Des bactéries préhistoriques seraient présentes dans nos intestins

A l'intérieur de notre intestin, se cacheraient des bactéries vieilles d'au moins... 15 millions d'années. C'est ce que révèle une étude, publiée dans Sciences, le 21 juillet. Les hommes vivant dans des pays industrialisés auraient perdu certaines bactéries, présentes encore aujourd'hui chez les Africains. Ce qui encourage les chercheurs à poursuivre leurs investigations pour comprendre à quoi ressemble véritablement un microbiote intestinal sain. 

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Des bactéries préhistoriques seraient présentes dans nos intestins

Des dizaines de milliards de bactéries ont suivi l'évolution de l'homme, selon cette étude réalisée par des chercheurs de l'Université de Californie à Berkeley. "Nous montrons avec cette recherche que certaines bactéries intestinales humaines descendent directement de celles qui vivaient dans les intestins de nos ancêtres communs avec les singes", indique Andrew Moeller, l'un des co-auteurs de l'étude."Cela prouve qu’il y a une lignée ininterrompue de ces bactéries depuis des millions d’années", depuis l’émergence des singes africains.

Les auteurs ont étudié les bactéries intestinales à partir d'échantillons fécaux de 47 chimpanzés de Tanzanie, 24 bonobos de la République démocratique du Congo, 24 gorilles du Cameroun, et 16 Américains. L'objectif de cette étude était de déterminer l'origine de ces bactéries humaines et animales et leur âge. Preuves génétiques à l'appui, l'exploration de leur ADN a permis de montrer que l'évolution de ces bactéries en souches distinctes correspond au moment où les ancêtres communs à l'homme et au singe ont évolué vers des espèces différentes.

Les chercheurs ont ensuite comparé la même séquence d'ADN qu'ils avaient analysée sur tous les singes, mais cette fois entre les gens du Connecticut et les gens du Malawi. Ils ont constaté que les souches bactériennes des Africains ont divergé de celles des Américains il y a environ 1,7 million d'années, ce qui correspond au premier exode des ancêtres de l'homme hors d'Afrique. "Ceci suggère que les bactéries intestinales peuvent être utilisées pour tracer les premières migrations humaines et animales", dit Moeller. Ainsi, l'analyse des bactéries trouvées dans l'estomac de la momie Ötzi, surnommée "l'homme des glaces" de 5.300 ans, a permis de dater précisément les mouvements migratoires préhistoriques entre le Proche-Orient et l'Europe. 

Les Américains ont perdu certaines de ces souches de bactéries présentes chez les Malawiens, les gorilles et les chimpanzés, ce qui correspond à la réduction générale de la diversité génétique du microbiote qui a été observée chez les personnes dans les sociétés industrialisées. Les auteurs émettent comme hypothèse que l’évolution des régimes alimentaires et l'utilisation des antibiotiques auraient produit ce changement dans notre microbiote intestinal.

"Le chemin de transmission était des mamans singes aux bébés singes pendant des centaines de milliers de générations au moins", explique Justin Sonnenburg, l'un des auteurs. Mais la disparition de certaines souches de bactéries qui persistent dans d'autres singes, et pas chez les humains, soulève une question importante pour notre santé : "Ces résultats ont des implications énormes dans la façon dont nous devrions poursuivre la compréhension de ce qu'est un microbiome [ndlr : données génétiques du microbiote] vraiment sain", conclut-il