La maladie d’Alzheimer freinée par un anti-cancéreux

Une équipe américaine annonce avoir utilisé avec succès un traitement contre certains cancers cutanés sur des souris atteintes de la maladie d'Alzheimer. En 72 heures, les capacités des souris étaient déjà améliorées et leur cerveau presque débarrassé des dépôts toxiques sur les neurones d’une protéine appelée bêta-amyloïde.

Géraldine Zamansky
Rédigé le
La maladie d’Alzheimer freinée par un anti-cancéreux

L'histoire commence en fait en 2008 à Lille. En progressant dans le décryptage des facteurs génétiques de la maladie d'Alzheimer, des chercheurs français ont identifié le rôle crucial de variations sur un gène codant pour une protéine appelée Apolipoprotéine E (ApoE)… Or, cette protéine est un transporteur de cholestérol et surtout de bêta-amyloïde, une autre protéine qui se dépose en quantité excessive sur les neurones des patients atteints de la maladie d'Alzheimer.

A Cleveland, dans l'Ohio, des chercheurs ont donc eu l'idée d'utiliser un anticancéreux connu pour sa capacité à stimuler, notamment, l'activité des gènes de ce transporteur. Ils l'ont injecté à des souris ayant différents stades de la maladie et ont réussi à faire disparaître en 72 heures plus de la moitié des dépôts de bêta-amyloïdes toxiques pour les neurones. Et surtout, les souris commençaient déjà à retrouver des comportements normaux ! Autrement dit, le traitement a réussi stimuler la production d'ApoE, qui a "nettoyé" le cerveau encombré par les dépôts de bêta-amyloïdes. Les résultats de leurs travaux ont été publiés dans la revue américaine Science, du 10 février 2012.

Le cerveau "nettoyé" en 72 heures

"C'est assez enthousiasmant", estime le Dr Luc Buée, directeur de l'équipe Inserm "Alzheimer et Tauopathies". "Mais il faut rester prudent car le passage de la souris à l'homme nous a déjà réservé beaucoup de déceptions."

Le chercheur rappelle ainsi que ce traitement créé pour certains cancers de la peau n'a donc pas été "optimisé" pour le cerveau. Il souligne aussi la problématique des effets secondaires souvent lourds en cancérologie. "Ce qui est acceptable dans le cadre d'une maladie qui représente une menace vitale, comme le cancer, ne l'est pas forcément aux premiers stades de la maladie d'Alzheimer chez une population âgée", explique-t-il.

De plus, des approches limitées aux dépôts de bêta-amyloïdes ont déjà montré leurs limites chez l'homme. Car d'autres protéines s'accumulent anormalement dans le cerveau des patients atteints, comme la protéine Tau par exemple. Le spécialiste croit donc plutôt à l'association de plusieurs stratégies pour s'attaquer aux différents dérèglements impliqués dans les pertes de mémoire et de capacités provoquées par la maladie d'Alzheimer. Un espoir renforcé par les progrès également réalisés au niveau du diagnostic : s’il était réalisé plus tôt, il serait peut-être plus facile d'enrayer tous ces processus.

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