Pendant la Coupe du Monde, les violences faites aux femmes augmentent

En Angleterre, lors du mondial, les violences domestiques augmentent de 38% quand l’équipe nationale perd un match. Une vaste campagne d’affichage a été lancée dans le pays.

Maud Le Rest
Rédigé le , mis à jour le
La violence est sous-estimée, car les victimes ne vont pas systématiquement rapporter les abus qu’elles ont subi à la police.
La violence est sous-estimée, car les victimes ne vont pas systématiquement rapporter les abus qu’elles ont subi à la police.  —  © Lucas Peon, Jo Wallace, Jo Taylor, Maya Halilovic, Sally Emerton, Fiona McGinley, Joseph Bassary, Neil Raja, Ocean Outdoor

"[En Angleterre], les violences domestiques et la Coupe du Monde sont étroitement liées. Le nombre de cas augmente de 26% si le pays gagne, et de 38% s’il perd. Le jour suivant, il augmente de 11%, quelle que soit l’issue du match", prévient le National Centre for Domestic Violence (NCDV, un organisme britannique dédié à l’aide aux victimes de violences domestiques). Le NCDV en veut pour preuve une étude de 2013 publiée dans le Journal of Research in Crime and Delinquency. Cette étude se base sur le nombre d’abus domestiques dans le nord-ouest de l’Angleterre rapportés à la police pendant les Coupes du Monde de 2002, 2006 et 2010.

"Un environnement où les femmes sont rabaissées et dévalorisées"

Les chercheurs se sont basés sur le nombre de cas de violence domestique ("des actes violents ou menaçants") quotidiennement enregistrés par la police durant les tournois. Ils affirment néanmoins que cette violence est très probablement sous-estimée, les victimes n’allant pas systématiquement rapporter les abus qu’elles ont subi à la police. Une intuition confirmée par le Bureau de la Statistique nationale britannique : entre mars 2016 et mars 2016, 1,9 million d’adultes ont souffert de violences domestiques. Pourtant, seulement 1,1 million de cas d’abus et de crimes domestiques ont été enregistrés par la police.

Pour faire prendre conscience de ce phénomène, le NCVD s’est allié à l’agence de communication J Walter Thompson London pour lancer une vaste campagne d’affichage en Grande-Bretagne. Elle sera bientôt étendue au Japon et à la Suisse. Une action globale encouragée par les chercheurs, qui estiment que leur étude gagnerait à être reproduite dans d’autres pays. "Bien que la zone géographique de notre étude soit relativement restreinte, elle peut être généralisée, car les matchs sont retransmis partout. Si on reproduisait notre étude, cela pourrait permettre d’identifier et de réduire les violences domestiques liées aux matchs de football."

Pour Katie Ghose, directrice générale de l’organisation caritative Women's Aid, ce n’est néanmoins pas le sport en soi qui est à blâmer, mais le machisme des supporters. "Leurs attitudes sexistes, leurs chants et leurs comportements créent un environnement où les femmes sont rabaissées et dévalorisées", analyse-t-elle dans un communiqué. Une observation partagée par Jo Wallace le directeur créatif de J Walter Thompson London : "Les fans du monde entier regardent chaque match avec appréhension. Parfois, leur partenaire partage cette inquiétude. C’est ce côté moins connu, plus sombre du football, que nous avons voulu montrer avec notre campagne."