GPA "reste proscrite dans notre pays", a insisté auprès de l'AFP Aurore Bergé, co-responsable LREM pour le projet de loi bioéthique. "Nous sommes très clairs : nous n'avons pas l'intention de légaliser la GPA ni de faire une transcription automatique."