Covid : "la vaccination va nous sortir d'un drame social" pour Irène Frachon

La pneumologue Irène Frachon, qui a révélé le scandale du Mediator, a lancé un appel à la vaccination anti-covid. Elle revient sur les raisons qui l'ont poussée à s'exprimer publiquement aujourd'hui.

Laurène Levy
Rédigé le , mis à jour le
Dr Irène Frachon, interviewée par le Magazine de la Santé en septembre 2019.
Dr Irène Frachon, interviewée par le Magazine de la Santé en septembre 2019.  —  Crédits Photo : © Le Magazine de la Santé / Allodocteurs.fr

Dans une tribune publiée sur le site du Parisien, vous prenez position en faveur de la vaccination anti-covid. Pourquoi avoir attendu aujourd'hui pour vous exprimer sur la crise sanitaire ?

Dr Irène Frachon : Je n’ai pas fait d’intervention publique sur le covid jusqu’ici, car je pense qu’on a un panel de spécialistes qui s’expriment très clairement sur le sujet. Mais j’ai vu monter sur les réseaux sociaux une récupération de l’affaire du Mediator pour cautionner le discours des anti-vaccins.

Mon nom était cité dans des phrases du type "je suis sûr qu’Irène Frachon serait d’accord" avec des déclarations antivax. J’ai donc voulu couper court à la récupération de l’affaire Mediator contre l’intérêt général.

Pourquoi l’affaire Mediator est-elle régulièrement utilisée pour cautionner des discours de défiance contre les médicaments ?

Dr Irène Frachon : L’affaire Mediator a été un coup de semonce sur la confiance accordée aux discours officiels, aux autorités de santé et au monde médical en général.

D’autant que d’autres scandales sur la faillite de la pharmacovigilance ont suivi, comme l’affaire de la Dépakine ou de l’Androcur. Depuis, elle est utilisée comme le symbole qu’on ne peut plus croire personne et notamment que le vaccin anti-covid n’est pas sûr.

Je ne vais pas m’attaquer aux gens qui douteraient et je ne critique pas leur défiance. Je la partage même. Mais faire croire aux gens que se faire vacciner et prendre du Mediator serait pareil est un mensonge. C’est un discours fallacieux et dangereux.

A lire aussi : Mediator : l’histoire du combat du Dr Irène Frachon

Comment sait-on que le Mediator et les vaccins anti covid ne sont pas comparables ?

Dr Irène Frachon : Le principe d’évaluation des médicaments fondé sur des preuves montrait que le Mediator représentait un danger. Ce même principe montre au contraire que la vaccination contre le covid est extrêmement efficace et relativement dénuée d’effets secondaires.

Il y a des effets sérieux, voire des drames. Il est hors de question de les dissimuler mais ils doivent être étudiés en toute transparence et bien comprendre ce que sont les effets secondaires et la balance bénéfices-risques.

Je vais prendre un exemple très simple : les gens qui conduisent une voiture prennent des risques en permanence. Ils savent qu’ils peuvent en mourir et donc ils font attention, ils ne prennent pas leur voiture pas quand il y a du verglas, ni quand ils sont alcoolisés et ils ne roulent pas à 200 km/h.

Ils pèsent les risques et les bénéfices pour savoir quand la prendre ou non. C’est la même chose avec les thérapeutiques : il faut prendre connaissances des risques et des bénéfices. Et ce qui est sûr aujourd’hui c’est que la vaccination va nous sortir d’un drame social.

Dans ce cas, pensez-vous qu’il faille rendre cette vaccination obligatoire ?

Dr Irène Frachon : Je suis totalement favorable à une vaccination à grande échelle, la plus forte possible. Il faudrait atteindre idéalement 100% des personnes vaccinées !

Il serait regrettable, mais pas scandaleux selon moi, que pour protéger les gens, leur liberté et leur mode de vie, on puisse envisager une obligation. Et en tant que soignante, maintenant, je connais l’obligation vaccinale avec celle de l’hépatite B.

Et pour poursuivre sur la métaphore de la voiture, on a bien obligé le port de la ceinture de sécurité, qui était elle aussi très contestée en son temps.