Stérilisations forcées au Pérou : l’ex-président devant les juges

Au Pérou, une procédure judiciaire va être lancée à l’encontre de l’ex-président, Alberto Fujimori. Il devra répondre de la stérilisation forcée de cinq femmes, décédées des suites de l’intervention, dans le cadre d'un programme national de planification familiale. 

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Stérilisations forcées au Pérou : l’ex-président devant les juges

Le Parquet général du Pérou a décidé d'engager une procédure judiciaire contre l'ex-président Alberto Fujimori, pour la stérilisation forcée de cinq femmes au cours de son mandat (1990-2000), a affirmé mercredi un organisme des droits de l'Homme.

Des victimes pour la plupart amérindiennes

"Le procureur général, Luis Landa, a ordonné une procédure judiciaire contre M. Fujimori et trois de ses anciens ministres de la Santé, les accusant d'être à l'origine des cas de stérilisation forcée de Mamerita Mestanza, Celia Ramos ainsi que de trois autres femmes qui ont subi des blessures graves dont elles sont décédées", a déclaré à l'AFP l'avocat des familles de victimes, Milton Campos.

Me Campos, avocat de l'ONG DEMUS qui défend les droits des femmes, a affirmé qu'au cours du mandat de M. Fujimori il y a eu au moins 2.164 cas de stérilisations forcées.

Dans son ordonnance de renvoi, "le procureur Landa se dit convaincu d'avoir en sa possession suffisamment d'éléments pour accuser l'ancien président Fujimori, ses ministres Marino Costa, Eduardo Yong et Alejandro Aguinaga ainsi que d'autres fonctionnaires", a affirmé M. Campos.

Les principales victimes étaient des femmes de milieux défavorisés, parlant la langue amérindienne quechua et résidant dans des zones rurales, selon l'ONG.

Elles avaient déjà porté cette affaire devant la justice il y a 15 ans. En novembre 2015, le gouvernement péruvien avait ordonné la création d'un registre national des victimes de stérilisation forcée. 

En décembre 2016, les victimes, conseillées par DEMUS, avaient fait appel de la décision de la procureure Marcelita Gutierrez de classer partiellement ce dossier.

La planification familiale en alibi

En 1996, le gouvernement de Fujimori avait lancé un programme de planification familiale qui prévoyait des ligatures de trompes, théoriquement sur la base du volontariat. Cette politique avait pour objectif de réduire le taux de natalité et de promouvoir le développement économique.

Lors de la campagne présidentielle de 2016, Keiko Fujimori, la fille de l'ex-président, avait promis d'indemniser les victimes de stérilisations forcées, mais sans admettre la responsabilité de son père.

Pour sa part, le candidat Pedro Pablo Kuczynski, qui a été élu président à l'issue de ces élections, avait qualifié cette pratique de "crime contre l'Humanité" et promis d'indemniser les victimes. Vingt mois après son arrivée au pouvoir, ces dernières n'ont toujours rien perçu. 

L'ex-président Kuczynski a dû démissionner en mars dernier, après avoir gracié, en décembre 2017, Alberto Fujimori, 79 ans, condamné à 25 ans de prison en 2009 pour corruption et violations des droits de l'homme.