Sexualité des animaux : gare au gorille ?

Chez les grands singes, le sexe a une importance différente selon l'espèce. On note aussi des similitudes avec les humains. Les explications avec Farah Kesri, vétérinaire éthologue.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

La sexualité a une importance chez tous les primates. Seul 1,2% de gènes nous sépare des chimpanzés. On partage avec tous les grands singes des traits anatomiques et des comportements. Les primates sont des animaux sociaux donc ils se réunissent. Et dans le règne animal, la réunion d'individus est motivée soit par l'abondance de nourriture, soit par la présence de femelles prêtes à s'accoupler.

L'accès aux femelles est différent si on est dans un groupe de gorilles, d'orangs-outans ou de chimpanzés. Cela sous-entend que le sexe détermine d'une certaine manière la structure sociale du groupe et sa dynamique.

Le gorille et son harem

Chez les gorilles, la structure du groupe est de type harem, avec un mâle dominant à dos argenté et plusieurs femelles qui sont les mères des petits. Il est le seul à avoir le droit de copuler avec elles. Les autres mâles, arrivés à maturité doivent quitter le groupe pour en former un autre à condition qu'ils parviennent à convaincre des femelles de les suivre. Il y a souvent des intimidations et des combats entre mâles pour garder les femelles.

Ce ne sont pas les performances sexuelles qui assurent la fidélité des femelles, son pénis ne mesure que 3 cm, mais plutôt sa force. Un mâle dominant peut peser jusqu'à 200 kg et en position bipède, il peut atteindre 1m80, très intimidant. Chez les gorilles, la sexualité se limite à la reproduction mais ce droit est très défendu, il est la cause de combat entre mâles. Le mâle argenté va protéger non pas un territoire mais les femelles et les petits. Il est d'ailleurs un père très attentif comparé aux autres grands singes.

Le chimpanzé en négociations

La situation est différente chez les chimpanzés. Les chimpanzés doivent protéger un territoire, ils sont obligés de collaborer pour le défendre et pour chasser. Ils vivent dans des groupes multi-mâles/multi-femelles. La structure sociale est très hiérarchisée avec des luttes de pouvoir permanentes. Dans une journée, il se forme de nombreux petits groupes labiles, qui vont changer tous les jours en fonction des négociations et des alliances qui servent notamment à résoudre des problèmes d'accès aux femelles. C'est totalement différent chez les bonobos.

Chez les bonobos, la pluri-sexualité règne

Chez les bonobos, la structure est plus égalitaire. Les femelles ont d'ailleurs une place plus importante que chez les chimpanzés. Chez les bonobos, c'est par le sexe qu'on résout les problèmes liés au pouvoir. L'accès à la sexualité est très libre. Les jeux sexuels sont plus fréquents et partagés par petits et grands. Toutes les combinaisons sont possibles. On parle de pluri-sexualité (relation hétérosexuelle et homosexuelle). Il y a aussi une variété de positions. Les bonobos copulent aussi face à face, ce qui est rare chez les primates. Il y a même des échanges de baisers. Les rapports sexuels fréquents permettent chez les bonobos plus de cohésion sociale, des relations plus apaisées que chez les chimpanzés.

Le sexe apaise les tensions

Plus l'accès à la sexualité est facile, moins il y a de tension et d'agressivité quand on compare les différents grands singes. Cet accès de plus en plus "libre/autorisé" s'exprime aussi physiquement. Les femelles bonobos arborent en permanence une vulve rose très gonflée visible de très loin et pas seulement en période de fécondité. Ce qui prouve que la sexualité chez les bonobos ne se limite pas à la reproduction. Les mâles sont toujours les bienvenus.

Chez les chimpanzés, les signes d'oestrus sont aussi très visibles mais seulement en période de reproduction, donc plus de conflit. Chez les femelles gorilles, le gonflement génital est très discret, tout comme chez les orangs-outans. D'ailleurs, les orangs-outans sont plus solitaires. Mâles et femelles vivent séparément et ne se rencontrent qu'en période de reproduction. Pour se retrouver, le mâle possède un sac laryngé qui lui permet d'émettre un long cri puissant audible dans un rayon d'un kilomètre. Il doit appeler les femelles pour signaler sa présence et dissuader les autres mâles. Et s'il trouve une femelle, ce n'est pas gagné. La femelle n'acceptera de se reproduire que s'il s'agit d'un mâle dominant. Il est reconnaissable par la présence d'un disque faciale. Les autres mâles, même s'ils sont matures sexuellement, n'auront pas les bourrelets graisseux tant qu'ils n'auront pas trouvé de territoire. La concurrence est donc rude côté sexualité, mieux vaut être un bonobo qu'un orang-outan.

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