Maternités et blocs opératoires : des fermetures programmées

Le gouvernement devrait publier dans quelques semaines un décret permettant de fermer les services de chirurgie et les maternités qui ne pratiqueraient pas assez d'opérations et d'accouchement chaque année. Les services de chirurgie ayant opéré entre 1 050 et 1 500 personnes par an disposeront de trois ans pour améliorer leur activité ou s'associer avec un autre établissement afin de pouvoir se maintenir.

Benoît Thevenet
Rédigé le , mis à jour le
Maternités et blocs opératoires : des fermetures programmées

EDITO

1500 patients par an. Ce sera la limite en dessous de laquelle les services de chirurgie et les maternités seront menacés de fermeture. 1500 personnes opérées ou 1500 mamans accouchées c’est le seuil d’activité, selon le ministère, garantissant un niveau de sécurité suffisant. La médecine est comme le pilotage : elle nécessite des heures de vol, et donc un entrainement quotidien et répété. L’annonce a de nouveau fait l’effet d’un coup de tonnerre dans le ciel des petits et moyens hôpitaux de France, et une première liste publiée par le Journal du Dimanche donne déjà des sueurs froides à 54 villes.

Se faire opérer vite ou mieux ?

L’intention de fermer des services qui ne « travaillent pas assez » n’est en soi pas illogique. Les moyens de transports et les infrastructures routières ont évolué, et gagner une des grandes villes de sa région ne représente plus le même enjeu que 40 ou 50 ans en arrière. De même, les moyens techniques médicaux se sont perfectionnées et tous les hôpitaux ne peuvent se payer le matériel dernier cri. Alors se pose la question : l’égalité devant les soins se fait-elle en fonction de la distance à parcourir pour se faire soigner ou en fonction des compétences et des moyens techniques dont on pourra bénéficier ? C’est tout le débat. Et parfois la réponse sera : les deux mon capitaine, car pour certaines zones montagneuses, l’éloignement restera une perte de chance en cas d’urgence. Et en cela, le simple critère des « 1500 opérations par an » sera en soi une inégalité.

Des décrets au milieu de l'été

La mesure, annoncée hier, n’est pas nouvelle. Cela fait des mois que le gouvernement hésite, tourne autour du pot, fait des annonces non suivies d’effet. La publication du décret prévue fin juillet, début août n’est donc pas un hasard. C’est une manière peu courageuse d’éviter le débat. En profitant de la période des vacances pour atténuer au maximum le retentissement d’une mesure impopulaire. Impopulaire parce que toucher aux hôpitaux de proximité, c’est toucher aux services publics, à l’emploi, au sentiment d’être en sécurité non loin de « son » hôpital. On laisse ainsi aux « usagers de la santé » l’impression de faire des économies sur leur dos au lieu de leur expliquer, droit dans les yeux qu’on tente de mieux les prendre en charge et de sauver notre système de santé.

Benoît Thevenet

Mise à jour du 26 juillet 2010 : les petits hôpitaux vont pouvoir souffler encore quelque temps, le ministère de la Santé ayant reporté sine die la parution de ce décret controversé prévoyant la fermeture des blocs opératoires à activité réduite, qui avait suscité la colère de certaines collectivités locales.

La parution du texte - initialement prévue fin juillet, début août - qui menace les entités opérant moins de 1 500 personnes par an, est "reportée", a indiqué mardi 26 juillet 2010 à l'AFP le ministère de la Santé. Interrogé sur une date de publication, un porte-parole a répondu que le ministère attendrait "le temps qu'il faudra pour réexpliquer le pourquoi" de ces fermetures.

Le porte-parole du gouvernement Luc Chatel a assuré de son côté que le principe d'une fermeture de certains blocs opératoires à activité réduite n'était pour autant pas remis en cause, malgré l'annonce la veille par le ministère de la Santé d'un report de la mesure.

"Ce report ne remet absolument pas en cause (...) la décision qui avait été prise initialement", a déclaré Luc Chatel lors de son compte-rendu du Conseil des ministres à l'Elysée.

La ministre de la Santé "Roselyne Bachelot souhaite simplement prendre le temps de l'explication, expliquer pourquoi elle est amenée à prendre cette décision et donc elle va échanger avec les villes concernées. Mais la décision de fond n'est pas remise en question", a-t-il insisté.