Des ovules portés à maturation en laboratoire
Des scientifiques ont cultivé in vitro des ovules jusqu’à maturité. Reste à vérifier dans quelle mesure cette réussite technique pourra réellement aider les femmes infertiles.
C’est une première : des scientifiques ont cultivé des ovules humains en laboratoire jusqu'à leur pleine maturité, c'est-à-dire prêts à être fécondés. Leur travaux offrent une percée potentielle pour préserver la fertilité féminine, selon des travaux publiés le 9 février. C'est "la première fois" que des ovules humains sont développés in vitro dans un laboratoire, grâce à des substances appropriées pour leur croissance, depuis leur stade le plus précoce jusqu'à leur pleine maturité, a souligné dans un communiqué l'université d'Édimbourg (Grande-Bretagne) qui a conduit, avec des chercheurs de New York, l'étude parue dans la revue Molecular Human Reproduction.
Des scientifiques avaient déjà réussi auparavant cette maturation en laboratoire avec des ovules de souris pour produire une progéniture vivante. D'autres avaient fait mûrir des ovules humains à un stade de développement relativement tardif.
Préserver la fertilité après un cancer
Cette avancée, étape préalable à toute tentative de fécondation ultérieure, pourrait avoir des applications pour préserver la fertilité de femmes atteintes d'un cancer. L'intérêt, pour celles qui vont suivre un traitement comme la chimiothérapie, serait d'éviter la réimplantation de tissu ovarien préalablement prélevé, et ainsi le risque de réintroduire le cancer. À la place, les ovocytes immatures récupérés à partir d'un morceau d'ovaire des patientes pourraient être conduits à maturité en laboratoire. Ils seraient stockés pour être fécondés plus tard.
"Le fait de pouvoir développer pleinement des ovules humains en laboratoire pourrait élargir la portée des traitements de fertilité disponibles et nous travaillons maintenant à optimiser les conditions favorisant leur développement. Nous espérons également savoir, sous réserve d'approbation réglementaire, s'ils peuvent être fécondés", commente la professeure Evelyn Telfer, de l'université d’Édimbourg, qui a dirigé cette recherche.
Le professeur Azim Surani, de l'Université de Cambridge, estime pour sa part auprès du Science Media Centre que "les résultats rapportés dans l'étude sont intéressants". Mais, ajoute-t-il, "il reste beaucoup de travail avant de conclure qu'ils ont le potentiel d'être utilisés dans les cliniques".
Ce biologiste remarque également que "ces ovocytes sont plus petits que la normale". Il pense qu'il pourrait être intéressant de tester leur développement en essayant la fécondation in vitro (FIV).
Robin Lovell-Badge, de l'Institut Francis Crick, relève que la procédure est encore "vraiment très inefficace", avec, selon lui, seulement neuf cellules parvenues au stade d'ovules matures, sur un nombre élevé, et non précisé.
Le Dr Channa Jayasena, du Collège impérial de Londre, y voit quant à lui "une percée importante, qui pourrait offrir de l'espoir aux femmes infertiles", mais "il faudra plusieurs années pour traduire cela en thérapie", prévient-il.