Sida : crainte d'un rebond de l’épidémie faute d'argent

La 22e conférence internationale sur le sida s'est ouverte lundi 23 juillet à Amsterdam, aux Pays-Bas. Cette édition 2018 s'ouvre dans un enthousiasme mitigé : la baisse des coupes budgétaires fait craindre un rebond de l’épidémie.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Sida : crainte d'un rebond de l’épidémie faute d'argent

Le prince Harry, l'actrice Charlize Theron, le chanteur Elton John  - ainsi que 15.000 experts et militants -  sont attendus cette semaine à la 22e conférence internationale sur le sida qui s’ouvre aujourd’hui à Amsterdam, aux Pays-Bas. Des scientifiques, des militants, des associations, des responsables politiques vont partager les résultats des dernières recherches et faire le point sur la lutte contre l'épidémie.

Le nombre d'infections en baisse

Le nombre d'infections baisse et pour la première fois depuis le début du siècle, le total de morts annuel est passé sous un million en 2016 (990.000) puis 2017 (940.000).

Mais paradoxalement, ces progrès entraînent un relâchement dans la prévention qui, conjugué à une baisse des financements internationaux, fait craindre un rebond de l'épidémie. "La dernière fois que je me suis exprimé ici, en 1992, je n'aurais jamais pensé que j'y reviendrais 26 ans plus tard, vivant et en bonne santé", a lancé hier David Barr, un militant américain séropositif. Ce succès est "incroyablement fragile", a-t-il prévenu, en craignant qu'on revienne à "l'horreur de 1992", avec une flambée des infections et des décès.

Inquiétude sur le financement de la lutte anti-sida

Au premier rang des préoccupations: la question du financement. "Nous allons avoir des problèmes si nous n'avons pas davantage d'argent", a assuré le chercheur américain Mark Dybul, ancien dirigeant du Fonds mondial de lutte contre le sida. Le pire scénario selon lui : que le manque de financement s'ajoute à une explosion des nouvelles infections à cause de la démographie galopante dans certains pays durement touchés, particulièrement en Afrique. "Mélangez ces deux éléments et vous aboutirez à une crise majeure", a-t-il mis en garde, en craignant que "le monde ne perde le contrôle de l'épidémie".

Un désengagement des Etats-Unis ?

L'an dernier, 20,6 milliards d'euros étaient consacrés à des programmes de lutte contre le sida dans les pays à faible et moyen revenu, qui en financent eux-mêmes 56%, selon l'Onusida. Mais l'instance de lutte contre le sida de l'ONU estime qu'il manque 7 milliards de dollars par an pour que cette maladie ne soit plus une menace pour la santé publique mondiale en 2030. La communauté des chercheurs et des associations craint surtout une baisse des dotations américaines. Depuis l'élection de Donald Trump, les Etats-Unis, le premier contributeur historique de la lutte contre le sida, ont prévu des coupes budgétaires, qui n'ont pour l'heure pas été concrétisées.

Plus de prévention et moins de répression ?

Sur le front de l'épidémie, si la situation s'améliore globalement dans le monde, cela cache de fortes disparités. Les infections sont en hausse dans une cinquantaine de pays, faute de prévention ou à cause de législations répressives contre des populations à risque (homosexuels, toxicomanes).

C'est pourquoi les associations pressent les responsables politiques internationaux de cesser de réprimer la toxicomanie et de privilégier les programmes de réduction des risques (mise à disposition de seringues stériles, salles de consommation...).

"Dites non à la guerre contre les drogues", plaide Coalition PLUS, un regroupement d'associations, dans une campagne qui détourne un célèbre slogan antidrogue américain des années 80.  Elle s'intitule "Just say no to the war on drugs", en référence au "Just say no" ("Dites non" à la drogue) de l'administration Reagan. La guerre contre les drogues est "la meilleure alliée des épidémies de VIH et d'hépatites virales" et "a conduit à une véritable catastrophe sanitaire", accuse Coalition PLUS.

Aujourd'hui, 36,9 millions de personnes dans le monde vivent avec le virus VIH. Près de trois sur cinq prennent des traitements antirétroviraux pour l'éviter, la plus haute proportion jamais atteinte.