Procès Mediator : les victimes témoignent

Ce procès historique apporte enfin une réponse aux victimes et à leurs familles. Ils témoignent.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

Dans la rue, Patricia est toujours essoufflée au bout d’une dizaine de mètres. Cette fatigue est une des graves séquelles laissées par le Médiator. Ce médicament pris pour maigrir a détruit ses valves cardiaques. En 1999, son cardiologue lui annonce qu’il faut l’opérer pour les changer. 

Des séquelles à vie

Elle décrit son ressenti d’alors : « C’est un choc ! Moi quand il m’a dit il faut vous opérer du cœur… J’en ai pleuré ! J’ai dit mais ce n’est pas possible ! On va m’ouvrir le thorax, on va me charcuter à l’intérieur. Mais c’était obligatoire, je risquais de mourir si on ne me faisait pas ça, parce que mes valves ne fonctionnaient plus. »

Patricia garde également des traces physiques de cette intervention : « J’ai une cicatrice qui descend presque jusqu’au nombril et c’est les os qui ont été coupés. Même maintenant, même après tant d’années, la deuxième intervention j’ai encore des douleurs thoraciques !  

À chaque fois que je me couche, que je prends mon médicament pour dormir, que j’entends mes valves qui font tic tac… Je me dis « Ce n’est pas vrai toute ma vie, ça va être comme ça ! » C’est terrible ! Il n’y a pas d’autre solution, maintenant c’est comme ça. »

La mise en place de ces valves mécaniques a entraîné de graves complications qui ont faillit coûter la vie de Patricia. Depuis, elle a été mise en invalidité. Toute sa vie a été transformée par le Médiator.

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Un décès qui aurait pu ne jamais être expliqué

Patricia est encore là, auprès de ses filles.  Ce n’est pas le cas de Pascale, décédée la nuit du 8 mars 2004.

Lisa Boussinot a encore les larmes aux yeux quand elle se remémore cette soirée :

« Il est une heure du matin et je trouve ma mère en train de suffoquer, consciente qu’elle est en train de suffoquer. Les pompiers arrivent. Donc mon père descend leur ouvrir. Et puis moi je suis face à ma mère qui arrive à dire « Je suis en train de mourir ». Je la vois faire son dernier souffle. Et voilà. Ça se passe en 15 minutes. Ça s’arrête là. L’histoire, elle s’arrête là avec ma mère. »  

À l’époque, personne n’apporte d’explication à ce décès brutal. Elle arrive enfin, en juin 2010, avec le livre d’Irène Frachon sur le scandale du Médiator. Un médicament que prenait Pascale à cause d’un cholestérol anormal. 

Sa famille dépose alors la première plainte pénale contre les laboratoires Servier, fabricant du Médiator. Une plainte qui conduira les juges à retenir l’accusation d’homicide involontaire.  

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« Ma mère n’avait pas de problème cardiaque » 

« Nous dans le cadre de l’instruction on a fourni par exemple l’attestation de son médecin généraliste qui la suit de 1990 jusqu’à son décès et qui avant n’avait jamais détecté. Pascale Saroléa n’a pas de problèmes cardiaques, assure aujourd’hui sa fille Lisa. Non ma mère n’avait pas de problème cardiaque. Ma mère, elle a juste consommé un médicament qui lui a causé des problèmes cardiaques, deux valvulopathies, et qui a causé son décès. »  

Lisa et les siens font partie des milliers de victimes qui ont suivi le prèces et attendu avec impatience et appréhension le verdict des juges.

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2,7 millions euros d'amende

Après sept mois de discussions et de débats, les laboratoires Servier, créateur du Médiator, ont été condamnés à 2,7 millions d’euros d’amende pour « tromperie aggravée » et « homicides et blessures involontaires » 

L’ex-numéro 2 du groupe, Jean-Philippe Seta a lui été condamné à 4 ans d’emprisonnement avec sursis et 90 600 euros d’amende. 

L’ancienne agence nationale du médicament, l'Afssaps, a été condamnée à 303 000 euros d’amende, notamment pour « homicides et blessures involontaires » par négligence.