Noël, sa bûche, son sapin... et ses infarctus !

Selon de nombreuses études, les infarctus du myocarde atteignent leur maximum aux vacances de Noël et du nouvel an. De nouveaux travaux suédois confirment l’existence de ce phénomène.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Noël, sa bûche, son sapin... et ses infarctus !
© Catherine CLAVERY

Un infarctus du myocarde – autrement dit la nécrose des tissus cardiaques par manque d’oxygène, du fait de l’obstruction d’une artère – peut-il arriver à tout moment ? Oui, mais certaines heures ou certaines dates apparaissent clairement plus propices que d’autres… Plusieurs travaux réalisés dans les années 1980 ont en effet révélé que ces évènements survenaient plus fréquemment au cours des 4 heures suivant le réveil.

D’autres études suggèrent que le stress émotionnel, l'activité physique ou des changements brutaux de mode de vie favorisent la rupture des plaques d’athéromes présentes dans les artères. Quelques études laissent ainsi entendre que les ouragans ou les matchs de football seraient corrélés à ces accidents. Il est toutefois probable que ces observations soient le fruit de coïncidences statistiques, celles-ci n’étant pas retrouvées par tous les chercheurs.

En revanche, dans toutes ces études occidentales [1], un événement semble bel et bien un déclencheur d’infarctus : les fêtes de fin d’années. En particulier les libations de Noël et celles du Jour de l’an.

Noël fatal

Concernant Noël, selon les régions dans lesquelles ces travaux sont menés, l’excès d’infarctus enregistrés survient le 24 ou le 25 décembre. Dans une nouvelle étude d’envergure, passant en revue les dates et heures de 283.014 infarctus survenus en Suède entre 1998 et 2013, le réveillon de Noël apparaît bel et bien dévastateur : il est en effet associé à une augmentation de plus de 30% de ces cardiopathies.

De façon notable, le soir du 24 décembre en Suède, les infarctus atteignent leur pic vers 22 heures.

Le 25 et le 26 décembre arrivent en deuxième et troisième position des jours "à infarctus". Le jour de l’an arrive en quatrième place. Les fêtes traditionnelles de la Saint Jean-Baptiste (fin juin) correspondent également à une anomalie statistique.

En revanche, la Saint Sylvestre (31 décembre) est associé à un nombre d’incidents plus faible que la moyenne.

Le lundi apparaît comme le jour de la semaine où le risque d’infarctus est le plus élevé (sur-risque de près de 10%), tandis qu’il apparaît légèrement mais significativement plus faible le samedi.

Les évènements sportifs et les autres périodes de congés n’apparaissent pas corrélées à des variations notables des maladies cardiaques.

Alcool, fatigue… et âge !

Face à la cohérence des résultats des études occidentales, le hasard semble exclu. Mais les chercheurs se gardent bien d’échafauder des théories. "Les facteurs de risque à court terme [avérés pour l’infarctus] incluent, sans toutefois s'y limiter, le stress émotionnel, l'activité physique intense, l'exposition au froid et la pollution. […] Des méta-analyses précédentes ont montré qu'une expérience aiguë de la colère, de l'anxiété, de la tristesse, du chagrin et du stress augmente le risque d'infarctus du myocarde et explique donc probablement le risque plus élevé observé dans notre étude."

La consommation excessive d’alcool et de nourriture, l’exposition au froid nocturne ou l’accumulation du manque de sommeil (en particulier pour le Nouvel an) sont autant de facteurs qui pourraient contribuer, selon les chercheurs suédois, à ces sur-risques d’infarctus.

Toutefois, à eux seuls, ces facteurs n’expliquent pas tout, sinon quoi les évènements sportifs seraient eux aussi synonyme d’hécatombe cardiaque. L’âge pourrait constituer un autre facteur clef : "[le phénomène est apparu] plus prononcée chez les personnes âgées de plus de 75 ans, celles atteintes de diabète connu et celles ayant des antécédents de maladie coronarienne", notent ainsi les chercheurs, qui jugent nécessaire d’approfondir les recherches afin d’infirmer ou de valider ces hypothèses de façon rigoureuse.

D'autres explications ?

Mais les chercheurs n’excluent pas que les résultats observés puissent être liés à des phénomènes beaucoup plus triviaux. "Il est possible que des membres de la famille qui rendent visite à des parents après une longue période d’espacement les trouvent en mauvais état et décident de les [faire] admettre à l’hôpital", écrivent-ils. Toutefois, "si tel était le cas, on pourrait s'attendre à une diminution du nombre d'infarctus du myocarde dans les semaines suivant Noël, [ce qui n’est pas le cas]".

Les auteurs jugent également peu probable que les patients âgés retardent le signalement des symptômes par peur de perturber les célébrations, car cela se traduirait par une diminution du nombre d’hospitalisations juste avant les fêtes – ce qui n’est pas le cas.

la rédaction d’Allodocteurs.fr

Source : M.A. Mohammad et al. "Christmas, national holidays, sport events, and time factors as triggers of acute myocardial infarction: SWEDEHEART observational study 1998-2013" BMJ 2018. doi:10.1136/bmj.k4811


[1] Les auteurs des travaux suédois notent que plusieurs études identifient un phénomène analogue à l’occasion de certaines fêtes islamiques dans les pays où elles sont largement célébrées. Voir notamment :

  • D.P Phillips et al. "Cardiac mortality is higher around Christmas and New Year’s than at any other time: the holidays as a risk factor for death." Circulation 2004. doi:10.1161/01.CIR.0000151424.02045.F7
  • M. Zubaid, et al. "Incidence of acute
myocardial infarction during Islamic holiday seasons". Eur J Epidemiol 2006. doi:10.1007/s10654-006-0008-8
  • D. Phillips et al. "Christmas and New Year as risk factors for death." Soc Sci Med 2010. doi:10.1016/j. socscimed.2010.07.024
  • J. Knight et al. "Revisiting the “Christmas Holiday Effect” in the Southern Hemisphere. J Am Heart Assoc 2016. doi:10.1161/JAHA.116.005098