Le glyphosate de nouveau autorisé pour 10 ans ?

L'autorisation du glyphosate en usage agricole pourrait être renouvelée pour 10 ans au niveau européen. Les effets de cet herbicide sur la santé et sur la biodiversité restent mal connus et son usage controversé. On vous explique.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Glyphosate, de nouveau autorisé pour 10 ans ?
Glyphosate, de nouveau autorisé pour 10 ans ?  —  Le Mag de la Santé - France 5

Il fait ces derniers jours son grand retour dans l’actualité : le glyphosate. La Commission européenne a en effet proposé le 20 septembre de reconduire pour 10 ans son autorisation dans l'Union Européenne. Mais une question persiste toujours : le glyphosate est-il dangereux pour notre santé ?

Interdit pour les particuliers depuis 2020

Le glyphosate est un désherbant de synthèse, initialement produit par la firme Monsanto (sous le nom de Roundup), qui fait parler de lui depuis des années. Il s'agit d'un herbicide total, c’est-à-dire qu’il agit sur tous les végétaux. Depuis 2020, la loi interdit son utilisation pour les particuliers. Mais il peut être utilisé pour désherber des vignes, des arbres fruitiers ou encore éliminer des "mauvaises herbes" dans les cultures de blé, de maïs ou de colza.

Ce qui préoccupe, c’est évidemment son impact sur la santé. Celle des agriculteurs qui manipulent ces produits, et celles des consommateurs. Mais sur ce sujet, il n’y a actuellement pas de consensus. Au contraire : la question de la dangerosité du glyphosate est même très controversée. Déjà, cela dépend de si l’on s’intéresse à l’agriculteur, en contact direct avec le produit, ou à la population générale. Mais aussi de s’il s’agit de glyphosate pur, ou d’une formule avec d’autres ingrédients. Ce qui est sûr, c’est que les avis des autorités sont partagés. 

Perturbateur endocrinien, effet sur les gènes...

D’un côté : les autorités française et européennes de sécurité des aliments, l’Anses et l’Efsa, estiment qu’il n’y a rien d’inquiétant pour les humains, pas de risque avéré ou présumé. De l'autre côté : le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) estime que le glyphosate est probablement cancérogène.

"Actuellement, il y a probablement, avec un niveau de preuve qu'on peut qualifier de moyen, un impact du glyphosate sur certains lymphomes, des cancers de certaines cellules du sang", reconnaît le Dr Robert Barouki, expert indépendant, biochimiste et toxicologue. "Des études expérimentales montrent aussi que le glyphosate pourrait induire des oxydations dans les cellules, peut-être un effet perturbateur endocrinien et un effet génotoxique (qui entraîne une mutation des gènes, ndlr)" poursuit-il.

Des effets aussi sur l'environnement ?

Les risques pourraient concerner les humains mais aussi la biodiversité, même si pour l’instant, les données scientifiques manquent encore. Au niveau environnemental, le glyphosate est tout de même quasi omniprésent dans les eaux européennes, et très souvent, au-delà du seuil de sécurité, pour ce qui concerne la consommation d’eau humaine.

On sait aussi que des poissons exposés à la substance sont affectés. Mais ces signaux sont insuffisamment pris en compte dans les décisions politiques, selon Nadine Lauverjat, déléguée générale de l’Association Générations Futures qui demande l’application du principe de précaution. "Cela nous paraît scandaleux aujourd'hui qu'on reparte sur 10 années supplémentaires", réagit-elle. "C'est à la fois dangereux pour la santé mais aussi pour l'environnement".

"Il faut se donner les moyens de s'en passer"

"Aujourd'hui, on sait que des alternatives existent. Les agriculteurs bio par exemple n'utilisent pas d'herbicides de synthèse parce qu'ils n'ont pas le droit de le faire. Donc on peut s'en passer, il faut se donner les moyens, aider les agriculteurs à faire une transition vers des outils alternatifs non chimiques et sans glyphosate" appuie necore Nadine Lauverjat.

En attendant, le conseil pour éviter de consommer des aliments potentiellement contaminés au glyphosate est, si possible, de privilégier les fruits et légumes bio.

Pour rappel, en 2017, le Président Emmanuel Macron s’était engagé à interdire le glyphosate sous trois ans. Entre temps, il avait reconnu avoir pêché par empressement. Au niveau européen, le vote est prévu pour le 13 octobre.