Tueur de Nice : un trouble de la personnalité ?

Peu d'informations permettent d'expliquer le geste de Mohamed Lahouaiej Bouhlel, le tueur de la promenade des Anglais, à Nice. Le père du terroriste a évoqué des antécédents psychiatriques chez son fils. Que penser de sa psychologie ? Que nous apprennent les témoignages de ceux qui l'ont côtoyé ? Eléments de réponse avec le Dr Florian Ferreri, psychiatre à l’hôpital Saint-Antoine, à Paris.

Héloïse Rambert
Rédigé le , mis à jour le
Le titre de séjour de Mohamed Lahouaiej Bouhlel (Sipa)
Le titre de séjour de Mohamed Lahouaiej Bouhlel (Sipa)
  • Le terroriste de Nice, Mohamed Lahouaiej Bouhlel, semblait-il souffrir d'une pathologie psychiatrique ?

Dr Florian Ferreri, psychiatre : "Dans le langage commun, bien évidemment, nous parlons d'acte fou, de geste déraisonné et complètement en dehors de la réalité. En fait, nous ne savons que peu de choses de lui et de ses antécédents médicaux. Cependant, les premiers éléments connus sur le terroriste orientent vers un trouble grave de la personnalité, plutôt que vers une maladie psychiatrique comme une psychose ou un trouble de l'humeur. Certaines personnalités sont dites pathologiques car elles présentent des problèmes de comportement dans plusieurs domaines. Il est possible que cela ait été son cas. Ce genre de troubles est difficile à prendre en charge car la personne est rarement demandeuse de soins. Une psychothérapie, mais aussi des traitements psychiatriques, peuvent permettre de juguler certains des aspects pathologiques de la personnalité. Ce qui pourrait expliquer qu'il ait pris des médicaments."

  • Que peut-on dire de sa personnalité ?

Dr Florian Ferreri : "Ce que rapportent ses proches évoquent chez lui des traits de personnalité antisociale, caractérisés par une difficulté à maintenir des relations, une intolérance à la frustration, ou encore une difficulté de se conformer à la norme sociale. Mais aussi un grand narcissisme, avec une surestimation de lui-même et de ses capacités. Mohamed Lahouaiej Bouhlel a pu ressentir le besoin de faire quelque chose de « grandiose ». C'est-à-dire quelque chose qu'il estimait « à sa mesure », et qui contrastait avec le manque de considération qu'il estimait recevoir des autres."

  • Les troubles de la personnalité sont-ils un terrain favorable au passage à l'acte ?

Dr Florian Ferreri : "Le passage à l'acte est fréquent dans ces troubles. Mais généralement, il s'agit de gestes très impulsifs à l'encontre d'une personne, quelque fois sous l'influence de produits toxiques. Ce qui s'est passé à Nice est tout à fait atypique. Il s'agit d'une tuerie préméditée.

"Il y a souvent, chez les auteurs d'attentats une conviction que tous les moyens sont bons pour défendre une cause. Dans le cas du terroriste de Nice, d'autres éléments favorisants, comme une impression d'être persécuté, une tendance à la paranoïa, ont peut-être joué."