Deuil : les mots pour en parler

Quand un de nos proches est en deuil, on ne sait jamais comment lui parler, que lui dire, comment l'aider. Nous sommes souvent démuni face à cette souffrance, et nous n'avons pas toujours les bons mots pour en parler. Alors pour aider une personne en deuil après la perte d'un proche, le Dr Christophe Fauré, psychiatre, psychothérapeute, propose une sorte de "kit de survie relationnelle" autour de trois questions essentielles. Explications.

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le
Chronique du Dr Christophe Fauré, psychiatre, du 2 novembre 2011
Chronique du Dr Christophe Fauré, psychiatre, du 2 novembre 2011

Il est souvent difficile d'aider une personne en deuil. Un "kit de survie relationnelle" consiste à poser trois questions essentielles :

  1. Parle-moi de ton mari/enfant/parent que tu as perdu… Comment était votre relation ? Raconte-moi. Parler de la personne qu'on a perdue est un besoin fondamental qui est présent pendant des années.
  2. Raconte-moi ce qui s'est passé ?
  3. Qui sont tes alliés ?

Parler de la personne disparue

Parler de la personne disparue va faire venir des larmes. Mais c'est un aspect important du travail de deuil, la charge émotionnelle est source de souffrance dans le deuil. Or, le fait de parler encore et encore de la personne disparue, de regarder les photos par exemple, permet au fil du temps d'user progressivement l'intensité de cette charge émotionnelle et de tendre vers plus d'apaisement. Si on n'exprime rien au sujet de cette personne, la charge émotionnelle reste intacte et donc la souffrance aussi reste intacte.

Le récit des événements

La deuxième question est le récit des circonstances de la maladie, de la fin de vie, de l'accident ou du suicide... Raconter les faits est un authentique besoin de la personne en deuil qui persiste pendant plusieurs mois. Le problème, c'est que les proches ont souvent l'impression que la personne en deuil tourne en rond autour de ce récit, alors que ce n'est pas le cas. Elle a besoin de le faire , et si on la laisse faire, en l'écoutant avec patience, on constate que ce besoin se tarit spontanément au fil du temps.

Faire le point

Premièrement, il faut savoir où la personne en est physiquement, parce que le corps porte également le poids du deuil. Il faut aussi voir avec cette personne comment elle prend soin d'elle : sa santé, son sommeil, son alimentation, son hygiène de vie en général et l'aider à améliorer concrètement les choses si nécessaire.

Deuxièmement, il faut savoir où la personne en est psychologiquement. Il faut explorer avec elle ses émotions (peur, colère, culpabilité, tristesse, perte de sens…) et l'aider à les exprimer, sans jugement et sans essayer de la consoler trop vite. La personne en deuil a besoin d'exprimer ses émotions pour user l'intensité de leur charge émotionnelle.

Bien entourer la personne en deuil

Il est important de s'assurer que la personne en deuil soit bien entourée. Lui demander qui sont ses alliés est une question importante parce que les proches ont tendance à s'éloigner et prendre de la distance au fil du temps, alors que la personne en deuil est toujours plongée dans sa peine. Cela peut lui donner une impression d'abandon ou d'isolement qui peut créer beaucoup de ressentiment à l'égard des autres. Il est donc essentiel d'assurer à la personne en deuil une présence affectueuse sur la durée, bien au-delà de la première année !

Un quatrième axe est à explorer avec la personne en deuil : son aspect intérieur. Il s'agit d'une question, presque d'ordre spirituel, sur le sens des choses. Il faut inviter la personne en deuil à parler de la remise en question de ses valeurs, de ses priorités de vie et des croyances qui sont chamboulées au cours de son deuil.

Une personne en deuil est extrêmement sensible à toutes les occasions où on évoque spontanément la personne qu'elle a perdue. Il ne faut donc jamais hésiter à parler de la personne décédée, même très longtemps après son décès. Il ne faut pas avoir peur de rappeler les jours heureux, les anecdotes, les aspects positifs de leur relation d'autrefois. En dépit des larmes qui peuvent venir, ce rappel fait authentiquement du bien parce que la personne est rassurée que l'être qu'elle a perdu n'est pas oublié...